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L’avenir de la gauche plombé par la haine entre La France Insoumise et Manuel Valls
©JACQUES DEMARTHON / AFP

Gauches irréconciliables

Les passes d'armes s'enchaînent entre Jean-Luc Mélenchon et Manuel Valls. Dans un récent tweet, le leader de La France insoumise a déclaré : "Corvée : siéger avec l'ignoble Valls à la commission Nouvelle-Calédonie".

Virginie Martin

Virginie Martin

Virginie Martin est Docteure en sciences politiques, habilitée à Diriger des Recherches en sciences de gestion, politiste, professeure à KEDGE Business School, co-responsable du comité scientifique de la Revue Politique et Parlementaire.

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Atlantico : Ici, qui vient-il trahir ?". Qu'est-ce que cette animosité révèle de l'état de la gauche aujourd'hui en France ?

Virginie Martin :  Cette joute met en lumière des questions latentes à gauche et révèle deux gauches. Une gauche dans une conception de République plus surplombante, avec la conception de l'universalité a la Française, qui dit que la République doit être Une et indivisible (Valls) et une vision culturaliste (Mélenchon) qui dit que finalement, nous sommes ces différences, et qu'il faut les faire vivre (dialectique de la diversité). On tient là un écartèlement de cette gauche. Une gauche culturaliste et une gauche universaliste. La question terroriste rebat les cartes, bien sûr, car beaucoup ont envie de dire que la gauche culturaliste a échoué et qu'il faut s'en remettre à cette gauche universaliste. C'est pour cela qu'à travers Manuel Valls (même si l'homme n'est pas porteur) c'est cette  gauche qui se réveille et revient au-devant de la scène. Le problème est que Macron ne résout pas cette affaire. Il la fait disparaître. Mon livre "Ce Monde qui nous échappe" a comme sous-titre "Pour un universalisme des différences", et qui est un appel à la réconciliation de ces gauches. Il y a une fracture profonde qui crée un climat délétère.

De la part des "culturalistes", on estime que les propos sur les insécurités culturelles sont "des discours frontistes déguisés". Ils estiment que lorsque l'on est dans une Republique une et indivisible, c'est nier l'identité culturelle de l'autre. C'est ce qui est sous-entendu chez Mélenchon.

La gauche de Valls affirme, de son côté, qu'il faut "tenir la France" qu'il ne faut pas commencer à parler de Bretons, Arabes, mais parler de la France entière, et que plus on accepte la diversité plus après on a des mouvements centrifuges qui ne font plus unité.

Ce que nous disent ces déclarations, c'est que le conflit entre ces deux gauches n'est pas réglé. Il l'a été ponctuellement au regard de l'état d'urgence, pour des questions sécuritaires avec Valls aux manettes. Mais derrière ça hurle, il y a des gens qui travaillent à dire qu'ils veulent une France culturaliste d'un côté ou universaliste de l'autre.

Est-ce que ces deux gauches sont réconciliables à l'avenir selon vous ?

Il faut créer recréer quelque chose qui rend ces deux bouts conciliables. Quelque part Mélenchon n'a pas tort, et Valls n'a pas tort. Il faut faire un mais un dans le multiple et c'est là que cela devient compliqué. Tous les deux, d'une certaine manière, raisonnent sans prendre en compte la complexité de notre monde. Si je prends une réponse vallsiste, j'ai une réponse assez primaire qui dit "non au hallal, non au kasher, non à la Bretagne…". Sauf que tous ces gens ont envie d'exister aujourd'hui et Manuel Valls se trompe d'époque.

Mélenchon lui dit que chacun doit s'affirmer... mais alors on se retrouve face à une France fragmentée. Tant que l'on ne fait pas "un dans ce multiple et du multiple dans ce un", le tout dans une dialectique très complexe, cela ne fonctionnera pas. Est-ce que Macron est capable de faire cela ? Pour l'instant, il n'en a pas la matrice, mais il a un coup à jouer dans cette affaire. S'il arrivait à se positionner judicieusement et à faire cette universalisme des différences, il gagnerait tout.

Entre ces deux-là est-ce qu'il y a encore un espace politique exploitable ?

Je pense que oui, il y a quelque chose qui est possible car la radicalité anticapitaliste de Melenchon gêne autant que la radicalité sécuritaire de Valls. Je pense qu'il y a un espace entre les deux et que chacun ne représente qu'une petite partie des gens de gauche. On pourrait imaginer se positionner un Boris Vallaud ou une Najat Vallaud-Belkacem au milieu, toujours très à l'aise dans cet entre-deux.

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