Pire que 2008 ? La faillite grecque pourrait être un détonateur encore plus violent que celle de Lehman Brothers<!-- --> | Atlantico.fr
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Le système monétaire (connu sous le nom d’Eurosystème) pourrait être mis sous pression...
Le système monétaire (connu sous le nom d’Eurosystème) pourrait être mis sous pression...
©Flickr / Bichuas (E. Carton)

Apocalypse soon

Le fond d'investissement Paulson&Co prévoit l'explosion de l'économie mondiale si la Grèce tombe en faillite. Le sauvetage du pays apparaît donc comme d'autant plus urgent...

Malgré un plan d’austérité très important, la Grèce pourrait ne pas réussir à échapper au défaut de paiement, prévu pour le mois de mars prochain. Encore plus grave, si le pays venait à faire défaut, nous pourrions expérimenter une réaction en chaîne plus importante que celle vécue par les opérateurs financiers post-faillite de la banque Lehman Brothers, comme l'a souligné le très respecté John Paulson, surnommé le "sultan des subprimes" pour avoir misé sur l'écroulement des fameux emprunts américains.

Tel un château de cartes, les différents niveaux du système bancaire et financier européen s'écrouleront

La faillite d’un État est bien plus compliquée que celle d’un établissement bancaire. En effet, celle-ci peut se matérialiser de plusieurs manières. Classiquement, le défaut se fait à travers une dévaluation de la monnaie (pour les obligations émises dans la devise de l’État).

Nous sommes ici dans un cas de figure particulier. La Grèce ne peut dévaluer sa monnaie (sauf à envisager une sortie de la zone euro). Ce défaut peut alors être envisagé comme une restructuration obligatoire des dettes détenues par les investisseurs. Dans ce cas de figure, la Banque centrale européenne (BCE), les banques et les compagnies d’assurance grecques, et les investisseurs étrangers seront traités de la même façon. Nous serons alors face à une forme de soutient implicite de la BCE à la Grèce (ce qui est interdit par les statuts de la Banque centrale). Les institutions financières grecques seraient alors fragilisées, sinon en défaut de paiement. Ce qui devrait se traduire par l’enregistrement de pertes complémentaires à celles déjà enregistrées, du fait d’une réduction des remboursements des dettes (ou de la restructuration de celles-ci).

Les contrats de CDS (assurance crédit) s’enclencheront, et augmenteront encore plus les pertes pour les institutions qui se sont exposées au risque de défaut de la Grèce par ce biais. Cependant, ces contrats pourraient être moins problématiques que plusieurs commentaires ont voulu croire. En effet, les estimations font ressortir une faible exposition nette (en prenant en compte les expositions longues et courtes des différentes institutions), qui se situerait à environ 3 milliards d'euros.

Mais au-delà de ces conséquences, le système monétaire (connu sous le nom d’Eurosystème) pourrait être mis sous pression. En effet, en vertu de ce système les banques centrales des pays membres de la zone euro facilitent les paiements au sein de la zone. Ainsi, lorsqu’une entreprise grecque achète un bien à une entreprise allemande, les banques grecques et allemandes échangent des flux financiers à travers leurs banques centrales respectives. Cependant, lorsque les marchés interbancaires ne fonctionnent plus, les banques centrales « subventionnent » leurs banques nationales. Aux dernières statistiques, la Bundesbank était créditrice vis-à-vis de l’Eurosystem de quelques 500 milliards d'euros, lorsque la Banque nationale de Grèce était débitrice d’une centaine de milliards d’euros.

Un défaut de la Grèce se traduirait par des pertes supplémentaires liées au système de compensation. Nous pouvons même imaginer un effet de désordre dans le règlement de ces faillites (comme nous l’avions connu lors de la faillite de Lehman Brothers) qui se traduirait par une aggravation du Credit Crunch (pénurie de crédit) d’ores et déjà en œuvre (malgré l’impact positif de l’opération du LTRO ou opération de refinancement à long terme de la BCE pour desserrer l’étau autour des banques et de leur liquidité).

Coïncidence des calendriers, la BCE propose un nouveau programme de liquidité le 29 février prochain. Les demandes pourraient se situer entre 250 milliards d'euros et 1 000 milliards d'euros. Le volume de la demande devrait être un indicateur de la peur des institutions bancaires et leurs anticipations de stress scénarii, tels que celui de la faillite de la Grèce.

Les solutions cosmétiques de la BCE ne suffiront pas à long terme

Les opérations de la BCE pourraient reporter l’effet apocalyptique de la faillite désordonnée de la Grèce. Cependant, les pertes devront être reconnues à un moment ou un autre. Elles se traduiront par un scénario de déflation pour les pays fortement endettés, et un scénario d’inflation pour l’Allemagne, qui sera in-fine le payeur des erreurs de la construction de la zone euro.

D’autres solutions peuvent être envisagées, comme une accélération plus importante de l’intégration politique de la zone euro, avec la mise en place d’un crédit relais pour la Grèce, ne serait-ce que le temps de construire la zone euro politique.

Cependant, la confiance des membres de la zone euro dans les hommes politiques grecs s’étiole, et personne ne semble avoir le courage politique de dire aux différents citoyens des pays membres que la sortie de crise ne passe que par un renoncement d’une partie de la souveraineté.

Il a fallu attendre l’erreur de la faillite de Lehman Brothers pour que le Trésor américain fasse le nécessaire pour sauver le système bancaire. Peut être faudra-t-il attendre de faire l’erreur de laisser la Grèce faire faillite pour que les femmes et les hommes politiques de la zone euro prennent enfin conscience de l’ampleur de l’enjeu et des risques.

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