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Pourquoi la peur de l'inflation 
est irrationnelle
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Chiffon rouge

La politique monétaire est aujourd’hui contraignante, jouant le rôle du boulet au pied de l’économie européenne. L’idéologie de la peur de l’inflation, dans les conditions actuelles, est aussi crédible que la peur d’un excès de vitesse d’une automobile à l’arrêt.

Nicolas Goetzmann

Nicolas Goetzmann

 

Nicolas Goetzmann est journaliste économique senior chez Atlantico.

Il est l'auteur chez Atlantico Editions de l'ouvrage :

 

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Le chiffon rouge de l’inflation est aujourd’hui largement agité, de nombreux responsables et commentateurs perpétuent ce mythe erroné et dangereux, entrainant la zone euro dans une crise encore plus profonde.

Dans un article intitulé "Reviving Japan", Milton Friedman nous indiquait que "des taux bas sont en général un signe que la politique monétaire est stricte, comme au Japon, des taux élevés, un signe que la politique monétaire est laxiste". Cette approche contre intuitive de la politique monétaire est essentielle dans le débat qui nous occupe.

Les trois grandes zones économiques que sont le Japon, les États-Unis et l’Europe sont frappées par le même mal, des économies en récession ou en faible expansion, pourtant à priori "favorisées" par des taux historiquement bas mis en place par leurs banques centrales respectives. Pourtant, des taux bas n’ont jamais été une source fiable d’information permettant de croire que la politique monétaire est accommodante.

En donnant aux banques centrales la capacité de fixer les taux d’intérêts, nous donnons à cette autorité la responsabilité du niveau de la demande, et de la conjoncture économique. L’intensité de la crise qui frappe la zone euro depuis 2008 a incité les autorités monétaires à abaisser les taux à un niveau proche de 0, mais encore insuffisant pour pouvoir permettre une reprise de confiance des acteurs économiques.

La difficulté tient alors à abaisser des taux déjà nuls, cette impossibilité pratique oblige ainsi les banques centrales à agir de façon "non conventionnelle", notamment en injectant des liquidités dans le marché (Plans d’assouplissement quantitatifs). Ces plans ne visent qu’à pallier l’impossibilité d’abaisser encore les taux, dans des économies en récession, et de soutenir une demande faisant cruellement défaut. La pression idéologique devant ce phénomène complexe incite les autorités monétaires à beaucoup de prudence, c’est ainsi que le japon s’est enfermé dans une stagnation économique qui dure depuis 20 ans, situation que la zone euro s’empresse de rejoindre.

La conséquence de ce manque de croissance a été de mettre en exergue le niveau de dettes des états.  Afin de lutter contre ce qui n’est qu’un symptôme, la zone euro applique des plans d’austérité, venant ainsi ajouter un fardeau supplémentaire à une politique monétaire déjà contraignante. Cette double austérité, absurde, a provoqué un taux de chômage en Europe supérieur à 10%, une récession en cours, et des niveaux de dette qui, mécaniquement, explosent. 

Les politiques d’austérité aujourd’hui menées ont pour ambition d’agir sur le chômage structurel (dont le niveau varie selon certains paramètres nationaux : niveau de l’état providence, salaire minimum, productivité, fiscalité etc..) alors que le problème est actuellement conjoncturel, et de la responsabilité de la banque centrale. Bien entendu, ces réformes sont nécessaires pour la compétitivité de nos économies à long terme, mais elles ne peuvent être menées que par la mise en place d’un soutien monétaire adapté aux conditions actuelles.

Les récentes évolutions liées au  cours du pétrole, agitant encore le spectre de l’inflation, ne sont le résultat que d’une tension sur l’offre, et non d’une demande trop forte. Les taux "breakeven" à 5 ans, anticipation du niveau d’inflation en France, indiquent aujourd’hui un niveau de 1.62%, signe que la peur actuelle de l’inflation est infondée.

Les craintes, largement répandues, laissant croire à la volonté des autorités monétaires de "monétiser la dette", et d’infliger ainsi aux populations une taxation déguisée, sont le moteur de notre déclin. Au contraire, la politique monétaire est aujourd’hui contraignante, jouant le rôle du boulet au pied de l’économie européenne. L’idéologie de la peur de l’inflation, dans les conditions actuelles, est aussi crédible que la peur d’un excès de vitesse d’une automobile à l’arrêt.

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