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Et si les difficultés d’Angela Merkel annonçaient la fin du miracle allemand ?
©REUTERS/Ralph Orlowski

Atlantico Business

Apres l’échec des négociations gouvernementales, l’Allemagne est entrée dans une phase d’incertitude, qui va accroître les fragilités structurelles de son modèle économique.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Angela Merkel n’a donc pas réussi à constituer une coalition gouvernementale avec les libéraux et les verts pour pouvoir continuer à gouverner ce pays qu‘elle conduit depuis maintenant12 ans.

Cela dit, la cohabitation entre la CDU, les libéraux et les écologistes était franchement impossible sauf à ce que les partenaires renient une bonne partie de leurs convictions et de leurs programmes. La négociation a échoué sur la gestion de deux dossiers qui préoccupent les allemands : l'immigration -et plus particulièrement le regroupement familial -et l’environnement.

Sur l’immigration, Angela Merkel estime que l‘Allemagne a besoin d’une immigration importante pour compenser sa faible natalité et le vieillissement de sa population.Leslibéraux sont beaucoup plus réservés, compte tenu du coût que représente l’intégration, et surtout de la difficulté socio-culturelle que cela engendre. Quant à l’environnement, les écolos campent toujours sur des positions très radicales dont la mise œuvre aboutirait à baisser le rythme de croissance et la performance. Ces positions étaient donc irréconciliables, d’où l’échec de la négociation.

Cette situation de blocage est imputable au score très décevant d’Angela Merkel aux dernières élections – près de 33% des voix - et surtout à la décision des dirigeants du SPD de quitter les responsabilités gouvernementales.Les socio-démocrates de Martin Schulz plaident pour une politique économique plus centrée sur la consommation intérieure et sur les investissements plutôt que sur la compétitivité externe. Moins d’export, moins d’effort et plus de redistribution.

Il y avait une alliance naturelle possible entre la CDU, le SPD et éventuellement les écolos.Le SPD avait prévenu dès la campagne qu’ils se mettraient en jachère du pouvoir.

Conséquences : Angela Merkel va donc gérer les affaires courantes en attendant de trouver une solution qui, pour l’instant, n’est pas évidente. Ou bien elle réussit à faire un deal avec le SPD et elle débloque la situation, ou bien elle se résout à accepter de nouvelles élections avec le risque d’ouvrir la porte encore plus grande à l’extrême droite.

Bref, cette situation provisoire pourrait durer assez longtemps, ce qui ne perturbe pas outre-mesure, les observateurs de la classe politique ou du monde des affaires. Les expériences de pays européens qui ont vécu sans gouvernement se sont relativement bien passées.Les Pays-Bas ou la Belgique ont vécu sans majorité claire, ni même de gouvernement, et jamais leur situation économique n’a été aussi florissante.

Ceci étant, en Allemagne, cette période d’incertitude traduit aussi la fragilité du modèle économique qui a fait des miracles depuis 7 ans.La presse allemande est unanime pour reconnaître qu‘après 7 années de croissance ininterrompue, il faut s’interroger sur la durée de ce cycle vertueux.

La croissance allemande, l’activité allemande et le plein emploi sont essentiellement fondés sur les exportations et les investissements. A contrario, la consommation des ménages et de l’Etat reste très basse.Ce qui explique en partie le résultat moyen aux élections pour Angela Merkel.

Alors, ce modèle de croissance a beaucoup apporté aux Allemands de la classe moyenne supérieure, ouvriers qualifiés de l’industrie,ingénieurs. Les projections d’emplois ne sont pas mauvaises. Le « made in Germany », fonctionne très bien au niveau international. Le problème est que certaines difficultés structurelles commencent à apparaître.

La démographie trop faible entraine des tensions sur le marché de l’emploi et un vieillissement de la population, d’où une aggravation des frais généraux et des dépenses sociales.

Les investissements publics insuffisants laissent apparaître un état défectueux de beaucoup d’équipements collectifs, routes, autoroutes et réseau de chemin de fer.

L’environnement apparaît comme une préoccupation croissante.

Enfin, il existe des inégalités flagrantes sur le temps de travail et le traitement des émigrés qui expliquent la montée des mouvements populistes.

Quoi qu’il en soit, la presse allemande de cette semaine considère que la situation politique n’est que le résultat d’un modèle économique qui va nécessiter une révision.

Cette révision de la politique économique vers plus de consommation, plus d’investissement collectifs et sociaux et moins d’exportations ne sera pas pour déplaire aux européens. Ce recentrage ne peut que donner de l’oxygène aux partenaires européens. C’est un peu l’analyse et le pari que faisait Emmanuel Macron.

Pour échapper au populisme, l‘Allemagne comme la France auront besoin de plus d’Europe. 

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