Japon : et s'il fallait évacuer ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Le péril nucléaire oblige des millions de japonais à quitter la région de Fukushima.
Le péril nucléaire oblige des millions de japonais à quitter la région de Fukushima.
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Fiction ou anticipation

Scénario catastrophe : l'un des coeurs nucléaires de la centrale de Fukushima entre en fusion et contamine des centaines de kilomètres carrés de terres habitées. Des millions de japonais doivent quitter la région pour une durée indéterminée. Le pays étant déjà très fortement urbanisé, certains choisissent l'exil. Fiction ?

Atlantico : Scénario fictif qui pourrait malheureusement devenir réel. Le péril nucléaire oblige des millions de japonais à quitter la région de Fukushima. Certains choisissent de quitter le Japon...

Jean-Paul Gourevitch : La première hypothèse, c’est que les Japonais aillent dans les pays où ils ont déjà été dans le passé, notamment au début de la guerre de 1939-45, c’est à dire toute la péninsule indochinoise, l’Indonésie et Singapour, la Malaisie, les Philippines, et accessoirement Taiwan.  Dans tous ces pays, il existe déjà des diasporas japonaises en place, bien que relativement peu nombreuses. Maintenant, le problème, c’est que les Japonais n’ont pas laissé un souvenir impérissable dans ces régions [pendant l'Occupation durant la Seconde guerre mondiale NDLR], ils sont même plutôt mal vus.  Mais si des Japonais doivent émigrer là-bas, ils arriveraient avec une puissance économique et un savoir faire important. Ce sont des arguments de poids, dans une zone toujours en croissance économique.

Les Japonais qui voudraient quitter le pays à cause des risques sismiques ou nucléaires pourront aussi aller s’installer aux Etats-Unis, ou la diaspora japonaise est loin d’être ridicule, ainsi également qu’au Canada, ou une autre communauté asiatique est déjà très présente, les chinois.

Il s’agit d’un schéma d’émigration volontaire et individuelle, mais quid d’une émigration organisée par les autorités, si une zone de plusieurs centaines de kilomètres carrés devait-être évacuée au Japon, pour quelques années ?

Les deux formes d’émigration coexisteront. On peut sans problème imaginer des accords de pays à pays, pour que pendant un certain temps, certains acceptent d’accueillir des ressortissants nippons, pour aider le Japon à « passer le cap ». Parmi les pays qui ont de bonnes relations avec le Japon dans la région, il y a par exemple la Malaisie, car beaucoup de Malais y ont émigré pour y travailler. En revanche, j’imagine très mal le Vietnam accepter d’accueillir des Japonais en masse…

Mais évidemment, si le gouvernement japonais apporte une aide financière a des pays qui en ont besoin, comme les Philippines, la Malaisie toujours, ou encore des pays de la péninsule indochinoise, oui, des accords peuvent être trouvés pour que des Japonais s’y installent quelques années. Par ailleurs, des Japonais peuvent s’installer provisoirement aussi dans des pays qui ont une tradition d’accueil, comme l’Allemagne, la France et les Etats-Unis, pays qui se sont constitués par strates d’immigration successives.

Peut on imaginer voir émerger des Japanese Towns à certains endroits dans le monde ?

Le premier pays évident pour que de tels quartiers ou villes sortent de terre, c’est le Canada. Il y a là-bas énormément d’espace pour accueillir des migrants provisoires ou définitifs. Par ailleurs, au Canada, il existe déjà des China Towns, des Italian towns. Le Canada pourrait accueillir de tels Japanese Towns

Le Canada est un pays très ouvert : seul le gouvernement québécois est crispé sur les questions d’immigration. Y accueillir plusieurs centaines de milliers de Japonais, notamment sur la cote Ouest, qui regarde du bon coté, face au Japon, oui, c’est possible et crédible

Même dans le nord des Etats-Unis, du coté de l’Etat de Washington et de l’Oregon, il y a aussi des possibilités d’accueillir des centaines de milliers de Japonais émigrés.

En France en revanche, ce serait beaucoup plus difficile, car l’on ne voit pas comment une immigration japonaise massive pourrait se superposer à d’autres, actuelles. L’immigration choisie de Nicolas Sarkozy ne collerait pas à un éventuel besoin d’émigration japonaise, car c’est une immigration de compétences, ou étudiante, donc limitée en volume.

Qui émigre ? 

Ce sont toujours ceux qui ont le plus de choses à offrir au pays d’accueil, contrairement aux idées reçues sur les immigrés pauvres. Il faut un capital financier pour partir et s’installer, ou bien un capital intellectuel, des diplômes, ou bien un capital social, car on a des relations sur place dans le pays d’accueil, ou les trois à la fois. En gros, la classe moyenne japonaise.

Une chose est sûre en revanche : les Japonais sont éminemment patriotes, et si migration il devait y avoir elle serait pour la plupart d’entre eux provisoire, contrairement aux Irlandais qui partaient au 19e siècle pour les Etats-Unis, sans espoir ni intention de revenir.

Propos recueillis par Jean-Baptiste Giraud

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