Jean-Marc Ayrault prépare le grand soir de la fiscalité... enfin, c’est ce qu'il prétend<!-- --> | Atlantico.fr
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Jean-Marc Ayrault annonce qu'il ouvrira un débat national autour de la fiscalité
Jean-Marc Ayrault annonce qu'il ouvrira un débat national autour de la fiscalité
©Reuters

L'Édito de Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Ayrault annonce l’organisation d’un grand débat national avec les partenaires sociaux et les syndicats sur la fiscalité française, afin de déterminer le niveau des dépenses publiques souhaité, et par conséquent le niveau d’impôt. Et tout cela à taux de prélèvement inchangé et applicable à partir de 2015 ! Si le Premier ministre espère répondre à la colère des contribuables avec ce type d’initiative, il rêve.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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L’interview du Premier ministre aux Échos est surréaliste. Aucun problème ne sera écarté de ce débat dit-il. Le montant de l’impôt sur le revenu, la contribution des entreprises, la fusion entre l’impôt sur le revenu et la CSG, l’augmentation de la TVA, l’écotaxe… Quel chantier ! Tout doit être prêt pour 2015 et présenté au Parlement. Ce projet est sans aucun doute le meilleur pour étouffer un problème qui, à partir d’une taxounette écologique, a failli mettre le feu au pays.

Depuis que l’impôt existe, l’impôt a toujours servi les mêmes objectifs. D’abord il a permis aux princes qui gouvernent de trouver les moyens de gouverner. L’impôt sert à financer les dépenses de l’État. Ensuite, il a servi à créer un lien social entre les différentes catégories de la population. Cela dit, au fur et  à mesure que le temps passe, les problèmes au sein de cette population se multiplient. Du coup, l’État utilise l’arme fiscale pour régler le problème. La fiscalité devient de plus en plus complexe. Les niches fiscales s’ajoutent aux exemptions pour les uns ou les surtaxes pour les autres.

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Au bout d’un moment, le poids de l’impôt devient insupportable. Et plutôt que de créer du lien et de la solidarité, il engendre les conflits, les rivalités et les violences. Nous en sommes là aujourd’hui. Cela arrive environ tous les 70 ans. Il y a, du coup, deux solutions. Ou bien la violence est telle et les gouvernements réussissent à donner un grand coup dans les milliers d’articles du code des impôts, ou alors ils réforment en rachetant aux uns des avantages pour les donner à d’autres en s’arrangeant que la résultante soit positive.

La solution proposée par Jean-Marc Ayrault est la pire des solutions. Aucune grand-messe n’a jamais débouché sur une réforme, pour une raison très simple. La démocratie directe est impraticable. Notre démocratie revient à designer des responsables dont le job est de réformer. On a des élus pour cela, c’est leur Job ! Leur responsabilité, c’est de prendre leurs responsabilités.

Si ce qu'ils décident correspond à ce qu’ils ont promis, et que cela optimise l’intérêt général, il n’y a pas de problème. C’est le b.a.-ba de la gestion publique. Quoi qu’il en soit, on ne peut pas demander à l’opinion publique quel est le niveau de dépense publique convenable ; quelle est la répartition équitable entre l’impôt sur le revenu et l’impôt sur les sociétés ; quelle est le niveau optimal de la TVA. En procédant de cette façon, on est sûr d’ouvrir un marché des intérêts particuliers et de la démagogie.

Le pouvoir politique n’a plus le choix. Il doit répondre à la contrainte de la réalité. Il doit impérativement mettre tout en œuvre pour restaurer des marges de compétitivité au niveau des entreprises. Ça veut dire qu'il doit baisser les dépenses publiques de fonctionnement pour baisser le niveau des prélèvements. Il n’a surtout pas intérêt à organiser une sorte de référendum. Il doit assumer la réforme. Assumer… c’est un verbe qui ne doit pas appartenir au dictionnaire du pouvoir.

A vouloir aller vite, le Premier ministre dit qu'il risquerait l’impopularité. A vouloir baisser les dépenses  publiques il risquerait de susciter l’inquiétude. Évidemment, mais en ne faisant rien, il a aussi distillé l’inquiétude et récolté l’impopularité. Quitte à être impopulaire mieux vaudrait que cela soit pour le bon motif de la réforme.

Les maires des grandes villes sont intelligents et savent gérer cette contradiction. En début de mandat, ils commencent les grands travaux, ils démolissent le centre-ville pour faire passer le tramway, enfouir les lignes électriques et construire les rocades. Au bout d’un an, la colère monte chez les commerçants de la rue principale, elle se propage aux mères de familles qui ne peuvent plus conduire leurs enfants à l’école. Le maire reçoit moult pétitions. Au bout de quatre ans les travaux se terminent et la ville retrouve une nouvelle jeunesse, un nouveau dynamisme. S’il reste un peu d’argent le maire offrira quelques ronds-points fleuris de géraniums rouges.

Enfin, à la 5ème année, le maire et son conseil peuvent faire campagne en espérant être réélu glorieusement, s’il n’a pas fait de grosses bêtises, s’il s’est tenu un peu éloigné de sa famille politique qui gère à Paris et enfin, s’il a eu la chance que le plus gros employeur de la ville ne dépose pas son bilan 6 mois avant les élections. Donc une fois réélu, il pourra s’attaquer à un autre chantier, celui de la fiscalité locale. Parce qu’une fois réélu il faudra payer le tramway…

Bizarre que dans ce gouvernement certains des  membres qui ont géré des grandes villes, à défaut d’entreprises, perdent leur courage d’affronter la réalité en arrivant à Paris. Peut-être est-ce le cuir des fauteuils ministériels qui les impressionne.

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