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Microsoft n'essaie pas d'imiter Facebook, mais de regrouper ses services
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Web-sociabilité

Après Google, l'autre poids lourd d'Internet, Microsoft, vient de lancer son réseau social So.cl. Imiter Facebook ou Twitter semble voué à l'échec, tant ceux-ci se sont approprié l'espace social du Net. Mais est-ce vraiment le but de Microsoft (et Google avant lui) ?

Jean-Pierre Govekar

Jean-Pierre Govekar

 Jean-Pierre Govekar est consultant en médias sociaux. Co-fondateur de l'agence LeWebLab, qui accompagne les marques dans leur développement sur les réseaux sociaux, l'acquisition des bonnes pratiques du web social et la construction de stratégies social media et éditoriales. 

 

 

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Si la question du retard au démarrage de Microsoft, pourtant acteur majeur du web, est importante à souligner, il convient avant tout de se rappeler du contexte d'apparition des médias sociaux.

Facebook a été lancé en 2004, mais n'a atteint les 100 millions d'utilisateurs qu'en automne 2007, époque où Microsoft achète 1,7% du réseau social. C'est la même année que Twitter fait son apparition remarquée au SXSW, la grande conférence web US.

A l'époque, les leaders du web étaient Google et Microsoft, le premier avec son indexation du web, son offre de messagerie électronique GMail et ses services d'analyse de statistiques et d'achats d'espaces, et le second pour son navigateur web intégré à son système d'exploitation et sa messagerie Hotmail.

Depuis lors, Facebook et Twitter se sont imposés jusqu'à occuper la quasi-totalité du paysage "social" à eux deux. Cette exposition et l'engouement des utilisateurs ont eu pour effet un déplacement des budgets publicitaires, qui sont le moteur de la quasi-totalité des services gratuits en ligne.

Pourquoi ces poids lourds du web n'ont pas saisi l'opportunité naissante des réseaux sociaux, dont l'engouement ne s'est pas tari depuis plusieurs années ? 

Là encore, un retour en arrière s'impose. Les réseaux sociaux généralistes ont mis des années à prendre leur essor. Car leur système repose sur une nécessaire masse critique d'utilisateurs, dont la croissance et les échanges se font de manière exponentielle suivant le principe de Metcalfe.

Les premiers réseaux sociaux à avoir connu un essor étaient les réseaux sociaux spécialisés : professionnels, à l'instar de Viadeo, ou de rencontre, pour Meetic. Principalement parce que leur finalité apparaissait plus évidente et que les utilisateurs s'y reconnaissaient. A contrario, l'aspect fourre-tout des réseaux généralistes a longtemps bloqué les utilisateurs, peu familiers avec la perspective de renseigner des informations personnelles anodines ou privées.

Le grand public a mis un certain temps pour prendre conscience des réseaux sociaux généralistes. En France, c'est Loïc Le Meur, co-organisateur de la conférence LeWeb, dont le premier opus londonien se tiendra ces 19 et 20 juin prochains, qui a fait découvrir Twitter à bon nombre d'utilisateurs de l'industrie du web.

La principale raison expliquant que Google et Microsoft réside dans l'ADN de ces deux géants. Leurs métiers et business-models sont originellement éloignés des médias sociaux.

Mais il faut surtout se rappeler que ces deux acteurs étaient régulièrement sujets à des procès pour abus de position dominante, et que les utilisateurs, législateurs ou journalistes / blogueurs auraient vu d'un mauvais œil le développement de cette nouvelle activité chez ces deux géants du web, notamment en ce qui concerne la collecte de données personnelles.

D'une certaine façon, Facebook puis Twitter ont bénéficié de leur absence d'antécédents, synonyme de neutralité pour les données des utilisateurs. 

Pourquoi Google puis Microsoft ont-ils décidé d'aller sur les réseaux sociaux ?

En premier lieu figure évidemment le poids de Facebook, devenu incontournable avec plus de 900 millions d'utilisateurs revendiqués. Un chiffre impensable au lancement de la plateforme !

Mais on peut lister, parmi les facteurs primordiaux, l'obtention par Facebook de budgets jusqu'alors alloués à la TV ou aux autres médias traditionnels, et le développement d'activités de social shopping.

Contrairement à ce que certains évoquent, l'enjeu pour Google et Microsoft n'est pas de concurrencer Facebook, mais de créer de nouveaux espaces numériques pour les internautes utilisant leurs services.

Google+ se présente comme un réseau social agrégeant l'ensemble des services proposés par la marque. C'est plus un tableau de bord digital permettant le travail collaboratif ou les échanges avec des groupes qu'une plateforme généraliste.

En ciblant pour l'instant les étudiants avec So.cl, Microsoft vise des groupes ou communautés déjà constitués, et s'inscrit dans une logique proche de celle de Google.

Il est d'ailleurs probable que MS s'oriente vers une plateforme agrégeant l'ensemble de ses applicatifs, désormais déportés sur le cloud et accessible via le web sous le nom d'Office Web Apps. Ce serait pour la firme de Mountain View une manière de réitérer sa stratégie des années 80-90, lorsqu'elle proposait des tarifs très préférentiels aux universités, qui formaient les étudiants avec Word et Excel, des logiciels que ces derniers ont continué à utiliser en entreprise.

Comment pousser les utilisateurs à créer un nouveau compte social ?

Sur l'inscription, Google+ propose une identification globale, un ID unique pour tous ses services, simplifiant ainsi l'accès pour l'utilisateur.

So.cl propose également une identification unique pour les détenteurs de comptes Live ou Hotmail, mais a aussi ouvert l'identification aux membres de Facebook, avec lequel sont entretenus des liens étroits (cf. la technologie Skype, acquise par Microsoft, qui est utilisée sur Facebook).

La grosse difficulté pour ces deux nouveaux réseaux réside dans l'impossibilité pour les utilisateurs de transporter leur graphe social avec eux, et il parait peu probable, à moins d'un avantage spécifique, que les utilisateurs déjà inscrits sur Facebook recherchent un nouveau lieu pour interagir avec leur réseau.

Le "+ produit" de Google+, que pourrait aussi proposer So.cl de Microsoft, réside dans l'agrégation de services liés à leur background économique et technologique.

Il est envisageable que ces deux compagnies, extrêmement concurrentes entre elles, visent le marché des réseaux sociaux d'entreprise, et des solutions souples de travail collaboratif qui vont se développer dans les années à venir.

Sur ce domaine, elles seront confrontées à la concurrence d'autres acteurs technologiques, dont notamment IBM Connections.

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