Dominique Paillé : "Nicolas Sarkozy aime diviser et ne cesse de le faire"<!-- --> | Atlantico.fr
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Que Nicolas Sarkozy revienne en 2017 ? "Impossible" selon Dominique Paillé, son ancien conseiller politique à l'Elysée.
Que Nicolas Sarkozy revienne en 2017 ? "Impossible" selon Dominique Paillé, son ancien conseiller politique à l'Elysée.
©Reuters

Pour mieux régner

Dans son livre, "Retour perdant", l'ancien porte-parole de l'UMP Dominique Paillé dresse un bilan sombre du quinquennat de Nicolas Sarkozy. Pour lui, un retour gagnant de l'ancien président est tout simplement impossible.

Dominique Paillé

Dominique Paillé

Dominique Paillé est avocat au Barreau de Paris. Député Honoraire. 

 
 
Né le 28 mai 1956 à les Aubiers (79) France, il débute sa carrière professionnelle comme haut fonctionnaire hospitalier. Diplômé de sciences politiques (Paris) et titulaire d’un doctorat de l’université de Paris IX Dauphine, il devient directeur d’hôpital à sa sortie de l’Ecole Nationale de la Santé Publique (1981). Il occupe ces fonctions à Paris (hôpital Boucicaut puis Hôtel Dieu) de 1981 à 1988, tout en assurant en parallèle le Secrétariat Général de son syndicat professionnel (SNCH). 
 
En 1988, il entame une carrière politique d’abord au sein de l’UDF et du Parti Radical puis lors de la fusion avec le RPR à l’UMP. 
 
Cette carrière politique sera menée à la fois à travers des mandats électifs et des responsabilités partisanes :
 
-Maire de Nueil les Aubiers (1988-2002), il est élu député des Deux-Sèvres en 1933, et régulièrement réélu jusqu’en juin 2007.
 
-Secrétaire Général du Groupe union du Centre à l’Assemblée nationale (1889-1993),
Délégué général de l’UDF (1995-2002), Secrétaire Général Adjoint et porte-parole de l’UMP (2007-2010).
 
A cette même époque, il est conseiller politique du Président de la République, Nicolas Sarkozy pour s'occuper notamment des questions relatives aux français établis à l’étranger et à la coopération avec l’Afrique. 
 
Il abandonne en 2011 toute activité politique active pour se consacrer à la création et au développement de son Cabinet d’avocat au barreau de Paris. Il accepte néanmoins à cette époque, compte tenu de sa connaissance approfondie de l’Afrique et du Moyen-Orient la présidence de L’office Français d’Immigration et d’Intégration (OFII) pour un an (2012).
 
Il est également l’auteur de plusieurs ouvrages : Panique à l’Elysée (Grasset, 2012), Nicolas Sarkozy, retour perdant (Archipel, 2013), les Deux-Sèvres, l’autre pays du vin (Geste Editions, 2006), le service de santé des armées, la face cachées (l’harmattan).
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Atlantico : Dans votre livre, "Retour perdant", vous procédez à l’inventaire du quinquennat de Nicolas Sarkozy, ce que votre ancien camp, dans sa majorité, a toujours refusé de faire. Quel bilan général tirez-vous des cinq années de Nicolas Sarkozy à l’Élysée ?

Dominique Paillé : Le bilan est mitigé dans l'ensemble. Il y a des réussites que je mets en avant comme le Grenelle de l'environnement, la création d'outils pour soutenir l'économie comme le Fonds stratégiques d'investissement, la politique des grands investissements, etc. Il a été remarquable pour traiter la crise financière et pour l'Europe. Son énergie dans le domaine européen nous manque  considérablement aujourd'hui. Je suis plus dubitatif concernant les activités africaines et notamment l'intervention en Lybie.

Mais il y a aussi des réformes au goût d'inachevé comme la réforme des retraites ou la réforme des universités. Pour cette dernière, l'autonomie a été mise en place. En revanche, la sélection à l'entrée a été occultée. Enfin, des promesses n'ont pas été tenues alors qu'elles auraient pu permettre d'avoir un climat social beaucoup plus apaisé ces derniers temps, comme l'union civile pour les couples homosexuels par exemple.

Je dresse en revanche un tableau sombre du comportement de Nicolas Sarkozy. Il a gouverné en cherchant à cliver alors que le président a pour devoir de rassembler.

>>>> Sur le même sujet : L'épine qui piquait le pied de l'UMP : comment Nicolas Sarkozy doit-il jouer son retour pour se transformer en recours pour la droite ?

Vous avez été porte-parole de l'UMP jusqu'en 2011. Pourquoi ne pas avoir formulé vos critiques à cette époque ?

J'accepte volontiers cette critique. J'ai quitté Nicolas Sarkozy peu après le discours de Grenoble (en juillet 2010, ndlr). Il y avait des points que je ne pouvais plus défendre, notamment en matière d'immigration. Je lui ai dit à plusieurs reprises  - peut-être un peu tardivement - que sa gouvernance, faite de divisions, m'était insupportable.

Ce qui m'importe aujourd'hui c'est que l'opposition revienne au pouvoir avec des personnalités et des idées neuves et qu'elle ne gagne pas en 2017 par défaut. Mais il faut faire attention : la droite, et Nicolas Sarkozy le prouve en misant sur la stratégie de l'homme providentiel, parie sur le chaos. Le meilleur moyen pour que le pays relève la tête, ce n'est pas de regarder dans le rétroviseur et d'aller chercher quelqu'un du passé.

>>>> Les bonnes feuilles du livre de Dominique Paillé, "Retour perdant" : Nicolas Sarkozy, quel bilan ? Des réformes en trompe-l'œil au goût d'inachevé

Est-ce un constat personnel ou, la ligne soutenue par l'UDI ? Après tout, votre famille politique vient de s'allier avec François Bayrou, qui a voté pour François Hollande au second tour de la présidentielle…

J'ai écrit cela indépendamment de l'UDI. J'aime beaucoup Nicolas Sarkozy et je pense qu'il a gâché ses chances. En fait, je suis un sarkozsite attristé et déçu. Je m'exprime à titre personnel mais je suis convaincu que l'ensemble des concitoyens qui appartiennent au centre et à la droite modérée, partagent cet avis. D'ailleurs dans l'ensemble, la majorité de Français n'est pas à l'affût de son retour. Et pourquoi ? Parce qu'il n'a pas fait son autocritique.

Les adhérents UMP, en revanche, semblent attendre son retour. Nicolas Sarkozy aurait donc le soutien des militants mais pas des cadres de l'UMP. Est-ce que la droite est en train de se tirer une balle dans le pied en dénigrant à ce point l'ancien président ? D'autant que personne à l'UMP ne semble en mesure de reprendre le flambeau…

Si la droite avait le courage de réaliser un vrai bilan de son passage à l'Élysée, elle aurait pu corriger ce qui a été négatif et regagner en crédibilité auprès des Français. La parodie de bilan que Jean-François Copé a mené, même si le président de l'UMP n'en est pas responsable, a été pitoyable. En politique, il faut avoir le courage d'affronter son passé. Je cherche à ce qu'on épure le passé et qu'on le dise clairement. Le problème est que l'attitude de Sarkozy barre la route pour l'émergence d'un nouveau leader de l'UMP.

A qui pensez-vous ?

Il y a le profil rassembleur, comme François Fillon ou Alain Juppé, ou le profil jeune comme Nathalie Kosciusko-Morizet, Xavier Bertrand, Bruno Le Maire ou Laurent Wauquiez… Je cite volontiers des gens de l'UMP mais je peux également évoquer François Bayrou, même si c'est vrai que c'est compliqué pour lui puisqu'il se présente à Pau pour les municipales.

Et si finalement Nicolas Sarkozy avait été réélu en 2012 ?

Il était impossible qu'il remporte cette élection. Les erreurs qu'il a commises, dès le soir de sa victoire, l'ont coupé de la population. La droite et le centre sont majoritaires dans le pays et on se retrouve avec François Hollande et la gauche au pouvoir. Cherchez l'erreur !

Mais la défaite a pourtant été beaucoup moins large que ce que certains laissaient croire….

La défaite est une défaite vaste, comme toutes les autres sous la Vème République. Il avait un adversaire qui a été élu par défaut. Ne refaisons pas l'histoire en l'enjolivant.

Vous le décrivez comme un homme à "la recherche permanente de la provocation et du clivage". La personnalité de Nicolas Sarkozy était-elle en inadéquation avec la fonction de chef de l'État ?

Il s'est comporté et a gouverné d'une manière que je ne veux pas accepter. Le quinquennat oblige à être plus actif et le président est en première ligne. Il y a aussi les nouveaux moyens de communication dont il a abusé et abusé et qui rendent l'actualité extrêmement présente. Il n'empêche que le chef de l'État doit garder une certaine solennité et qu'il ne l'a absolument pas fait.

Encore aujourd'hui, il sort de sa tanière pour donner des leçons, une leçon à l'UMP qui l'a pourtant sauvé après l'invalidation de ses comptes de campagne, une leçon à son ancien Premier ministre qui nourrit pourtant de légitimes ambitions, une leçon aux juges après sont blanchiment, dont je me réjouis, dans l'affaire Bettencourt. Il aime diviser et il continue à le faire.

Propos recueillis par Sylvain Chazot

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