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Libye : 
aventurisme ou amateurisme ?
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A l'heure du bilan

Le conflit en Libye dure : les forces occidentales ont entamé le cinquième mois de guerre... sans obtenir un véritable succès militaire. Si le régime du colonel Kadhafi est tout à fait condamnable, est-on vraiment sûr des personnes que l'on souhaite aider à le remplacer ?

Ardavan Amir-Aslani

Ardavan Amir-Aslani

Ardavan Amir-Aslani est avocat et essayiste, spécialiste du Moyen-Orient. Il tient par ailleurs un blog www.amir-aslani.com, et alimente régulièrement son compte Twitter: @a_amir_aslani.

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Alors que l’on entame le cinquième mois d’un conflit qui n’en finit pas (de continuer), il convient de s’interroger sur l’opportunité de cette guerre. Partant d’une autorisation onusienne de « no-fly zone » sur la partie orientale du pays, les forces occidentales se sont crues autorisées à effectuer une analyse particulièrement large de la portée juridique de la résolution pour faire déferler sur ce pays une véritable guerre contre le pouvoir du dictateur de Tripoli. A ce jour, en dépit de plus de 15 000 sorties aériennes et de frappes ciblées,  le seul résultat tangible obtenu est la partition de fait du pays en deux, et du rififi au sein de l’Alliance atlantique notamment entre la France et les Etats-Unis, illustré pas plus tard que récemment par l’échange d’amabilité entre le président français et l’ancien ministre de la Défense américain.

Bien entendu, personne ne peut légitimement contester la nature dictatoriale voire même sanguinaire du pouvoir de Kadhafi. De même que personne ne peut légitiment balayer l’aspiration démocratique du peuple libyen dans son ensemble. Il n’en demeure pas moins que l’analyse du déroulement de ce conflit et les éléments factuels que l’on relève chaque jour sur le terrain démontrent que cette «révolution » libyenne ne se situe nullement dans la dynamique du printemps arabe. Nous ne sommes pas face à une révolte spontanée motivée par des aspirations démocratiques d’un peuple mais sommes confrontés à un soulèvement armé de la région de Benghazi située à l’est du pays.

La structure hiérarchisée de l’opposition de Benghazi, plus connue sous son nom institutionnel de Comité National de Transition, n’a rien de celle d’un comité de réforme populaire. Elle est quasi exclusivement composée d’anciens cadres dirigeants de Kadhafi, d’islamistes et de monarchistes partisans du retour d’héritiers de l’émir de Cyrénaïque.

La planète a beau compter une vingtaine de pays arabes, tous ne se ressemblent pas. Alors que la Tunisie voisine connaît une population ethniquement homogène, il en va autrement de la libye qui se différencie par sa mosaïque tribale qui en constitue l’ossature ethnique. Par ailleurs, cette région de Benghazi a toujours été l’épicentre de l’islamisme au nord de l’Afrique, fournissant le plus grand nombre de djihadistes étrangers, en Iraq notamment. Rares sont les hommes qui ne soient pas barbus dans ses rues. Les femmes n’y travaillent pas et n’ont pas le droit de conduire à l’instar de l’Arabie Saoudite. C’est dans cette ville que la confrérie Sénoussie intégriste a toujours eu sa base, et c'est à partir d'elle qu’elle espère déclencher son retour.

Sans aucun doute, la coalition saura, à coup de bombes, se débarrasser des quatre décennies de pouvoir sans partage de Kadhafi. Mais pour voir s’installer à sa place une instabilité politique accrue et une montée en puissance des islamistes dans tout le Sahel, sans mentionner les  accusations de deux poids deux mesures que certains ne manqueront pas de soulever en comparaison avec les cas du Bahreïn ou de la Syrie.

Cette guerre libyenne encore plus que de l’aventurisme relève de l’amateurisme.

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