François Hollande dans "Le Pouvoir" ou l'effet dévastateur d'un exercice de communication raté<!-- --> | Atlantico.fr
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Le documentaire "Le Pouvoir" de Patrick Rotman raconte les huit premiers mois de François Hollande à l’Elysée.
Le documentaire "Le Pouvoir" de Patrick Rotman raconte les huit premiers mois de François Hollande à l’Elysée.
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Dans les coulisses

Le documentaire "Le Pouvoir" de Patrick Rotman sur les huit premiers mois à l’Elysée de François Hollande est sorti hier en salle.

André Bercoff

André Bercoff est journaliste et écrivain. Il est notamment connu pour ses ouvrages publiés sous les pseudonymes Philippe de Commines et Caton.

Il est l'auteur de La chasse au Sarko (Rocher, 2011), Qui choisir (First editions, 2012), de Moi, Président (First editions, 2013) et dernièrement Bernard Tapie, Marine Le Pen, la France et moi : Chronique d'une implosion (First editions, 2014).

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Le pouvoir est un film détonant. Dans tous les sens du terme. A première vue, on peut le regarder comme un exercice de communication qui a raté son coup : sont en effet répertoriés les sept premiers mois de la présidence Hollande, depuis la passation des pouvoirs jusqu’au dernier Conseil de ministres de 2012. Apparemment, tout, dans ce magnifique palais de l’Elysée, n’est que luxe, calme et volonté. "Moi président" reçoit ministres, chefs d’Etats étrangers, voyage en train et en avion, signe les premiers contrats de génération, salue la petite foule sympathisante bien rangée au-delà des barrières. François Hollande, sympathique et souriant - ce qu’il est - apparaît comme le capitaine à la force tranquille qui tient ferme le gouvernail - ce qui reste encore à prouver. Ce film est l’exact contraire de La conquête, docu-fiction qui mettait en scène le Sarkozy de 2007. Là où tout était empoignades, désordres conjugaux et politiques, cris et crises, ici tout semble devenu, cinq ans plus tard, harmonie retrouvée, gouvernance efficace, sourires aussi complices que courtois.Tout va désormais très bien dans le meilleur des mondes présidentiels.

A deuxième vue, Le pouvoir est dévastateur. Les auteurs, à l’insu de leur plein gré, s’étendent sur les images éternelles de ce magnifique domaine au cœur de Paris et son quotidien monarchique : ballets incessants des huissiers, des serveurs, des chauffeurs, de la garde républicaine, des gendarmes, des voitures à gyrophares, des ministres qui vont et viennent dans un parcours minuté. Le contraste est énorme avec les images de Hollande recevant Ayrault, Fabius, Le Drian et consorts, qui montrent bien la différence entre le roi et ses féaux. Mais très vite, leurs voix se fondent dans les jardins éternels de l’Elysée, où les feuilles mortes se ramassent à l’aspirateur. Cette omniprésence de la nature et de l’étiquette finit, dans le film, par relativiser à l’extrême les efforts, si sincères qu’ils soient, des princes qui nous gouvernent.

A l’aune du 55, Faubourg Saint-Honoré, de ses lustres et de ses tapisseries, de ses fauteuils Louis XV et de sa vaisselle d’or, les mots et les phrases, les êtres et leurs titres, paraissent soudain empruntés, empesés, rapetissés par cette succession d’images guindées où, en fait, la lourdeur du cérémonial remplit l’image et masque le fond, c’est-à-dire l’essentiel : où en est le pouvoir aujourd’hui ? La question, pendant une heure et demie, ne sera pas posée.

Dans la salle de cinéma où se projetait hier le film, il y eut un éclat de rire général : quand Pierre Le Mas, secrétaire général de l’Elysée, s’entretenant avec François Hollande, lui déclare que Jérôme Cahuzac a très bien parlé à l’Assemblée, et qu’il a, en quelques phrases, muselé l’opposition. Pour le reste, de Valérie Trierweiler à Marisol Tourraine, on ne saura rien, sinon des sourires et des passages feutrés. L’image la plus forte reste celle des huissiers refermant les portes des conseils de cabinet comme des conseils des ministres : nous, spectateurs, sommes exclus. Et le demeurerons.

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