Covid : avoir été contaminé par Omicron ne produit pas d’immunité qui protègerait d’une réinfection<!-- --> | Atlantico.fr
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Avoir été contaminé par le variant Omicron ne produirait pas d’immunité permettant de protéger d’une réinfection.
Avoir été contaminé par le variant Omicron ne produirait pas d’immunité permettant de protéger d’une réinfection.
©BERTRAND-GUAY / AFP

Protection contre la pandémie

Selon une nouvelle étude menée par des scientifiques de l’Imperial College, le fait d’avoir été contaminé par Omicron ne permet pas d'être protégé et de se prémunir contre une réinfection au Covid-19.

Antoine Flahault

Antoine Flahault

 Antoine Flahault, est médecin, épidémiologiste, professeur de santé publique, directeur de l’Institut de Santé Globale, à la Faculté de Médecine de l’Université de Genève. Il a fondé et dirigé l’Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique (Rennes, France), a été co-directeur du Centre Virchow-Villermé à la Faculté de Médecine de l’Université de Paris, à l’Hôtel-Dieu. Il est membre correspondant de l’Académie Nationale de Médecine. 

 

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Atlantico : Une étude publiée dans Science par des scientifiques de l’Imperial College, Immune boosting by B.1.1.529 (Omicron) depends on previous SARS-CoV-2 exposure, semble conclure qu’avoir été contaminé par Omicron ne produit pas d’immunité qui protègerait d’une réinfection. Que nous apprend concrètement cette étude ?

Antoine Flahault : Ce que nous apprend cette remarquable étude conduite par des chercheurs britanniques et publiée dans une grande revue scientifique nord-américaine c’est déjà notre assez pauvre compréhension du système immunitaire. On était persuadé jusqu’à présent que le fait d’être infecté par Omicron lorsque l’on avait été vacciné renforçait notre immunité à médiation cellulaire, portée par les lymphocytes T en particulier, ces petits accumulateurs de notre immunité qui nous protègent contre les formes graves. On avait tendance à considérer qu’ « un Covid tenait pour une dose de vaccin ». Certains certificats vaccinaux intégraient même cette notion. Une personne vaccinée avec deux doses en décembre 2021, faisait en janvier 2022 un Covid avec Omicron, elle obtenait toute fière son certificat « trois doses » nécessaire pour compléter son pass sanitaire ! Or tout cela apparaît remis en cause par cette étude conduite dans une cohorte de personnels de santé britanniques volontaires. La théorie sur les lymphocytes T qui joueraient le rôle d’accumulateurs d’immunité d’origine vaccinale ou infectieuse reste assez vraie pour les variants précédents, la souche originelle de Wuhan, les variants Alpha, Delta, mais est réfutée avec Omicron. A tel point que l’un des auteurs de l’étude, Danny Altmann, professeur d’immunologie à Imperial College à Londres, a qualifié le variant Omicron « d’avion furtif de l’évasion immunitaire », autrement dit il s’agirait d’un virus qui saurait naviguer sous les radars de notre immunité. Pour le reformuler encore autrement, notre système immunitaire serait incapable de se souvenir du passage d’Omicron (et de tous ses sous-variants) dans notre organisme. 

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Est-ce cohérent avec les résultats empiriques et les études réalisées jusqu’à présent ?

Cette étude a été conduite justement pour comprendre le décalage constaté entre les observations empiriques et l’ancienne théorie de l’immunité à médiation cellulaire comme accumulateur de toutes les doses vaccinales et infections naturelles que nous rencontrons. Nous ne savions pas expliquer comment se faisait-il que nous nous contaminions aussi rapidement avec le sous-variant BA.2 d’Omicron après avoir été contaminés par BA.1, puis aujourd’hui avec BA.4 ou BA.5, même dûment vaccinés ? Qu’il y ait un émoussement de l’immunité vaccinale avec le temps, on pouvait le comprendre. Que les vaccins ciblés contre la souche de Wuhan ne soient plus très efficaces sur la transmission des autres souches ayant génétiquement dérivé de la souche mère, cela aussi on pouvait l’entendre. Mais que l’on soit successivement infectés par des sous-variants du même variant, cela ne collait pas avec la protection renforcée que nous étions censés avoir construit avec notre système immunitaire. Il s’agit donc, avec ces travaux, d’une découverte très importante qui nous aidera à comprendre des failles insoupçonnées de nos théories sur l’immunité. 

Ces résultats signifient-ils qu’il faut s’attendre, avec Omicron et ses sous variants, à des recontaminations récurrentes ?

On observe malheureusement de multiples cas de recontaminations récurrentes avec Omicron. Ce variant semble n’ajouter aucune valeur à notre capital d’immunité. Avoir été infecté par Omicron semble ne pas laisser d’héritage immunitaire à notre organisme. Un coup pour rien, pas même l’équivalent d’une dose vaccinale ! C’est probablement une analyse excessive, car les auteurs eux-mêmes ne décrivent pas des trous complets d’immunité laissés par une infection par Omicron, mais ils rapportent chez des adultes actifs en pleine santé par ailleurs, la réponse beaucoup plus faible de leurs cellules immunitaires, celles que j’appelais les accumulateurs d’immunité qui ne se retrouvent donc pas rechargés à bloc comme on pouvait l’attendre, et comme on le constatait d’ailleurs avec les précédents variants du SARS-CoV-2. 

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Être exposé au virus permet-il tout de même de réduire la gravité des symptômes lors de réexpositions ?

Eh bien non, justement, avoir fait un COVID avec Omicron ne renforce pas (ou renforce très peu) notre immunité à médiation cellulaire, celle qui permet de lutter contre les formes graves de la maladie.

Face à ces résultats, la réponse vaccinale est-elle actuellement la seule option ? 

La bonne nouvelle qu’apporte cette étude, c’est que les vaccins du COVID-19 de première génération, c’est-à-dire ceux avec lesquels nous avons tous été vaccinés, restent très efficaces contre les formes graves de l’infection, quels que soient les variants et sous-variants du SARS-CoV-2, Omicron inclus. Cette qualité de réponse immunitaire à médiation cellulaire conférée par le vaccin reste intacte et se voit renforcée par chacune des doses administrée. Bien sûr, comme on l’évoquait plus haut, il faut savoir que l’immunité vaccinale s’émousse avec le temps, l’accumulateur se décharge en quelque sorte. Cette étude nous apprend qu’il ne faudra pas compter sur le passage des vagues d’Omicron pour recharger nos accumulateurs d’immunité et c’est un message important pour les campagnes de revaccination à l’automne. Cela fera longtemps pour certains d’entre nous que nous n’aurons pas reçu de doses de rappel. Or, pour affronter l’hiver, il sera sans doute préférable de prendre les devants et de recevoir de tels rappels, surtout pour les plus à risque d’entre nous. 

La mauvaise nouvelle concerne les vaccins à double valence qui se profilaient pour la rentrée justement. Ceux qui contiennent des souches d’Omicron, en complément de la souche originelle de Wuhan. Eh bien, au vu de cette étude, il ne semble pas qu’il soit intéressant d’envoyer des leurres d’Omicron (sa protéine Spike dans le cas des vaccins à ARN ou à vecteur viral), à notre système immunitaire. Car une fois dans notre organisme, on sait aujourd’hui que ces leurres passeront sous les radars de notre immunité. On cherche toujours de meilleurs vaccins que ceux dont nous disposons. On aimerait des vaccins stérilisants, c’est-à-dire qui permettraient de ne pas être infectés par le coronavirus, ni de le transmettre. On dispose seulement de vaccins qui nous permettent d’éviter les formes graves, c’est l’essentiel certes, mais avec ces récents travaux, on voit que l’on n’est probablement pas encore prêts à voir arriver les grandes innovations que l’on attend dans le domaine de notre protection vaccinale. Du coup, il va peut-être enfin falloir écouter ceux qui recommandent de ne pas fonder la réponse à cette pandémie sur une stratégie exclusive du « tout vaccinal », mais de chercher à combiner la meilleure couverture vaccinale possible à des approches visant par exemple à améliorer la qualité de l’air intérieur, c’est-à-dire à s’attaquer aux sources mêmes de la transmission du virus.

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