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L’avenir de l’Europe prend une place centrale dans la campagne allemande : quel degré de lucidité sur les maux réels qui minent l’UE ?
©Pixabay

Outre-Rhin

Contrairement à la France, l'euroscepticisme est presque absent dans les partis politique allemands. Le débat Outre-Rhin pour les prochaines législatives portera plus sur le degré de solidarité à accorder aux pays du sud et l'établissement d'une vision et d'un projet à long terme pour l'Europe.

Christophe Bouillaud

Christophe Bouillaud

Christophe Bouillaud est professeur de sciences politiques à l’Institut d’études politiques de Grenoble depuis 1999. Il est spécialiste à la fois de la vie politique italienne, et de la vie politique européenne, en particulier sous l’angle des partis.

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Atlantico : Un article du Spiegel pointe l'importance grandissante du thème de l'avenir de l'Europe dans les élections législatives qui auront lieu à l'automne prochain outre-Rhin. Le sujet se pose-t-il de la même manière qu'en France ? Comment décrire les différentes positions défendues ?

Christophe Bouillaud : D'abord il faut souligner que la France et l'Allemagne ne sont pas dans la même position vis-à-vis de l'Union européenne. L'Allemagne a conscience d'être le pays hégémonique au sein de l'UE et tout particulièrement de la zone euro alors qu'une grande partie des dirigeants français se sentent dans une situation de demandeurs ou de critique vis-à-vis de l'Allemagne. Pour résumer outre-Rhin on ne parle pas de sortie de la zone euro alors qu'en France le terme de Frexit commence à rentrer dans le vocabulaire courant. Il faut souligner que l'arc politique allemand ne connaît qu'une force eurosceptique voir europhobe, le parti "Alternative pour l'Allemagne" qui a d'ailleurs de grandes difficultés dans son développement. Alors que nous, nous sommes dans une situation dans laquelle le développement aussi bien à droite qu'à gauche des pensées hostiles à l'UE telle qu'elle est actuellement. A gauche on peut parler du développement de la France Insoumise qui utilise de plus en plus le terme d'indépendantisme français, un terme surprenant venant de la gauche de la gauche qui jusque-là n'avait jamais réfléchi dans ce sens. Le paysage politique est inversé, en France c'est les forces eurosceptiques qui dominent alors qu'en Allemagne c'est les forces pro européennes. La différence est donc énorme entre les deux.

Le débat en Allemagne n'est pas sur l'Europe, il est plutôt sur le niveau de solidarité à accorder aux pays européens et la nature de cette solidarité. Entre les verts les socio-démocrates qui veulent mettre plus d'investissements dans la solidarité européenne et les chrétiens démocrates, il y a une différence de niveau de solidarité. On peut même parler de différence de nature car une partie de la gauche en Allemagne rêve encore d'une vision fédéraliste de l'Union européenne. La CDU est d'ailleurs aussi sur cette ligne fédéraliste.  La nature du débat est donc marquée par une europhilie de fond en Allemagne alors qu'il est marqué par un euroscepticisme de fond en France.

Sigmar Gabriel et Martin Schulz se sont déclarés favorables à ce que l'Allemagne contribue financièrement davantage au projet européen. Mais cette réponse pourrait-elle réduire des fractures au sein de l'UE également alimentées par la décision d'Angela Merkel d'accueillir les réfugiés syriens ? Comment évaluez-vous le degré de lucidité de l'Allemagne au regard des différentes positions sur la Grèce, ou encore sur l'avenir de l'Europe ?

C'est la stratégie mise en place par Schulz qui est de considérer que l'Allemagne prenne plus compte de la situation éco dans le sud de l'Europe.  Cela correspond à son constat en tant que social-démocrate que dans les pays du sud de l'Europe, les partis socio-démocrates sont en grande difficulté là où ils n'ont pas été capables de remettre en cause l'austérité. En particulier en Espagne pour ne pas parler de la situation grecque où les socio-démocrates ont disparu de la scène politique. 

Pour Schulz il faut aider les pays du sud car c'est indispensable d'abord pour sauver les socio-démocrates et aussi pour relancer l'économie européenne sur un sentier de croissance beaucoup plus dynamique. Il y a un compromis proposé à l'électorat allemand. Dépenser un peu plus pour les jeunes d'Europe du sud pour le développement de l'Europe du sud de façon à préserver l'union économique et monétaire entre les pays.

C'est une décision qui serait de nature à réduire les fractures car il y a toute une réflexion de la part de Schulz sur la fracture croissante. Cette réflexion est liée au fait que Schulz a été député européen depuis longtemps et cela lui a permis de comprendre la situation des autres socio-démocrates dans l'ensemble de l'Union.

 Si l'on prend la conduite de l'Allemagne de Merkel depuis le déclenchement de la crise en 2007 c'est une vision à court terme et conservatrice qui a essayé de préserver à chaque étape le statu quo. Elle n'a été que réactive mais n'a jamais développé de grandes stratégies de développement d'une Union européenne plus intégrée. Le grand mérite de Merkel est d'avoir sauvé l'UE telle qu'elle existait mais le grand échec a été d'avoir été incapable de développer une vision d'avenir pour l'UE dans laquelle tous les européens auraient leur place. Dans le fond l'affaire grecque montre que l'on a pu sacrifier une population au profit de la stabilité de l'Union. Ce qui est critique maintenant dans les tribunaux pour non-respect du droit européen.

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