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L’AfD prend le parti d’un Dexit et ça n’a rien d’anecdotique pour l’Allemagne.
L’AfD prend le parti d’un Dexit et ça n’a rien d’anecdotique pour l’Allemagne.
©Odd ANDERSEN / AFP

Programme électoral

L'AfD s'est prononcé en faveur d'une sortie de l'Union européenne en soutenant le projet de Dexit. L’AfD radicalise son programme en vue des législatives allemandes prévues en septembre prochain.

Edouard Husson

Edouard Husson

Universitaire, Edouard Husson a dirigé ESCP Europe Business School de 2012 à 2014 puis a été vice-président de l’Université Paris Sciences & Lettres (PSL). Il est actuellement professeur à l’Institut Franco-Allemand d’Etudes Européennes (à l’Université de Cergy-Pontoise). Spécialiste de l’histoire de l’Allemagne et de l’Europe, il travaille en particulier sur la modernisation politique des sociétés depuis la Révolution française. Il est l’auteur d’ouvrages et de nombreux articles sur l’histoire de l’Allemagne depuis la Révolution française, l’histoire des mondialisations, l’histoire de la monnaie, l’histoire du nazisme et des autres violences de masse au XXème siècle  ou l’histoire des relations internationales et des conflits contemporains. Il écrit en ce moment une biographie de Benjamin Disraëli. 

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Atlantico : En vue des élections législatives, le parti Afd radicalise son programme en se prononçant pour une sortie de l'Union européenne (ou Dexit). Est-ce une stratégie viable pour ce parti ? Peut-on supposer que le nombre d'Allemands qui souhaitent que le pays quitte l'UE est supérieur à la base de soutien existante de l'AfD ?

Edouard Husson : En fait, la politique allemande est en train de se radicaliser à la fois vers la gauche et vers la droite. Madame Merkel entraîne la CDU toujours plus à gauche, avec comme résultat de lui faire perdre une partie de ses soutiens (le parti se rapproche dangereusement de la barre des 25% et pourrait passer en-dessous aux prochaines élections de septembre 2021. Du coup, l’AfD pratique une surenchère conservatrice. Le parti était jusque-là favorable au strict respect des traités européens. A présent, il prône le « Dexit ». C’est un argument qui peut porter dans les Länder de l’Est où l’on ne ressent pas le même attachement à « l’Europe » qu’à l’Ouest et puis dans des milieux conservateurs et libéraux qui sont en train de se radicaliser contre la construction européenne, le plan de relance etc...Il ne faut pas oublier, surtout, que l’AfD a pour objectif de mobiliser les abstentionnistes, qui constituent un réservoir important pour le parti. 

L'Afd tourne autour des 11-12% d'intention de vote. Une augmentation de 2 ou 3 points supplémentaires pourrait-il compliquer voire chambouler les coalitions à venir ?

L’AfD à 13 ou 14%, cela peut faire passer la CDU en-dessous des 25% et même derrière le parti écologiste, c’est-à-dire perdre la Chancellerie. Dans ce cas, on serait au bout du processus de destruction de la droite allemande initié par Angela Merkel lorsqu’elle a décidé, en solitaire, au printemps 2011, de sortir de l’industrie nucléaire; continué lorsqu’elle a largement ouvert les frontières aux étrangers venus du Proche-Orient, d’Afrique et d’Albanie, à l’automne 2015; et couronné, si l’on ose dire, par la tentative actuelle de détruire le fédéralisme allemand que la Chancelière voudrait faire passer au nom de l’urgence sanitaire: dans le projet de révision de la loi de « protection contre les infections » présenté hier en conseil des ministres, les Länder ne pourront plus avoir de politique propre, alors que, dans la subsidiarité qui caractérise l’Allemagne Fédérale, la santé est une compétence des Länder, le Ministère Fédéral n’ayant qu’un rôle ce coordination.  

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Même si l'hypothèse d'un Dexit est pour l'instant improbable, l'expérience britannique nous encourage-t-elle à ne pas la sous-estimer ?

Je ne crois pas au Dexit. Les Allemands ne sont pas les Britanniques. Le nazisme était allemand et trop d’Allemands reculeraient avant de mettre un bulletin « Dexit » dans l’urne. Et puis la tradition de liberté est solide et ancienne en Grande-Bretagne, elle remonte au Moyen-Age. Alors que les libertés allemandes ont été remises en cause par l’autoritarisme luthérien puis par le centralisme prussien, avant même le nazisme et le communisme. En revanche, ce que l’on sent monter, ce sont de profondes divisions politiques allemandes qui vont éloigner ce pays toujours plus du rôle que nos présidents voudraient lui assigner depuis François Mitterrand: le leadership d’une « Europe-puissance ». 

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