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De tweet en tweet, Donald Trump est devenu le premier sujet d’incertitude pour la planète...
©SAUL LOEB / AFP

Serial tweeter

Avec un tweet, il est capable de déclarer la guerre commerciale avec la Chine, et huit jours plus tard, par un autre tweet, d’annoncer qu’il n’en sera rien. En attendant, le monde du business doit suivre.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

Il est aussi l'auteur du blog http://www.jeanmarc-sylvestre.com/.

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Donald Trump est sans doute devenu le principal sujet d’incertitudes et d’inquiétudes de la planète. Avec ses tweets, ses affirmations péremptoires, ses contradictions, ses méthodes, ses coups de force et ses hésitations.

La semaine dernière, tout se passe comme s’il avait déclaré la guerre commerciale avec la Chine. Dans la foulée, il fait établir des listes de produits et de services dont l’importation sur le marché américain sera taxée et limitée. Du coup, les chinois répliquent avec une liste de produits et de services américains dont l’accès sur le marché chinois sera plus compliqué.

En moins de 24 heures, le monde des affaires s’affole, la bourse de Wall Street dérape et les électeurs de Donald Trump exultent.

A la fin du week-end dernier, tout change, Donald Trump envoie un tweet d’une toute autre facture puisqu’en quelques lignes, il déclare son estime, son admiration et le respect qu’il a dans le président chinois avec lequel, rappelle-t-il, il est très ami.

Tout rentre dans l’ordre ou presque. Le problème dans ce type de scénario, c’est que le monde des affaires a du mal à retrouver ses marques. Non seulement il considère que la guerre commerciale et la généralisation d’un protectionnisme seraient la pire des choses pour l’équilibre économique. Sans avoir beaucoup de mémoire, ils savent bien que toutes les mesures protectionnistes prises pour répondre ou pour se protéger face à une crise font beaucoup plus de mal à l‘économie que la crise elle-même.

Mais en plus, ils savent aussi que le protectionnisme est compliqué à mettre en œuvre parce que personne n‘y a intérêt. Sauf exception, les chaines de valeur sont tellement fractionnées qu’on a du mal à identifier clairement l’origine d’un produit. Dans un IPhone X de chez Apple, les composants viennent du monde entier. Dans une automobile moderne ou un avion Airbus ou Boeing, plus de la moitié de la valeur vient d’un autre pays que le pays d’origine. On ne peut donc pas substituer un produit à l’autre.

Dans ses conditions, la fermeture des frontières entraine de facto, un blocage du commerce mondial et une chute de la consommation. Alors, on peut se rabattre sur une augmentation de droits de douanes, mais la taxation se retrouve mécaniquement dans le prix à la consommation.

L'autre problème posé par l’exubérance verbale de Donald Trump est qu’il entretient une incertitude permanente qui se traduit par la très grande fébrilité de la bourse. Mais si la bourse varie très rapidement, en amont le monde du business ne suit pas. Il a besoin de certitudes pour étudier un produit nouveau, le développer et appréhender un nouveau marché. Si le monde des affaires est dans le brouillard, il baisse les bras et attend que ça se passe.

Le comportement de Donald Trump est d’autant plus handicapant que beaucoup d’observateurs s’interrogent sur l’évolution de la conjoncture américaine. Les boussoles, là encore, vont un peu dans tous les sens. Trois thèses s’affrontent, ce qui ne facilite pas la prospective.

La première revient à dire que la situation dont Donald Trump a hérité était florissante. Son arrivée n’a pas freiné le mouvement de croissance et d’emplois. Au contraire la promesse de « relance » a donné un nouveau coup de fouet. Et c’est vrai ? La bourse de New York n’a jamais été aussi haute et l’emploi aussi tendu, à tel point que le marché du travail ne trouve son équilibre que dans les hausses de salaires.

Maintenant, à partir de cette situation, deux courants s’affrontent pour évaluer la tendance à moyen terme.

D’abord, il existe un courant de chefs d’entreprises et d‘économistes proches de l’ancienne présidente la FED qui considère que l'économie américaine était déjà en haut de cycle. En clair, on est donc sans doute au bord de la surchauffe, d’où le changement de pied sur la politique monétaire qui avait été amorcé par Madame Janet Yellen. L’ancienne présidente de la FED ne s’était d’ailleurs pas privée de critiquer les mesures de Donald Trump pour rebooster l’économie. Ça n’était pas la peine et la FED a été obligée d’accélérer le redressement de ses taux, pour calmer le jeu et préparer une phase de ralentissement

Par ailleurs, il existe un autre courant de pensée, emmené par le monde de la finance et des banques pour dire que l’Amérique est très loin de la surchauffe inflationniste. Les salaires sont tendus mais pas dans tous les secteurs. Les cycles existent bien sur en économie mais ni leur durée ni leur amplitude ne sont définies à l’avance, on peut donc croire que celui ci va durer. Bref, ce courant-là ne croit pas que les facéties de Donald Trump peuvent dérégler une machine alimentée par la magie. Au contraire. Difficile dans ces conditions d’établir des prévisions.

Ces différents scénarios sont évidemment discutables et Donald Trump fait tout pour qu’ils soient discutés.

Ce qui est éprouvant dans ce jeu, c’est que le modèle Trump cohabite assez bien avec celui de Pékin, au-delà des désaccords verbaux. Ce qui est éprouvant avec le modèle Trump, c’est qu’il partage la planète en deux puissances. L’Amérique et la Chine.

Ce qui est éprouvant dans ce face à face de plus en plus exclusif, c’est qu’il n’y a pas de place pour une Europe qui reste, quoi qu’on dise, très éclatée. Bousculée et en risque d’asphyxie. Le monde moderne risque fort de coincer l’Europe seule entre l‘Amérique et la Chine.

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