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Déconfinement : faut-il toujours éviter de se serrer la main (et comment savoir qui vous pouvez embrasser) ?
©PETRAS MALUKAS / AFP

Nouvelles mesures

Alors que le déconfinement bat son plein, il est toujours l'heure de se demander si nous devons toujours poursuivre certaines règles de distanciation sociale.

Christophe Daunique

Christophe Daunique

Christophe Daunique est consultant en management, spécialisé dans le secteur public. Il publie régulièrement des articles sur son blog personnel (https://christophe-daunique.medium.com/).

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Atlantico : Avec la nouvelle phase de déconfinement ayant débuté le mercredi 19 mai et avec l’accélération de la campagne vaccinale, faut-il toujours éviter de se serrer la main pour se saluer au travail ou avec ses proches et dans la vie de tous les jours ?

Christophe Daunique : Avant de répondre à cette question et aux suivantes, je voudrais d’abord rappeler que je ne suis ni médecin ni scientifique et que mes réponses s’appuient donc uniquement sur ma compréhension de la crise actuelle au travers de mes différentes lectures. C’est donc bien un citoyen préoccupé ou engagé qui s’exprime.

En l’état actuel des connaissances, il semble que le principal mode de transmission du virus soit celui des aérosols, à savoir des particules émises lors qu’une personne respire, parle ou chante, assimilables à des gouttelettes microscopiques qui contiennent des particules virales, et qui peuvent flotter dans l’air et se disperser. En revanche, je dois reconnaître ne pas être complètement au clair sur la transmission manuportée. Il a été prouvé que le fait de serrer la main contribuait à l’échange de germes entre personnes, et ces germes peuvent ensuite être mis en contact avec les muqueuses (yeux, bouche, nez) car l’être humaine a naturellement tendance à laisser ses mains vagabonder. Cet hier, ne plus serrer la main et les laver beaucoup plus souvent ont probablement contribué à anéantir l’épidémie traditionnelle de gastroentérite. Concernant le SARS-CoV-2, la transmission manuportée n’est pas impossible mais, à mon niveau, je n’ai entendu parlé d’étude montrant de manière catégorique que des personnes avaient été contaminées de cette façon, notamment par une poignée de main. Une manière de le vérifier serait de demander à une personne malade de serrer la main de quelqu’un d’autre et d’observer si cette dernière est contaminée par la suite mais je ne pense pas que ce type d’expérience ait eu lieu, et peut-être d’ailleurs est-il impossible de le mettre en œuvre pour des raisons éthiques.

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Dans le doute, il me semble donc plus prudent pour l’instant de continuer à éviter de serrer la main, notamment au travail où le statut vaccinal des personnes est par définition inconnu. En revanche, si l’on est complètement vacciné et qu’il s’agit de serrer la main d’une connaissance qui l’est également, je pense que le risque est minime puisque même si l’une des deux personnes est porteuse du virus, malgré la vaccination, l’autre ne devrait pas en subir les conséquences puisqu’elle est vaccinée et donc protégée.

Comment savoir qu’il est possible d’embrasser pour faire la bise avec la campagne vaccinale, sans prendre de risques ?  

Concernant la bise, le risque est théoriquement triple :

  • Dépôt de virus sur la joue par contact, mais il faut ensuite que ce virus pénètre une muqueuse ;
  • Postillon au moment de faire la bise ;
  • Concentration d’aérosols près du visage au moment de faire la bise, mais dans un laps de temps très furtif donc cela ne me semble pas comparable à une contamination par aérosols classique.

Je ne suis pas capable de mesurer précisément chacun de ces trois risques mais il est théoriquement non nul. Là encore, dans le doute, il me semble plus prudent de faire comme pour la poignée de main, à savoir ne pas faire faire la bise à des inconnus et la réserver à des proches dont on sait qu’ils sont complètement vaccinés, lorsqu’on est soi-même complètement vacciné.

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Tant que nous ne sommes pas parvenus à une pourcentage suffisamment élevé de personnes complètement vaccinés au sein de la population, il y a théoriquement toujours un risque à revenir aux pratiques traditionnelles en matière de salutation et d’embrassade puisque cela revient de facto à ne plus appliquer une partie des gestes barrières. En attendant de l’atteindre, il me semble plus prudent d’éviter les poignées de main et les bises et de trouver d’autres moyens de saluer comme le « check » de la main ou « fist bump » (toucher le poing fermé de la personne), et à continuer de se laver les mains. En revanche, dans un groupe complètement vacciné, et à condition de l’être également, je ne pense pas qu’il y ait de risques particuliers à revenir aux pratiques traditionnelles, y compris les accolades.

En revanche si un variant contournant fortement la protection vaccinale devait apparaître, il faudrait probablement refaire à nouveau attention, même entre personnes vaccinées.

A la manière du port du masque qui s’est démocratisé dans la société française, allons-nous adopter ces gestes barrières pour une longue période ? Vont-ils durablement et profondément faire évoluer nos rapports aux autres et avec nos proches ?  

J’aurais du mal à prédire la tendance mais je dois dire que je suis sincèrement fasciné par la transformation anthropologique en cours. Les sociétés européennes étaient globalement caractérisées par un niveau de proximité physique beaucoup plus important entre les personnes, notamment par rapport aux sociétés asiatiques. La crise sanitaire a mis un coup de frein brutal à cela. Je ne pensais pas voir de mon vivant la suspension de la poignée de main ou de la bise en Europe et cela s’est pourtant fait très rapidement. 

Ceci étant dit, y a-t-il un intérêt à conserver ces gestes barrières ? La réponse est oui au niveau sanitaire car cela contribue indéniablement à limiter la circulation des maladies au sein de la population et on peut imaginer anéantir complètement les épidémies annuelles de gastroentérite ou de grippe grâce à cela ce qui serait bénéfique pour la société. En revanche, revient-il aux pouvoirs publics de l’imposer ? Je n’en suis pas convaincu. Autant ces mesures me semblent importantes pour le coronavirus qui représente un risque spécifique grave, autant elles ne me paraissent pas justifiées pour les autres maladies. Par ailleurs, cela a implications culturelles fortes notamment pour les sociétés latines où le toucher est un sens important.

De toute manière, au-delà de la volonté étatique, l’évolution des mœurs se fera en fonction des envies de la population et à ce stade, cela me semble très partagé. D’un côté, je constate autour de moi la persistance des pratiques de bise et de poignée de main chez les adolescents et les jeunes adultes qui se sentent probablement moins concernés par le virus. Il suffit de se promener sur les terrasses parisiennes pour le constater. De l’autre, je connais également des personnes qui sont ravies de ne plus avoir à faire la bise à des personnes inconnues et qui se satisfont plutôt de la distanciation physique.

A titre purement personnel, j’aimerais voir ce qui suit :

  • Le maintien d’un niveau de proximité physique plus important en Europe qu’ailleurs car je considère que cela fait partie de la culture européenne ;
  • Le maintien d’un lavage régulier des mains car je considère sur ce point qu’il y avait une vraie lacune en la matière en Europe ;
  • Paradoxalement, le retour à la poignée de main lorsque cette pandémie sera derrière nous car je considère que c’est une manière appréciable de saluer quelqu’un ;
  • Le maintien de la bise mais pour un cercle intime, afin de ne pas l’imposer à des personnes qu’on ne connait pas ;
  • Une attention globale plus forte à son état de santé et notamment à la possibilité de contaminer d’autres personnes, j’espère par exemple qu’une personne avec un rhume carabiné ne viendra plus travailler sur site lorsque le télétravail est possible ;
  • Je ne me prononce pas sur le port du masque, si certains veulent le conserver, je n’y vois pas d’inconvénient mais je ne suis pas convaincu pour autant qu’il faille l’imposer.

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