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Contre la politique politicienne, la société civile s’organise pour 2017
©Reuters

L'Edito de Jean-Marc Sylvestre

Après les Gracques, les Arvernes, voilà Les éclaireurs. Des groupes de cadres du privé et du public qui s’organisent pour produire des analyses et des réformes capables d’influencer l’évolution de la situation française.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Ces groupes-là ont toujours existé mais ils ont travaillé dans la discrétion et souvent dans l’anonymat. Pour beaucoup de raisons, à cause du devoir de réserve imposé aux hauts fonctionnaires, à cause du blocage du système par les professionnels de la politique. A cause, enfin, de l’importance de la démagogie et du populisme dans le débat public français. Pas question donc, de donner le spectacle d’une élite qui viendrait donner des leçons au peuple et cristalliser encore plus le débat.

En 2007, lors de la campagne présidentielle, ce sont les Gracques qui sont sortis de la pénombre et sont venus perturber, puis  accompagner, la candidature de Ségolène Royal. Classés au centre gauche, les Gracques regroupent des hauts fonctionnaires et quelques cadres dirigeants de grandes entreprises.

Ils ont acquis une grande notoriété par des livres et des articles collectifs, et par conséquent une influence dans les cabinets ministériels. Leur chef est Jean-Pierre Jouyet, ancien ministre de Nicolas Sarkozy puis directeur général de la Caisse des dépôts et aujourd'hui secrétaire général de l’Elysée.

Apres les Gracques, on a vu apparaitre dans la brume de 2012, les Arvernes, un groupe de cadres supérieurs un peu plus jeunes qui n’ont pas accepté la défaite de la droite en 2012. Leur message était fondé sur le pragmatisme d’une droite forte et convaincue que l’économie ne pouvait fonctionner que sur le respect des règles du marché. Dans un système français dominé par un impérialisme intellectuel d’une gauche académique, c’était gonflé.

Aujourd'hui, la gauche est passée de mode. C’est donc plus facile de s’afficher de droite. Voilà qu’apparait sur la scène médiatique et politique le collectif des Eclaireurs. Toujours des cadres du privé (en majorité) et un peu du public qui se sont donnés comme ambition de faire bouger les choses pour que la France puisse affronter la construction européenne, la mondialisation et la concurrence mondiale.

Ces collectifs ont tous une caractéristique, ce sont des purs produits de la technocratie qui considèrent que les technocrates ont plus de capacités et de moyens que les dirigeants politiques pour définir les réformes nécessaires. La démarche est un peu arrogante. Eux expliquent qu’ils sont animés d’une volonté bienveillante.

Leurs ainés en 1929,  issus de Polytechnique pour la plupart, avaient pris le pouvoir sur les élus pour redresser les économies occidentales et avaient appliqué les recettes du Docteur Keynes.

Aujourd'hui, les collectifs n’ont pas l’ambition de prendre le pouvoir. D’abord parce que les problèmes à régler sont nombreux et complexes, ensuite parce qu'il n'y a pas d’économistes vivants comme Keynes l’était à l’époque, porteur d’une solution globale pour sauver le capitalisme et l’économie de marché par les Etats. La mondialisation a dévalué le pouvoir des Etats et de ce fait le pouvoir des politiques. La mondialisation a tué les remèdes keynésiens

Le groupe des éclaireurs est bien décidé à intervenir dans la campagne pour la présidentielle de 2017. Ce qui est intéressant, c’est que les idées qu’ils développent pourraient être portées aussi bien par Macron, Valls que Fillon ou Madelin. Pas d’attitudes ou de propos partisans.

Ils se sont formés autour de cinq idées fortes.

1ere idée: Pas question de s’expatrier parce que la France n’est pas foutue. Elle le sera si ses élites s’en vont. Donc Les éclaireurs restent très présents dans l’exercice de leurs responsabilités sur l’hexagone. Parallèlement et très logiquement, ils recrutent beaucoup parmi le million de Français expatriés à l’étranger. D’abord parce qu'ils ont une expérience qui nous sera très utile. Ensuite, parce qu'ils espèrent que les plus jeunes pourront rentrer à la maison.

2e idée : Pas question de se complaire dans le culte du passé et de ressasser les vieilles recettes des 50 dernières années. Nos éclaireurs ne vont pas lire Zemmour, qui ne sait regarder que dans le rétroviseur. Depuis l’époque bénie où Keynes triomphait, le monde a changé, les frontières sont tombées et la technologie a bouleversé tous les rapports de force. Il faut donc s’adapter à ces évolutions sans pour autant oublier ses racines ou son ADN.

3e idée : La France est porteuse de progrès, d’idées neuves. Le pays a une identité propre parfaitement compatible avec la construction européenne et la mondialisation. Ça veut dire beaucoup de choses en termes d’éducation, de formation ou d’immigration. Mais surtout pas de polémiques inutiles.

4e idée : Depuis la crise de 2008, les facteurs d’évolution, de progrès, de dynamisme économique et d’innovation sociale ont été impulsés plus souvent par les entreprises privées que par l’Etat, les collectivités locales ou les institutions publiques. Il y a une France qui assume les contraintes de la modernité, et une France plus conservatrice qui se tient au chaud dans les arcanes du pouvoir politique et administratif.

5e idée forte : On ne réformera pas ce pays par des textes de loi qui répondent le plus souvent à une urgence politique et qui finalement se perdent dans des débats politiciens. On reformera ce pays à force de pédagogie de l’opinion pour qu'elle pèse sur les élus politiques.

La clé à terme, c’est évidemment de parvenir à changer le fonctionnement politique. Comprendre que l’opposition gauche-droite n’a pas de sens sauf à conforter des citadelles tellement impénétrables qu'elles ont amené les courants à construire des chapelles.

La vie politique française n’a pas d’autre sens que de respecter l’histoire. Pour ce qui est de la performance économique et sociale, mieux vaut s’en remettre aux grandes entreprises et aux institutions internationales.

Le risque dans une telle démarche est évidemment de se déconnecter du peuple. Pour les éclaireurs, le risque existe mais il est beaucoup moins dangereux qu'on ne le croit. Les peuples sont souvent plus formés et conscients des évolutions nécessaires que leurs représentants politiques.

Les élites politiques sont en retard. Ils savent la réalité mais ils estiment que l’opinion ne la sait pas et n’accepterait pas le changement. Ils se trompent. Les opinions publiques sont capables de comprendre les changements nécessaires. Encore faut-il les leur expliquer.

Pour l’heure Les éclaireurs n'ont pas choisi le cheval qui, à droite, portera leur couleur.  

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