Grande dépression de 2008 : les méthodes de sauvetage employées par les Anglo-saxons ont-elles aggravé les inégalités ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Les bienfaits des politiques monétaires non conventionnelles sur les inégalités l’emportent largement.
Les bienfaits des politiques monétaires non conventionnelles sur les inégalités l’emportent largement.
©Reuters

Economies en péril

7 années après le déclenchement de la crise de 2008, les rapports académiques se multiplient pour évoquer la question des conséquences des politiques monétaires non conventionnelles sur les inégalités. Le résultat est sans appel, les bienfaits l’emportent largement.

Nicolas Goetzmann

Nicolas Goetzmann

 

Nicolas Goetzmann est journaliste économique senior chez Atlantico.

Il est l'auteur chez Atlantico Editions de l'ouvrage :

 

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Au cours des années qui ont suivi le déclenchement de la crise de 2008, de nombreuses Banques centrales à travers le monde, la Réserve fédérale des Etats-Unis en tête,  se sont lancées dans des politiques dites "non conventionnelles" afin de soutenir la croissance et l’emploi. Consécutivement à la mise en place de ces mesures de création monétaire, de nombreuses voix se sont élevées pour dénoncer un système de soutien artificiel à l’économie et ayant des conséquences néfastes sur les inégalités de revenus au sein de la population. La politique monétaire ne serait qu’un outil au service des plus riches.

La première logique soutenant cette vision repose sur l’apparence du mécanisme. Une banque centrale crée de la monnaie électroniquement, puis, procède à l’achat de titres de dette auprès d’établissements bancaires. La façade se prête donc parfaitement à la confusion : les banques centrales créent de la monnaie pour la transférer aux banques qui "s’enrichissent" mais en oubliant un peu rapidement la réalité. Il ne s’agit pas d’un don mais d’une vente. L’impact arithmétique sur le bilan de la banque vendeuse est donc nul.  Mais d’autres arguments sont plus sérieux.

Le plus important d’entre eux est boursier, et a pu être mis en évidence par une récente étude menée par la Réserve fédérale de Philadelphie.  L’impact de la politique monétaire a été massif sur les cours des bourses. Les détenteurs de titres ont ainsi pu profiter de ce soutien pour faire fructifier leurs portefeuilles. Or, les bénéficiaires de cette conséquence se retrouvent plus parmi les grands patrimoines que chez les ouvriers. Le déséquilibre est ici réel. Mais si l’indice phare de l’économie américaine, le SP500, a été multiplié par trois depuis 2009, il n’a fait que retrouver le chemin de sa tendance pré-crise. Comme a pu l’indiquer l’ancien Président de la Fed, Ben Bernanke, dans une tribune publiée le 1er juin dernier.

"Depuis la fin de la récession de 2001 jusqu’au pic du cycle économique alors en cours (2007), le SP 500 a progressé d’environ 1,2% par trimestre. Si cet indice avait cru au même rythme depuis la fin 2007, il s’afficherait à un niveau moyen de 2123 au premier trimestre de cette année."

Or, le niveau actuel de l’indice est de 2080, ce qui revient à dire que la politique monétaire a bel et bien permis d’effacer les conséquences boursières de la crise, mais pas davantage. Afin de mesurer l’égalité de la situation, il convient alors de savoir quelles ont été les conséquences de la politique monétaire sur l’emploi, et de juger si le bénéfice économique a été équitablement partagé entre travail et capital.

Total emplois non agricole. Etats Unis. En milliers.


(cliquer sur l'image pour l'agrandir)

Entre 2008 et la fin 2009, les Etats-Unis ont détruit près de 9 millions d’emplois, pour en créer 12 millions au cours des cinq années suivantes, c’est-à-dire depuis que la politique monétaire de la Fed a commencé à produire ses effets. De 10% à la fin 2009, le taux de chômage a aujourd’hui atteint le seuil de 5.5% de la population active. De la même façon, la progression des salaires américains revient aujourd’hui à un niveau de 2,1%.

Ainsi, il peut être admis que la mise en place de la politique monétaire non conventionnelle a d’abord agi sur la valeur des actifs financiers avant d’entrainer les roues de l’économie réelle, mais  pour un résultat positif dans l’ensemble.

Mais la véritable question concernant le préjugé inégalitaire de la politique monétaire américaine est la prise en compte de son contre-argument. Les inégalités auraient-elles été maitrisées si la Fed n’était pas intervenue ? Pour répondre à cette question, il suffit de regarder le résultat de la politique économique européenne jusqu’au début de l’année 2015, c’est-à-dire avant la mise en place de la réplique de la politique de le Fed par la BCE. Et ce résultat est sans appel : une croissance zéro depuis l’entrée en crise et un niveau de chômage de 11,5%, ce qui peut se définir comme un désastre économique ayant pour conséquence directe le sacrifice d’une génération entière. En termes de lutte contre la pauvreté, le chômage ou les inégalités, le schéma américain est supérieur, cela est sans équivoque.

Plus largement, une politique monétaire n’a pas vocation à agir directement sur la distribution des revenus, c’est-à-dire sur les inégalités de revenus. Cette fonction est au-delà de ses capacités, car le rôle d’une politique monétaire est de contrôler le niveau d’activité économique. C’est à la politique budgétaire qu’il appartient d’intervenir, notamment par la voie de la fiscalité, afin d’instaurer une distribution égalitaire de la croissance économique.

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