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Entre le Covid, la reprise de l‘économie, celle du nucléaire ou l’abandon du crime d’écocide : rien ne va plus pour les écologistes
©LUDOVIC MARIN / AFP

Atlantico Business

Alors que le gouvernement vient d’annoncer les détails de la phase II du déconfinement, que Bercy renforce le plan de relance, que Macron en vient à défendre le nucléaire et à abandonner le crime pour écocide, tout pousse les écologistes à réclamer des positions radicales.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Les écologistes n’ont qu‘une solution, aller vers la radicalisation au risque de s’enfermer politiquement. Jamais, les militants de l’écologie n’ont été aussi bousculés dans leurs croyances et leurs propositions.

Le Covid les a pris de vitesse avec l’impossibilité de mettre l‘épidémie au passif de la mondialisation. Et depuis qu’on relance les activités pour éviter que les appareils de production ne s’effondrent, on va à l’encontre de leurs programmes qui prônent plutôt une modération de la croissance.

D’autant qu’ils viennent de subir plusieurs revers plus que symboliques, puisque Emmanuel Macron confirme la stratégie du nucléaire en défendant les projets EPR et l’allongement de la durée de vie des centrales classiques, et le gouvernement retire le projet de poursuivre l’écocide comme un crime qui était un éléments clef de la fameuse convention citoyenne pour le climat. Ce ne sera finalement qu’un délit d’écocide.

C’est un revers grave sur le terrain politique parce que les écologistes n’ont aucune réponse alternative pour lutter contre le chômage et l’accroissement des inégalités.

Face à la situation économique, le gouvernement essaie donc de faire redémarrer l’économie tout en contrôlant la circulation du virus, mais il doit aussi faire en sorte que les plans de soutien et de relance répondent à la contrainte écologique. Pas facile. Pas évident. D’où un faisceau d’injonctions contradictoires.

En France, les mouvements écologiques s’inquiètent depuis des mois de savoir si l’après-Covid sera vert, savoir aussi comment on fera pour sécuriser les approvisionnements en électricité, sans pour autant défendre le nucléaire qui va devenir un des chevaux de bataille d’Emmanuel Macron pour des raisons aussi pragmatiques que politiques. Du coup, les courants de l’écologie radicale, eux, s’opposent carrément au plan de soutien.

Cette tension entre les partisans d’un retour à la normale et les écologistes s’explique parce que les militants du climat espéraient profiter du Covid pour arracher des mutations importantes du système.

Et dans l’opinion se forme une tension entre ceux qui prônent la relance coûte que coûte de l’économie et de la production et les partisans d’une lutte plus vigoureuse contre le carbone, au moment où on s’aperçoit justement que les objectifs climat ne sont pas atteints. Au moment aussi où le gouvernement s’interroge pour savoir si la situation sanitaire va permettre un assouplissement du confinement face à des professionnels du tourisme de montagne, dans les stations de ski, des théâtres et des cinémas. Des professions qui font pression pour obtenir la possibilité de travailler...

La pression des écolos s’est renforcée aussi parce qu’avec beaucoup de prudence, on commence à apercevoir le bout du tunnel avec les vaccins qui vont arriver, donc la confiance va revenir, les projets, les initiatives aussi...

Tous les gouvernements, et notamment en Europe, ont massivement soutenu les économies. Ils vont maintenant sortir des plans de relance, fondés essentiellement sur des investissements, c’est à dire qu’on considère que la relance doit aider la reprise d’activité mais surtout accélérer les diverses mutations :

Mutation digitale, mutation de relocalisation industrielle avec le made in France ou le made in Europe,

Mutation écologique vers des énergies renouvelables et des procédés de fabrication décarbonée.

Mutation sociale par le développement des activités de la vie, la santé, la formation.

Pour la France, tout cela va représenter plus de 100 milliards d’euros, dont une partie sera financée par l’Europe.

Cela dit, au-delà de la question financière, le débat très compliqué oppose les économistes soucieux de retrouver une croissance forte, avec des emplois solides et les écologistes inquiets des projets de relance. La compatibilité est difficile à organiser.

Ce qui se passe en Allemagne en témoigne et offre un exemple dont la France doit urgemment s’écarter.

L’Allemagne d’Angela Merkel est une Allemagne qui se vante de faire beaucoup d’investissements verts. Elle en fait beaucoup, il y a des éoliennes partout. Mais comme elle a peu de centrales nucléaires et que le vent des éoliennes ne suffit pas, le soleil non plus, elle a dû rouvrir ses centrales à charbon qui font que l’Allemagne est le pays qui pollue le plus le ciel de l’Europe. Sans compter qu’en période de pointe, l’Allemagne a longtemps acheté de l’électricité nucléaire à la France.

La France, elle, a la chance d’avoir un parc nucléaire qui nous permet de produire plus 70 % de l’électricité à un coût qui est l’un des plus bas d’Europe.

Quand Emmanuel Macron se décide enfin à protéger le nucléaire français et même à le renforcer, c’est bien pour sécuriser le pays au niveau de ses approvisionnements avec une énergie propre, même si les écologistes s’opposent au nucléaire pour des raisons qu'ils ont du mal à expliquer. On est là plus dans l’idéologie que dans une réponse technique.

La question est d’échapper à la contradiction entre l’économie et l’écologie.

Sur le terrain de l’économie, l’urgence est de créer des emplois, de la richesse et des profits pour financer le progrès.

Sur le terrain de l’écologie, l’urgence est de lutter contre le réchauffement climatique mais ça nécessite des couts supplémentaires, donc une baisse de la croissance, une baisse de la consommation. Difficile à vendre à l’opinion qui voudrait bien combattre le réchauffement climatique, mais à condition que ça n’hypothèque pas le standing de vie.

Alors l’Allemagne, l’Espagne, la Grande Bretagne, la France et l’Union européenne ont choisi de flécher un tiers des investissements vers l’économie verte. Ça va représenter en moyenne 30 milliards par pays. C’est évidemment un choix politique.

L‘objectif est historique. Mais il va être compliqué à tenir. Beaucoup de mouvements écologistes très radicaux pensent que l’économie et l’écologie ne sont compatibles que si on change de modèle. Il faut inventer autre chose que le capitalisme financier, la compétition internationale et la course à la compétitivité.

Ces écologistes ont vu dans cette période de confinement un arrêt de la croissance, donc moins de pollution, moins de consommations inutiles. Pour eux, c’était une bonne chose. Sauf que la planète s’est appauvrie et que la misère a envahi des populations entières.

On n’échappera donc pas à une relance de la croissance et des emplois et c’est tant mieux. Mais les courants écologiques vont radicaliser leur ligne, au risque aussi, de radicaliser les 30% de l’opinion qui les suivent.

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