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Le gouvernement a décidé de ne pas réintégrer les soignants non-vaccinés face à l'épidémie de Covid-19.
Le gouvernement a décidé de ne pas réintégrer les soignants non-vaccinés face à l'épidémie de Covid-19.
©MARTIN BUREAU / AFP

Parole publique

Derrière la non-réintégration des soignants décidée par le gouvernement sur la recommandation des autorités médicales et scientifiques se cache un débat essentiel sur la nature et l’impact de la parole publique. Et de ses ratés…

Christophe Boutin

Christophe Boutin est un politologue français et professeur de droit public à l’université de Caen-Normandie, il a notamment publié Les grand discours du XXe siècle (Flammarion 2009) et co-dirigé Le dictionnaire du conservatisme (Cerf 2017), le Le dictionnaire des populismes (Cerf 2019) et Le dictionnaire du progressisme (Seuil 2022). Christophe Boutin est membre de la Fondation du Pont-Neuf. 

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Antoine Flahault

Antoine Flahault

 Antoine Flahault, est médecin, épidémiologiste, professeur de santé publique, directeur de l’Institut de Santé Globale, à la Faculté de Médecine de l’Université de Genève. Il a fondé et dirigé l’Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique (Rennes, France), a été co-directeur du Centre Virchow-Villermé à la Faculté de Médecine de l’Université de Paris, à l’Hôtel-Dieu. Il est membre correspondant de l’Académie Nationale de Médecine. 

 

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Atlantico : Le gouvernement a décidé, sur la recommandation des autorités médicales et scientifiques, de ne pas réintégrer les soignants non-vaccinés. Professeur Flahault, vous vous êtes prononcé pour leur réintégration estimant qu’il n’y avait plus de justification sanitaire à les écarter. Pourquoi ? Est-ce la preuve, selon vous, que les discours sanitaires doivent être capables d’évoluer ? La non-réintégration est-elle donc purement une décision politique ?

Antoine Flahault : Le débat est très vif actuellement en France au sein même de la communauté médicale et scientifique. Il est fondamental que nos sociétés engagent des débats sur ces questions. Les politiques doivent les mener mais les experts et le public aussi. Je vous remercie à ce propos de m’inviter comme vous le faites à m’exprimer à ce sujet.

Au cœur de la pandémie, après deux premières vagues très rudes sans alors aucun recours possible aux vaccins, on était en 2020, des vaccins sont arrivés sur le marché mondial. Ils se sont vite avérés efficaces et sûrs et les autorités françaises ont décidé l’obligation vaccinale auprès des soignants. C’était en 2021. À l’époque quasiment toute la communauté scientifique était unanime en France pour soutenir l’obligation vaccinale des soignants et bien sûr la sanction afférente de la suspension professionnelle des réfractaires à cette obligation. L’argument majeur qui devait emporter l’adhésion était la protection altruiste que conférait l’immunité vaccinale pour un soignant envers ses patients, souvent vulnérables vis-à-vis des formes graves de Covid-19, et également la protection pour ses autres collègues. Bien sûr, obliger les soignants de se vacciner avec un vaccin qui les protégerait eux-mêmes contre les complications du Covid-19 était un argument supplémentaire qui acheva d’emporter l’adhésion du plus grand nombre. Parallèlement au déploiement rapide des vaccins, un puissant mouvement antivax allait déferler dans le monde, et un bon nombre des soignants d’abord hésitants à la vaccination, puis ayant finalement décidé de préférer la suspension professionnelle, allait tomber dans les bras de ces mouvements antivax, complotistes et souvent positionnés proches des deux extrêmes de l’échiquier politique. La rupture idéologique allait depuis lors être durablement consommée entre les soignants vaccinés (très largement majoritaires) et les soignants non vaccinés (très fortement minoritaires). Mais à partir de 2022, avec l’arrivée du variant Omicron, trois vagues se sont succédées, infectant puis réinfectant quasiment toute la population, vaccinée ou non, immunisée par des souches précédentes ou non. Omicron allait profondément changer la donne, tant par la moindre sévérité des symptômes occasionnés, mais aussi par l’échappement vaccinal vis-à-vis des contaminations et des transmissions. Heureusement le vaccin allait conserver une forte protection contre les formes graves, les hospitalisations et les décès. Mais une bonne partie du discours ayant justifié pleinement le recours à l’obligation vaccinale des soignants n’allait pas résister à l’arrivée d’Omicron. Puisque les vaccins actuellement disponibles protègent très peu et très mal contre les transmissions, il aurait fallu se tourner vers d’autres modes de prévention plus efficaces, notamment le port du masque FFP2 mais aussi la meilleure ventilation des locaux fermés recevant du public, à commencer par les hôpitaux.

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Plutôt que de reconsidérer une position officielle devenue obsolète et ayant perdu ses fondements scientifiques, et d’avoir à mener de nouveaux combats, celui de l’équipement de tout le personnel en masques FFP2 et surtout celui de l’assainissement de l’air intérieur, qui impliqueraient de facto d’assez lourds investissements dans un pays largement endetté, les pouvoirs publics semblent avoir préféré maintenir aujourd’hui un statu quo peu coûteux, concernant quelques centaines de soignants récalcitrants que peu semblent vouloir plaindre aujourd’hui et qui ne suscitent pas, loin s’en faut, un mouvement de sympathie auprès de l’immense majorité de ceux qui ont suivi les recommandations officielles. La poursuite de l’obligation vaccinale recommandée par la HAS et l’Académie Nationale de Médecine tombe donc à point nommé pour le nouveau gouvernement qui lui permet d’éviter de réintégrer ces soignants sans avoir à présenter d’autres justifications.

Le gouvernement a décidé sur la recommandation des autorités médicales et scientifiques de ne pas réintégrer les soignants non vaccinés. La non-réintégration est-elle purement une décision politique que le gouvernement se refuse de trancher en s’abritant derrière les avis des autorités scientifiques et  médicales ?

Christophe Boutin : En effet, le ministre de la santé, François Braun, a décidé de suivre la proposition de la Haute Autorité de Santé conduisant à ne pas réintégrer les soignants non vaccinés dans les structures médicales. On ne peut parler ici de décision politique, puisqu’elle s’est fondée sur la proposition d’une structure scientifique, et ce après audition de différents médecins pour écouter des avis, soit favorables à la réintégration, soit défavorables à cette dernière. Il y a donc eu débat devant l’autorité scientifique, puis proposition d’une solution au politique, qui a finalement fait son choix en étant ainsi techniquement éclairé, et en ce sens, la procédure suivie semble ici tout à fait légitime.

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Mais si on ne peut parler de choix « purement politique », le Quotidien du médecin a publié les avis de cinq d’entre eux devant la HAS, et l’on remarque qu’une part des arguments présentés par les scientifiques visaient à savoir si la réintégration de ces soignants non vaccinés permettait ou non de résoudre la crise que connaît notre système de santé. Est-ce un nombre important de personnels, qui pourraient alors soulager la pression pesant sur les structures hospitalières, ou est-il trop faible pour répondre à cette demande – qui est aussi une demande politique, la santé étant au cœur des préoccupations des Français ?

Scientifiquement, la seule vraie question semble être celle de l’éventuelle sur-contamination que causeraient des personnels non vaccinés par rapport aux vaccinés, et la gestion hospitalière en terme de flux de personnel est autre chose. Certes les médecins ont vocation à s’interroger aussi sur les capacités qu’ils ont à mener à bien les missions qui leur sont confiées, mais on fait cette fois une balance entre les risques éventuels de sur-contamination et les avantages de l’augmentation du nombre de soignants qui est de plus en plus politique et de moins en moins scientifique. Où l’on voit que les deux semblent difficilement dissociables.

Dans sa dernière conférence de presse avant sa dissolution, le Conseil scientifique a reconnu avoir été possiblement été instrumentalisé et que les membres du Conseil avaient dû apprendre l’humilité et dire « on ne sait pas ». Est-ce effectivement ce qui a manqué ? La parole publique s'est-elle trop cachée derrière des vérités scientifiques officielles sans réaliser que les discours scientifiques pouvaient eux aussi évoluer ?

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Antoine Flahault : Le Conseil Scientifique a fait un travail de très grande qualité. Son interdisciplinarité et son indépendance ont beaucoup éclairé les décisions publiques. Il est toujours resté dans son rôle, malgré les pressions médiatiques, sociales, économiques et politiques qu’il ne pouvait manquer de subir. Je tire donc mon chapeau à tous ses membres et au premier d’entre eux, son président, le professeur Jean-François Delfraissy. L’Allemagne qui a longtemps fonctionné sans avoir mis en place une telle structure, du temps de la Chancelière Angela Merkel, s’est vue reprocher en interne un manque de transparence dans les prises de décision. Elle s’est depuis calquée sur le modèle français. La Suisse, le Royaume-Uni, les USA et de très nombreux autres pays ont aussi eu recours au même modèle, et ce de façon assez inédite dans l’histoire récente de nos pays. Je participe pour ma part à un conseil scientifique auprès du directeur régional de l’OMS pour l’Europe (sur le Covid-19 et le virus Monkeypox). Le travail de ces instances est rendu complexe par la connaissance scientifique qui évolue rapidement et parfois vient rapidement contredire les connaissances que l’on croyait acquises auparavant. La complexité de la crise rend cependant nécessaire une expertise collective interdisciplinaire, car aucun scientifique seul ne peut espérer apporter un éclairage complet et suffisant pour la recherche de solutions. La tâche des décideurs politiques dans cette crise a été très difficile, puisqu’ils ont eu à prendre des décisions parfois rudement liberticides en temps de paix, au risque de saper des pans entiers de l’économie de leur pays et sans la certitude de l’adhésion de leur population. Le soutien des conseils scientifiques aura été clé à certains moments, ne le sous-estimons pas. Parfois les politiques se sont affranchis de certaines des recommandations scientifiques, faisant face à d’autres éléments contextuels, voire à la lassitude perçue de la population, ou même à leur propre intuition. La sagesse et l’humilité des conseils scientifiques dans ces cas ont consisté à espérer que les écarts entre les décisions et les recommandations ne soient pas trop dommageables, tout en veillant à ne pas, par des déclarations intempestives, saper la confiance du public et des politiques.

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Christophe Boutin : L’humilité manque par essence assez facilement à tout expert, qu’il soit médecin ou juriste... La confrontation d’idées ressemble souvent au choc de volontés, et plus le statut est important et sa mise en jeu possible, moins les compromis semble facile. Mais la question très spécifique qui est posée ici relève aussi et surtout du peu de possibilités offertes aux « sachants » d’admettre les doutes qui peuvent être les leurs. Face en effet à ce qui a été présenté, initialement au moins, et avec raison ou pas, comme une épidémie ressemblant peu ou prou à la grande peste du Moyen Âge ou au choléra du XIXe siècle, dire « on ne sait pas » c’était courir le risque d’une panique générale qui en intensifierait les conséquences néfastes. Ni les politiques, ni les scientifiques, et à plus forte raison peut-être des médecins habitués à ce qu’une partie de leur travail consiste à rassurer leurs patients, ne pouvaient faire facilement un tel choix.

Il importait dès lors de faire des solutions en les présentant comme indispensables face à des certitudes. Le problème est qu’une fois que ces affirmations tranchées lancées, il est très difficile, pour les politiques mais aussi pour les scientifiques, de revenir en arrière, ou, au moins, de revenir en arrière publiquement et brutalement. Entre spécialistes, on s’exprime devant des pairs qui comprennent la difficulté de la tâche, on peut débattre et expliquer rationnellement un revirement, qui sera alors accepté. Mais face a une population qui a peur, et qui à cause de cela veut des certitudes, il est très difficile de faire comprendre la relative versatilité des politiques menées. Il en va en effet de la légitimité de la parole – scientifique ou politique – et de la possibilité d’imposer ses choix futurs avec un minimum de contraintes.

Sur le fond, la science laisse la place au doute comme méthode intellectuelle mais sans tomber dans le relativisme. Comment trouver le bon équilibre dans les discours publics qui doivent faire appel à la science, en particulier dans un contexte de défiance forte vis-à-vis de la parole publique ?

Antoine Flahault : Les politiques publiques se sont fortement appuyées sur la science lors de cette pandémie. Certes avec les écarts éventuels que l’on a évoqués ci-dessus, mais dans l’ensemble des pays démocratiques pas trop populistes, c’est principalement la science qui aura guidé les modalités de riposte à cette pandémie. Les confinements, les couvre-feux, les quarantaines, les contrôles aux frontières, les politiques de testing, la prise en charge médicale des patients, la surveillance épidémiologique et ses indicateurs sanitaires, le port du masque, les vaccins et les traitements, partout, le public aura pu apprécier que les décisions prises respectaient peu ou prou l’avis des scientifiques. La ré-élection du président français, l’échec du précédent président américain, la démission du premier ministre britannique, ont tous participé pour partie à la gestion de cette pandémie.

Christophe Boutin : Ce qui conduit à la défiance face au discours public, ce n’est pas l’humilité, c’est l’arrogance ; ce n’est pas l’erreur, c’est le mensonge. Or, dans cette phase certes très particulière qu’a été, et qu’est encore, la crise sanitaire, la population s’est trouvée en face de décideurs politiques arrogants – dont le meilleur d’entre est aujourd’hui, et ce n’est pas un hasard, porte-parole du gouvernement -, et de mensonges éhontés. Pour prendre ce seul exemple, la question de l’existence, puis de la nécessité des masques a relevé du mensonge, comme celle du maintien de son port dans les espaces ouverts, scientifiquement tranchée bien avant la décision politique de son abandon. Et nous avons déjà un peu oublié aussi les décisions politiques totalement aberrantes de la première crise, des interdictions de se promener seul en pleine nature aux autorisations de sortie que l’on se délivrait à soi-même…

Choisir comme l’a alors fait le gouvernement, une approche maximaliste en termes d’interdictions et de nouvelles obligations, en se refusant à les faire évoluer au rythme des découvertes scientifiques, a pu finalement conduire nombre de nos concitoyens à se demander, à bon droit, s’il ne s’agissait pas de servir ainsi les intérêts d’un pouvoir qui entendait renforcer à un niveau jamais encore atteint le contrôle des populations. Un effet pervers désastreux.

Devant la cour de justice de la République, Jean François Delfraissy a aussi reconnu les mensonges de l’Etat sur les masques. Les ratés de la parole publique passés sont nombreux, y compris et peut-être même surtout dans le domaine médical : que ce soit sur le scandale des opioïdes, des antidépresseurs, ou l’évolution des discours scientifiques qui ont parfois renversé certaines convictions. A quel point est-il important de laisser la place à une remise en cause ?

Antoine Flahault : Les démocraties sont très exigeantes en matière de transparence des décisions et d’honnêteté dans la gestion des deniers publics. Nous avons la chance de ne pas vivre dans des pays fortement corrompus, ou encore où l’expression publique serait bâillonnée. Maintenant, les scientifiques tout comme les décideurs ont une forte responsabilité tant dans leurs prises de parole publique, que dans leurs politiques publiques. Une remise en cause qui devra avoir lieu me semble concerner surtout les scientifiques, les médias et les personnalités politiques qui ont sciemment contribué à égarer une partie de la population, vis-à-vis des traitements efficaces contre le coronavirus, des vaccins ou des masques. Ceux-là devront j’espère un jour répondre de leurs prises de parole publique ou de leurs actes.

Christophe Boutin : On en revient à ce que nous disions auparavant sur la difficulté qu’il y a à faire machine arrière lorsque l’on a pris des décisions en les présentant comme étant absolument indispensables. Comment faire comprendre à une population inquiète que la science ne se résume pas à constater des évidences, mais procède par des recherches qui sont autant de tâtonnements et de doutes ? La décision politique doit entraîner une adhésion, mais quelle adhésion derrière un chef commençant par dire qu’il ne sait pas quelle politique mener ?

Mais les scandales médicaux que vous évoquez sont d’une autre dimension, et relèvent au moins autant de ratées de politiques publiques que de sujétion du pouvoir politique au lobby pharmaceutique. Il est vrai que, dans un monde d’où la souffrance, physique ou psychique, doit être bannie, et où la demande pour l’éviter croît sans cesse, dans un monde où l’assistanat est la règle, et dans un monde où les sources d’angoisses, loin de disparaître, se multiplient, il n’est pas aberrant de voir une idéologie du care et du soft faire le jeu d’intérêts financiers, et les politiques les servir pour complaire à leurs électeurs. Nous sommes ici encore sans doute tous responsables de ce que La Boétie appelait une « servitude volontaire ».

A quel point crédibilité de la parole publique et efficacité sanitaire sont-elles liées ? Avons-nous échoué sur ce terrain ?

Antoine Flahault : Votre journal et beaucoup d’autres médias ont fait de très gros efforts pour produire une communication de qualité vis-à-vis du public. C’est à saluer. On peut certainement toujours faire mieux, faire davantage, mais en l’espèce, de nombreux médias ont fait remarquablement bien leur travail sur le plan de la vulgarisation de concepts scientifiques parfois ardus. Ce n’est pas rien, puisque plusieurs travaux scientifiques ont montré qu’une bonne communication vers le public se classait parmi les tout premiers instruments de lutte efficace contre la pandémie. Ce qui est plus préoccupant c’est la désinformation, associée à une violence parfois inouïe des désinformateurs au sein de cercles complotistes et extrémistes. Les réseaux sociaux n’ont pas suffisamment fait leur travail de régulation ici, laissant ces individus, dans un anonymat regrettable, insulter, menacer parfois de mort, et harceler les scientifiques de bonne foi sans quasiment aucune sanction, ni même exclusion. C’est insupportable et inacceptable. Pour prendre un exemple récent qui m’est arrivé personnellement, en écrivant un tweet pour promouvoir la vaccination des enfants contre le Covid-19, dont je rappelle qu’elle est homologuée désormais par l’Agence Européenne des Médicaments, soutenue par la HAS, j’ai reçu un torrent d’insultes, d’injures, de grossièretés et de menaces par des couards anonymes et grotesques. Ils répandent toujours leur fiel sur Twitter qui ne les exclut pas dans la plupart des cas.

Christophe Boutin : Il est évident que toute politique se juge sur ses résultats, et que, notre politique publique ayant été, ces dernières années, très largement impactée par la crise sanitaire, le résultat de la gestion de cette crise pèse sur la crédibilité de la parole publique. Il ne m’appartient pas de dire si nous avons échoué ou non sur la gestion de la crise sanitaire : je ne suis pas scientifique. Sur le plan politique, il me semble, nous l’avons dit, qu’il y a eu des erreurs de commises. Étaient-elles inévitables dans une situation d’urgence ? Une partie d’entre elles très certainement, toutes sans doute pas.

Pour autant, les Français tiennent-ils réellement rigueur au gouvernement de sa gestion de la crise sanitaire ? Cela ne semble pas être le cas, si l’on en croit du moins les sondages. Le regard de la majorité des Français quant aux politiques menées lors de la crise sanitaire reste en effet majoritairement favorable aux mesures prises, et on peut donc considérer que la légitimité de la parole politique, ici appuyée sur celle de la parole scientifique, aura été peu remise en cause.

Par contre, la manière dont ont pu être présentées des mesures clairement attentatoires aux libertés individuelles, leur développement en ramifications infinies, ou la manière dont on aura tenté de les pérenniser, tout cela interroge aussi des Français de plus en plus nombreux. Le passage dans le quotidien d’éléments conçus pour résoudre des crises majeures, la notion d’urgence vidée de son sens, la mise à l’écart des structures de contrôle, le pouvoir agissant en comités opaques et restreints, la volonté d’imposer par des contraintes, y compris déguisées en incitations, des règles drastiques mais qui, en plus, ne seront pas respectées à l’identique sur l’ensemble du territoire, tout cela, qui ne relève bien que du politique, demande en effet à être réévalué. La meilleure preuve en aura été le premier vote de l’Assemblée nationale dans sa nouvelle composition, et son refus de prolonger encore le passe sanitaire, jugé si choquant par une Élisabeth Borne sans doute trop habituée à la toute-puissance des états d’exception.

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