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Du Maroc à l’Europe : cette nouvelle tendance migratoire révélée par les derniers chiffres de l’agence Frontex
©Reuters

Crise migratoire

Le 14 août, Frontex publiait les dernières statistiques migratoires, en révélant une hausse des traversées illégales de frontières par la route ouest de la méditerranée, pour atteindre le chiffre de 2300 personnes pour le mois de juillet, et 11 000 depuis le début de l'année.

Pierre Vermeren

Pierre Vermeren

Pierre Vermeren, historien, est président du Laboratoire d’analyse des ideologies contemporaines (LAIC), et a récemment publié, On a cassé la République, 150 ans d’histoire de la nation, Tallandier, Paris, 2020.

 

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Atlantico : Le 14 août, Frontex publiait les dernières statistiques migratoires, en révélant une hausse des traversées illégales de frontières par la route ouest de la méditerranée, pour atteindre le chiffre de 2300 personnes pour le mois de juillet, et 11 000 depuis le début de l'année. Soit un chiffre dépassant déjà ceux de l'année précédente. Alors que cette route sépare l'Espagne du Maroc, comment expliquer cette hausse des chiffres ? Selon Frontex, le démentèlement de camps en Algérie et au Maroc en seraient la cause principale, s'agit il d'un facteur déterminant ? 

Pierre Vermeren : Il y a beaucoup de causes. La première est l'appel d'air vers l'Europe depuis l'Afrique qui dure maintenant 3 ans. Comme depuis quelques mois, les choses ont l'air plus compliquées en Lybie, Egypte et Tunisie, il y a un report mécanique des migrants vers le Maroc et le détroit de Gibraltar. La deuxième composante est le fait que la situation, dans le nord du Maroc, est très tendue avec le Rif. La police a autre chose à faire que s'occuper des migrations. Les passeurs reprennent donc de l'activité car ils sont moins contrôlés. Peut-être que cette question de démantèlement a un impact, car de toute manière les gens n'ont pas envie de rester en Algérie. Ils veulent rejoindre l'Europe. Ils sont donc forcément obligés d'aller au Maroc. Généralement, quand il y a un tel gonflement des passages, c'est que l'Etat marocain cherche à faire passer un message à la France et à l'Espagne. On sait que la Libye fait actuellement un chantage à l'Europe pour des milliards d'euros d'aides. Le Maroc pourrait faire la même chose en demandant une assistance, car il participe aussi à nos politiques d’immigrations.

Dans quelle mesure faut-il expliquer cette situation par les événements d'Al Houceima (manifestations et heurts dans le rif qui durent depuis plusieurs mois ) ? Dans un article publié par le monde  et intitulé "Arrivée du Maroc d’enfants isolés et toxicomanes : un phénomène inédit à Paris", le quotidien du soir révélait une nouvelle forme de migration en provenance du Maroc. Assiste-t-on au début d'une nouvelle tendance migratoire ? 

C’est sûr que les autorités marocaines qui ont une agitationdans le Rif sur les bras emprisonnement assez peu de gens, mais elles doivent être tentées de lâcher la pression pour qu’un certain nombre de populationw partent vers l’Europe. Un des facteurs de stabilité du Maroc dans les années 1990, c’était le départ de centaines de milliers de migrants vers l’Europe. Depuis 10 ans, ces migrations ont fortement ralenti, et on voit que cela a des conséquences régionales dans le Rif. Evidemment, les autorités sont tentées de relâcher la surveillance. On l’a vu récemment au niveau de l’enclave de Ceuta. Le fait que les marocains soient les premiers tient peut-être du fait que les marocains tentent de se débarrasser des éléments les plus incontrôlables et perturbateurs. C’est aussi une manière de lancer un message à l’Europe - dont l’Espagne - en demandant de l’aide. Si il n’était pas très fermement contrôlé par les autorités marocaines, le détroit de Gibraltar serait comme le détroit de Sicile. Le contrôle migratoire assuré par le Maroc permet le verrouillage. Mais évidemment c’est un verrouillage purement politique et sécuritaire, car la pression est intacte en faveur des départs.

Cette situation nécessite t elle une réaction particulière de la part de Paris ? Quels sont les enjeux politiques entre les deux pays sur cette question, après le quinquennat "difficile" de François Hollande sans sa relation avec le Maroc ?

A ce niveau-là, ce n’est pas seulement une question de politique française, mais de politique européenne. La pression s’exerce aussi bien sur l’Espagne que sur les pays du Bénélux. Evidemment que les autorités françaises par leur proximité avec le Maroc, peuvent faire pression sur les autorités et négocier des aides auprès de l’Union Européenne. Mais cela est une question principalement européenne. D’où le fait que ce soit Frontex qui publie ces statistiques, et non la France.

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