Barack Obama a-t-il vraiment réussi à faire diminuer l'anti-américanisme à travers le monde ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Barack Obama s’était fait remarquer dès 2002, alors qu’il n’était qu’un sénateur peu connu de l’Illinois, par un discours clair et ferme contre la guerre qui se préparait en Irak.
Barack Obama s’était fait remarquer dès 2002, alors qu’il n’était qu’un sénateur peu connu de l’Illinois, par un discours clair et ferme contre la guerre qui se préparait en Irak.
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Redorer le blason

Le président américain a radicalement changé de politique étrangère par rapport à son prédécesseur, George W. Bush. Jacques Portes explique comment cette nouvelle politique, moins interventionniste, a permis de redorer l'image des Etats-Unis à l’étranger, en particulier auprès des pays arabo-musulmans. Extraits de "Obama, vers un deuxième mandat ?" (2/2).

Jacques  Portes

Jacques Portes

Jacques Portes est, depuis 1995, professeur d'histoire de l'Amérique du Nord à l'Université de Paris 8 Vincennes-Saint Denis. Il est agrégé d'histoire (1966), docteur de 3e Cycle (1974) de l'Université de Paris I Panthéon-Sorbonne, et docteur d'État (1987).

Il a notamment publié États-Unis aujourd'hui : les maîtres du monde ? (2003) ; États-Unis : une histoire à deux visages. Une tension créatrice américaine, 2003.

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Restaurer l'image des Etats-Unis

Dans ce domaine, la tâche du nouveau Président paraissait moins ardue, tellement était grand le rejet de George W. Bush dans le monde en raison de ses initiatives lamentables et de ses déclarations méprisantes pour les autres pays.

D’ailleurs, Barack Obama s’était fait remarquer dès 2002, alors qu’il n’était qu’un sénateur peu connu de l’Illinois, par un discours clair et ferme contre la guerre qui se préparait en Irak ; il avait été alors l’un des très rares élus démocrates à montrer une réelle audace sur ce dossier présenté de façon mensongère comme essentiel pour la sécurité nationale. Plus tard, durant la campagne présidentielle, il a indiqué son souci de négociations avec tous les adversaires des États-Unis, sans a priori, tout en prônant un retrait programmé des troupes d’Irak, dont une partie serait envoyée en Afghanistan, car il jugeait que cette guerre avait été très mal menée, alors que son importance devait la rendre prioritaire. (...) Ces annonces avaient été aussitôt critiquées par John McCain comme irréalistes et dangereuses, mais elles avaient contribué à la popularité d’Obama, ce candidat atypique.

En effet, l’élection de Barack Obama a été suivie dans le monde entier avec passion, et cet homme a été investi de tous les espoirs par la jeunesse, par de nombreux intellectuels aux États-Unis, mais également dans la plupart des pays, d’Europe jusqu’au Moyen-Orient et en Asie. (...) Ce succès mondial a été entériné par l’obtention du Prix Nobel de la paix par cet homme qui n’avait pas eu le temps de mettre en pratique ces nobles idées, mais qui représentait une immense promesse. Les jurés du prix ont fait très nettement un pari sur l’avenir, de façon à soutenir le Président dans ses efforts : ce dernier a bien dit, dans son discours de Stockholm, qui n’est pas l’un de ses meilleurs, qu’il ne méritait pas un tel honneur, mais qu’il ferait tout son possible pour en être digne.

Une politique nouvelle

De tels espoirs placés en Obama ne pouvaient pas être tous réalisés, mais ce dernier annonce dans le discours sur l’état de l’Union du 20 janvier 2009 les grands axes de cette politique nouvelle :

« C’est la raison pour laquelle le présent budget étale ses prévisions sur dix ans et tient compte de dépenses qui avaient été omises selon les anciennes règles : pour la première fois, il comprendra le coût intégral de la guerre en Irak et en Afghanistan. Voici sept ans que notre pays est en guerre. Nous n’allons plus en occulter le prix. (...) J’annoncerai prochainement une stratégie pour l’Irak qui rendra ce pays à son peuple et qui mettra fin de façon responsable à cette guerre. »

L’année suivante, l’équipe d’Obama a entrepris de définir ce que serait sa stratégie internationale, en même temps qu’il lui fallait répondre aux impératifs de l’actualité.

Après une dizaine d’années consacrées uniquement à la guerre contre le terrorisme, avec toutes ses dérives, le Président veut élargir considérablement son approche, conscient qu’une force américaine trop largement étendue mine le prestige du pays, et convaincu que les États-Unis n’ont aucun intérêt à agir de manière unilatérale. La puissance militaire américaine reste essentielle pour régler les grands problèmes internationaux, à condition d’être utilisée de manière plus prudente et plus patiente que lors des années précédentes. L’exemple des guerres simultanées d’Irak et d’Afghanistan montre assez le danger des priorités de son prédécesseur.

En réalité, les États-Unis ne sont menacés par aucun autre pays sur le plan militaire, mais l’étendue de leur influence réelle est de plus en plus délicate à définir dans un monde complexe aux équilibres changeants : avec ces éléments diffus et suivant les différents terrains d’action, Washington doit souvent passer par les organisations internationales comme le G 20, où se trouvent les pays émergents, ou comme l’OTAN.

(...)

La nouvelle doctrine américaine écarte nettement la notion de guerre préemptive, mais ne renonce pas à l’utilisation de la force, si nécessaire :

« … nous épuiserons toutes les options avant de se lancer en guerre, et nous pèserons les coûts et bénéfices d’une inaction. Quand ce sera nécessaire, nous chercherons le plus large soutien international. »

Ces grands principes prennent une signification particulière dans le discours prononcé au Caire dès le 4 juin 2009 :

« Notre rencontre survient à un moment de grande tension entre les États-Unis et les musulmans du monde entier (...) Les attentats du 11 septembre 2001, conjugués à la poursuite des actions violentes engagées par ces extrémistes contre des civils, ont amené certains dans mon pays à juger l’islam inévitablement hostile non seulement à l’Amérique et aux pays occidentaux, mais aussi aux droits de l’homme. (...) Je suis venu ici au Caire en quête d’un nouveau départ pour les États-Unis et les musulmans du monde entier, un départ fondé sur l’intérêt mutuel et le respect mutuel, et reposant sur la proposition vraie que l’Amérique et l’islam ne s’excluent pas et qu’ils n’ont pas lieu de se faire concurrence. Bien au contraire, l’Amérique et l’islam se recoupent et se nourrissent de principes communs, à savoir la justice et le progrès, la tolérance et la dignité de chaque être humain. »

Ce discours a été bien reçu dans les milieux éduqués égyptiens, mais dans la plupart des pays arabes, la méfiance reste grande à l’égard de la moindre initiative des États-Unis, et en Israël une certaine inquiétude se fait jour face à un Président beaucoup plus complexe que son prédécesseur.


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Extrait de "Obama, vers un deuxième mandat ?" Éléments de réponse (mai 2012)

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