Santé
La lutte contre la migraine sévère : un sujet d’intérêt général
La crise sanitaire a replacé la santé au cœur des préoccupations des Français. Vivre libre, c’est aussi vivre en bonne santé. Pourtant, le manque de visibilité de la lutte contre la migraine dans le débat public semble aller à rebours des attentes des citoyens.
Alors que de nombreux patients migraineux sévères font face à un échec de tous les traitements disponibles, de nouveaux médicaments, les anti CGRP -une molécule intervenant dans le déclenchement des migraines- sont reconnus dans une vingtaine de pays européens comme une solution préventive efficace et sont remboursés. Ce n’est pourtant pas le cas en France, le remboursement de cette nouvelle classe de traitements n’ayant pas été autorisé. Pour éviter que les patients aillent chercher ces traitements à l’étranger, deux des trois laboratoires commercialisant un traitement anti-CGRP ont finalement décidé de le mettre sur le marché en officine avec une contrainte notoire : le coût mensuel de ce traitement innovant et onéreux est à la charge des patients.
Alors que la politique de santé publique française se caractérise par une ambition historique d’égalité dans l’accès aux soins, qu’elle cherche à imposer son leadership en matière d’innovation médicale au niveau mondial, le refus du remboursement de cette nouvelle classe de traitements contre la migraine sévère contredit ces ambitions. Médecine à deux vitesses, retard à l’innovation, voilà en substance ce que risque d’entrainer cette décision de non-remboursement de ces médicaments spécifiques.
Sans doute, le gouvernement est-il victime des préjugés dont souffrent les patients migraineux : encore trop souvent perçu comme un mal anecdotique et ordinaire, les patients atteints de migraine sévère peinent à être considérés avec sérieux. Pourtant, la migraine sévère constitue un handicap : ceux qui en souffrent voient leur vie professionnelle, sociale, sentimentale et familiale gravement perturbée : ce sont des années perdues à ne pas pouvoir vivre sa vie.
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Les patients migraineux ne sont pas des cas isolés : ils sont 7 à 8 millions en France, dont seulement 1,3 million consultent un professionnel de santé et sont traités. 17 000 d’entre eux sont atteints de migraine sévère et sont en échec de traitement, c’est-à-dire qu’ils souffrent de crises migraineuses durant 8 jours ou plus malgré au moins deux traitements préventifs.
En conséquence, ils voient leur productivité au travail réduite et le maintien d’une vie familiale et sociale normale devenir impossible. Les impacts de la migraine sévère sur la vie des patients qui en souffrent sont concrets et lourds : arrêt maladie ou perte d’emploi, difficulté accrue à s’occuper de ses enfants, isolement social, anxiété, dépression… Il est incompréhensible de laisser des patients se battre seuls contre leur maladie alors que des traitements sont disponibles : le principe du « quoi qu’il en coûte » devrait trouver à s’appliquer lorsqu’il s’agit de patients dépourvus d’alternatives thérapeutiques.
Les pouvoirs publics doivent revoir leur copie sur les critères d’accès au remboursement des médicaments de la classe des anti-CGRP. Par la même occasion, l’opinion publique et les professionnels de santé doivent être sensibilisés à la lutte contre la migraine afin d’éviter le nomadisme médical et d’aider les entourages professionnels, sociaux, et intimes des patients à les accompagner dans leur lutte contre cette maladie.
Si l’Allemagne, l’Italie, le Royaume-Uni ont accepté de rembourser ce médicament : pourquoi pas nous ? 25 à 45 % des patients atteints de migraine sévère arrêtent aujourd’hui leur traitement préventif parce qu’il est inefficace ou qu’ils ne supportent pas ses effets indésirables : allons-nous dire aux Français que l’innovation médicale n’est réservée qu’à quelques-uns ?
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A l’heure où nous construisons l’Europe de la santé, où nous harmonisons nos 27 systèmes d’analyse nationaux en incitant à des évaluations européennes communes pour les nouveaux médicaments et dispositifs médicaux, à l’heure où la stratégie de la nation est de faire de la France la 1ère nation européenne innovante, nous ne pouvons nous satisfaire de décisions entravant l’accès aux soins. L’absurdité de cette situation saute aux yeux : les associations de patients et les professionnels de santé ont tous reconnu la nécessité et l’efficacité de cette nouvelle classe de produits. Leurs revendications doivent être entendues.
Nathalie Colin Oesterlé
Députée européenne
Conseillère municipale de Metz
Conseillère métropolitaine
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