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E-réputation : de la difficulté de se défendre face aux nouveaux monarques du Web
©Reuters

Bonnes feuilles

Sociétés sympathiques, avec des dirigeants jeunes, avenants et zélés, les Google, Amazon, Facebook, Apple, Wikipedia et autre Twitter sont en train de dresser un nouvel ordre des choses qui se révèle insidieux et bouleverse un grand nombre des principes de nos démocraties. Extrait de "Les Nouvelles Superpuissances" (2/2).

Daniel Ichbiah

Daniel Ichbiah

Daniel Ichbiah est écrivain et journaliste, spécialisé dans les jeux vidéo, les nouvelles technologiques, la musique et la production musicale.

Il est l'auteur de nombreux best-sellers tels que La Saga des jeux vidéos, Les 4 vies de Steve Jobs, Rock Vibrations, Le Livre de la Bonne Humeur, Bill Gates et la saga de Microsoft, etc. Daniel Ichbiah a aussi écrit : Qui es-tu ChatGPT ?

Parmi les biographies musicales écrites par l’auteur figurent celles du groupe Téléphone, de Michael Jackson, des Beatles, d’Elvis Presley, de Madonna (il a également publié Les chansons de Madonna), des Rolling Stones, etc. 

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Une poignée d’entreprises privées, une dizaine ou peut-être une vingtaine tout au plus, se sont arrogé des droits d’une ampleur considérable, des droits qui s’exercent bien souvent au détriment des nôtres. Elles ont acquis un pouvoir effectif qui transcende celui de bien des gouvernements actuels.

Il se peut que vous n’ayez jamais remarqué cet aspect des choses, car il est tout à fait possible d’utiliser Google, Amazon, Twitter ou Facebook durant des années, et de ne jamais trouver d’occasion de s’en plaindre.

Le souci se produit dès lors que tout ne se déroule pas comme prévu.

Lorsqu’il s’agit de se défendre contre ces nouveaux monarques, certains se retrouvent parfois avec l’impression de résider au royaume de Lilliput. De lutter contre des moulins à vent. De chercher en vain à obtenir réparation face à des attaques anonymes que ces géants du Net se refusent souvent, par principe, à réparer ou qu’ils ne daignent même pas prendre en compte.

Que faire si, du jour au lendemain, Google se met à nuire à votre réputation ? Si votre recherche d’emploi est contrariée parce que des chasseurs de têtes ont lu des informations désobligeantes à votre égard et les ont prises pour argent comptant ? Si Facebook publie des photographies où vous êtes présent – postées par d’autres internautes – et que vous estimiez avoir le droit de ne pas rendre publiques ? Si Twitter donne la voix à des opinions racistes sous prétexte du respect de la liberté d’information ? Si vous êtes un artiste, que faire si Amazon accueille des commentaires désobligeants sur vos œuvres, commentaires qui semblent dénués de tout fondement ? Si Wikipédia publie, ne serait-ce que pendant plusieurs heures, de fausses informations qui nuisent à la réputation d’une personnalité ou d’une entreprise et qu’il semble alors impossible de les faire rectifier ?

Nul n’existe réellement aujourd’hui sans Internet. Ce sujet de la e-réputation est devenu si crucial que des sociétés de services se sont spécialisées autour de ce thème, et offrent de corriger, s’il en est encore temps, l’image que le Net peut renvoyer à votre égard.

Des sociétés de droit privé stockent et conservent des informations sur l’individu

Le scandale Prism soulevé en juin 2013 par la découverte que Google, Facebook, Yahoo! et six autres géants du Net laisseraient une porte ouverte à la NSA, agence américaine de renseignement, a mis en évidence un fait trop longtemps passé sous silence, et qui remonte d’ores et déjà à une dizaine d’années.

Les interrogations que nous soumettons à Bing, Yahoo! ou autres moteurs de recherche ne sont pas éphémères. Ainsi, Google conserve une trace de toutes ces requêtes de recherche durant une période que ses propres dirigeants peinent à préciser – environ deux ans. Pourtant, ces mêmes dirigeants de Google ne cachent aucunement que, le cas échéant, ces informations seraient mises à la disposition de la justice (voir chapitre 3). Il en va de même pour Facebook, Twitter, Yahoo! et bien d’autres.

La justice ou la police pourrait demander à avoir connaissance de toute l’activité que vous avez eue sur les services de Google ou Yahoo! depuis au moins un an, et ces sociétés seraient contraintes de communiquer ces données.

Bien avant que n’éclate l’affaire Prism, le site Cryptome avait révélé un document montrant que Microsoft était disposée à collaborer avec la justice américaine dans le cadre d’enquêtes criminelles, en permettant l’accès aux données de ses usagers : historique des sites visités, contenu des mails durant soixante jours, commentaires déposés sur les blogs pendant quatre-vingt-dix jours…

Maintenant, posons les questions qui fâchent :

Existe-t-il le moindre avertissement sur la page d’accueil de Google pour nous prévenir que nos requêtes sont ainsi conservées dans leurs ordinateurs ?

Ne serait-il pas honnête de nous prévenir clairement dès l’apparition de la page d’accueil de ces services ?

Plaçons-nous quinze années en arrière. Vous utilisiez votre téléphone en toute quiétude. Imaginons qu’un jour, vous auriez découvert que ces conversations que vous pensiez effectuer en toute innocence étaient enregistrées ? Cela portait alors un nom, et le porte toujours : les écoutes téléphoniques. Vous auriez été scandalisé.

Google, Yahoo!, Microsoft ou Facebook pratiquent aujourd’hui l’équivalent des écoutes téléphoniques quant à votre activité sur le Web, et il est probable que la plupart d’entre vous n’en saviez rien.

Jamais, dans toute l’histoire humaine, autant d’informations n’ont été accumulées sur les individus à leur insu. Le fait incroyable, c’est que, durant plusieurs décennies, des lois ont été votées afin de protéger l’individu vis-à-vis des informations stockées par les entités publiques à son égard. Vous êtes en mesure de demander à connaître les informations inscrites par le gouvernement sur vous-même dans ses fichiers et de les faire corriger.

Disposez-vous de moyens légaux comparables pour contraindre Google ou Facebook à supprimer des informations qu’ils détiennent et publient sur vous ? Pas véritablement : si certaines initiatives sont possibles, elles sont souvent onéreuses et fastidieuses. Il se trouve que ceux qui gèrent ces données résident aux États-Unis…

Extrait de "Les Nouvelles Superpuissances", Daniel Ichbiah, (First Editions), 2013, 17 euros. Pour acheter ce livre, cliquez ici.

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