La réalité économique interdit aux responsables politiques de faire des promesses irréalisables<!-- --> | Atlantico.fr
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Les réformes annoncées par l'union des gauches d'un côté et le RN de l'autre ne sont pas sérieusement chiffrées et, par conséquent, elles ne sont pas financées.
Les réformes annoncées par l'union des gauches d'un côté et le RN de l'autre ne sont pas sérieusement chiffrées et, par conséquent, elles ne sont pas financées.
©LUDOVIC MARIN / AFP

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C’est le général de Gaulle qui disait que les promesses n’engagent que ceux qui les entendent. Les Français, dont la colère est sans doute légitime, s'aperçoivent qu'on ne peut pas leur offrir une réponse au mépris des contraintes les plus évidentes de la réalité.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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La réalité économique et financière ne s’est jamais autant imposée dans le débat politique qu’aujourd'hui. Tous les milieux économiques sont à la manœuvre, les chefs d’entreprises sont aux manettes parce qu'ils craignent une dégradation de la situation économique et financière. Les réformes annoncées par l'union des gauches d'un côté et le RN de l'autre ne sont pas sérieusement chiffrées et, par conséquent, elles ne sont pas financées. 

Donc, ces réformes ne peuvent qu’aggraver les dysfonctionnements financiers et entraîner des difficultés pour des catégories sociales qui en ont déjà. Ce que les experts de l'économie s'évertuent à expliquer, c’est que si l'aspiration de la plupart des Français est d'améliorer leurs conditions de vie et notamment d'accéder à plus de prospérité, il faut que le système économique puisse créer de la croissance et de la richesse. 

Or, pour créer de la richesse, il faut que les acteurs aient confiance dans le système et dans sa gouvernance. Sinon, les acteurs décrochent, les investisseurs n'investissent pas, l'épargne se fige, le consommateur se restreint, etc. 

Conclusion : il faut nécessairement que les promesses de gouvernement répondent aux conditions qui protègent le fonctionnement du système, c’est-à-dire il faut que les responsables qui ont des convictions idéologiques et morales comprennent aussi qu’il existe un mur de réalités, sinon ils risquent de se fracasser contre ce mur et tous ceux qu’ils ont embarqués avec eux. 

Les conditions de la confiance sont simples : l'expertise, la crédibilité, la sincérité, la cohérence, etc. A gauche comme a droite . 

Actuellement, les responsables de la gauche "unie" n'ont évidemment pas dans leur offre politique les composants nécessaires au respect de ces conditions. Les membres de ce front populaire et surtout les socialistes se sont complètement écartés de certaines de leurs valeurs qui sont au cœur de l'ADN de la gauche. Mais c’est leur problème de conscience. 

Mais l'exercice devient grave et urgent lorsque les promesses semblent exonérer des problèmes juridiques élémentaires liés à l'État de droit. C’est d’autant plus grave lorsque les projets ne sont pas chiffrés, car ils ne seraient pas finançables. 

Les exonérations de charges et d'impôts, l'indexation des salaires, les baisses de TVA, les hausses de salaires, les aides à l'immigration, etc., toutes ces mesures font exploser les compteurs budgétaires, entre 100 et 200 milliards d'euros. Lorsque la gauche annonce que ces dépenses supplémentaires seront financées par des augmentations d'impôts sur les riches et les très riches, ils ignorent simplement qu'ils étoufferaient ainsi l'activité et créeraient les conditions d'une sortie de l'Europe et de l'euro. 

Un tel programme écrit la chronique d'une crise annoncée, comme en Grèce autrefois, en Italie avec Berlusconi et même au Royaume-Uni au lendemain du Brexit. À chaque fois, c’est le FMI qui a dû siffler la fin de la partie. 

Les responsables de l'extrême droite, qui sont aux portes de Matignon, ne sont pas dans la même situation que la France insoumise, car ils appréhendent les effets d'un programme irréalisable. Leur ambition est de se présenter comme un parti responsable et raisonnable, débarrassé des scories de l'extrême droite de l'époque de Jean-Marie Le Pen. 

Ainsi, le programme proposé par Jordan Bardella reprend l'essentiel des propositions de Marine Le Pen sur le pouvoir d'achat, la retraite à 60 ans, etc. Mais depuis lundi, le prochain premier ministre annoncé, commence à expliquer que le temps des réformes attendra quelques années, car la situation économique ne permettrait pas de faire ce qu'il avait prévu de faire. Donc, marche arrière toute, en se cachant derrière un audit qui décrira un état des lieux sans doute désastreux, mais qui justifiera le recul du RN sur beaucoup de promesses faites, car elles ne sont pas finançables et sont toxiques.

Ces grandes manœuvres ne crédibilisent pas pour autant l'équipe qui brigue le pouvoir. D'abord, parce que les dirigeants du RN ont pris des engagements et gagné des parts du marché politique sur la base de promesses très démagogiques. 

Ensuite, parce que s'ils reviennent sur les excès démagogiques, ils ne seront pas plus crédibles et n'échapperont pas au procès en insécurité. Les acteurs du système économique ont besoin de cohérence entre les actions, mais aussi de stabilité dans le temps. Jordan Bardella peut se présenter comme un futur Premier ministre raisonnable, mais il sera toujours comptable de ses déclarations antérieures et des propositions de Marine Le Pen qui, elles, n'étaient pas raisonnables. 

Enfin, les promesses électorales que les politiques corrigent en arrivant au pouvoir sont une chose que les marchés peuvent évaluer positivement, mais les électeurs, eux, seront déçus et frustrés. Ils auront le sentiment d'avoir été trompés.

 Avec de tels procédés, on a vite fait de fabriquer des "gilets jaunes" dans un climat hautement inflammable.

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