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L’égalité du temps de parole est-elle en train d’asphyxier la campagne
de Nicolas Sarkozy ?
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Un problème de timing

Avec l'égalité du temps de parole, le Président n'est plus qu'un candidat parmi d'autres. Sa campagne devient ainsi difficilement audible.

Jérôme Sainte-Marie

Jérôme Sainte-Marie

Jérôme Sainte-Marie est président de la société d'enquête et de conseils PollingVox.

 

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Atlantico : Nicolas Sarkozy reste cantonné en deuxième position des intentions de vote dans différents sondages. Le président-candidat semble peiner à faire entendre ses idées. Peut-on penser qu’il s'agit là des conséquences d’un mauvais timing dans le lancement de sa campagne : le fait d'être entré tardivement en campagne ne lui a-t-il pas laissé un créneau médiatique relativement court avant que la campagne officielle ne lui offre qu'une antenne limitée du fait de l'égalité du temps de parole ?

Jérôme Sainte-Marie : Nicolas Sarkozy a déclaré sa candidature le 15 février dernier. Malgré tout, cette déclaration n’a pas surpris l’opinion. C’est plutôt l’axe de la campagne qui a pu être déroutant. Il divergeait complètement entre la fin janvier et début février. Nous avons eu en réalité le vrai lancement de la campagne tout début février, lorsqu’il s'est lancé sur la notion des valeurs lors de son interview au Figaro Magazine. C’est là qu’il a donné le tempo de ce qui sera pratiquement jusqu’à la fin sa campagne de premier tour : quelque chose de très centré sur l’identité nationale et ses multiples déclinaisons.

Jusqu’à l’émission du 29 janvier, qui est regardée par 16 millions de téléspectateurs sans le moindre effet visible dans les sondages, on est plutôt sur l’idée d’une campagne fondée sur le choc des crédibilités en matière économique et financière. Une ligne qui s’avérera complètement impossible à suivre.

Quels sont les éléments, les moments-clefs, qui ont permis d’influer de manière positive ou négative sur les intentions de vote ?

L’opinion a été positivement marquée par les meetings. Celui de Marseille et celui de Villepinte, les tout premiers de début février, ont produit un véritable effet. Rapidement, on s’aperçoit que la candidature de Nicolas Sarkozy est très dépendante de sa visibilité médiatique. En début de semaine, après des week-ends où il est très visible, il obtient de meilleurs résultats dans les sondages qu’en fin de semaine où l’attention des Français est moins disponible.

Cette sensibilité du vote Sarkozy à la visibilité du candidat devient manifeste et problématique quand on entre dans la période d’égalité des temps de parole. C’est là que se manifeste le vacillement des intentions de vote que l’on constate actuellement.

De fait, quel est l’impact de cette égalité du temps de parole au sein de laquelle Nicolas Sarkozy doit partager de manière équitable l’espace médiatique avec les neuf autres candidats ?

Pour moi, son discours devient difficilement audible pour deux raisons. Il ne dispose plus que d’un dixième du temps de parole des politiques, ce qui est une situation singulière. Il se retrouve à peu près seul contre tous. Il y a une forme de consensus dans la parole publique contre Nicolas Sarkozy. Cela l’isole terriblement.

Le second, c’est qu’il est d’autant moins audible parce qu’il a donné l’impression, à tort ou à raison, de changer d’axe en revenant sur celui de janvier, à savoir la crédibilité face à la crise. Or ce n’est pas là qu’il est le plus convaincant parce qu’il est obligé, pour ce faire, de rappeler à quel point la situation est dramatique. En tant que président sortant, ce n’est pas l’idéal. De plus, ces questions économiques sont compliquées à expliquer aux Français. La perception de la crédibilité des politiques reste en général assez faible. Il cherche à se mettre en position de pédagogue alors qu’il n’y a plus le temps de faire de la pédagogie.

Le changement du ratio de temps de parole dans l’entre deux tours peut-il changer la répartition des intentions de vote ?

Les niveaux de second tour que l’on mesure actuellement son sans doute trop sévères pour Nicolas Sarkozy. Non pas qu’on les mesure mal mais l’état de l’opinion aujourd’hui est très certainement différent de ce qu’il sera entre les deux tours. Ceux qui veulent à tout prix voter, par exemple, pour Marine Le Pen ou François Bayrou refusent pour l’instant l’hypothèse du vote Sarkozy au second tour. La semaine prochaine, ils auront peut-être plus tendance à choisir cette option.

Le caractère en partie abstrait d’une perspective de second tour alors que le premier n’est pas encore passé nuit a priori plus à Nicolas Sarkozy qu’à François Hollande.

L’écart colossal qui est relevé aujourd’hui, qui donne François Hollande vainqueur avec 57% des suffrages contre 43%, peut-il encore être comblé ?

La logique serait qu’il évolue vers un resserrement.

Quelles sont les solutions qui s’offrent encore à Nicolas Sarkozy pour améliorer la situation actuelle ?

Pour y répondre, il faudrait être détenteur de la pierre philosophale ! A priori, il est plus que jamais obligé de miser sur les voix de la droite. Elles sont réduites à moins de 30%. Cela l’oblige à mener une campagne très ancrée dans cette tendance où il est le seul candidat en insistant sur les questions identitaires. Il reprend les stimuli les plus élémentaires de la droite pour retrouver un niveau normal du vote de droite qui est actuellement particulièrement bas dans les intentions de vote au premier tour.

Marine Le Pen a été en début d’année perçue comme une menace importante pour Nicolas Sarkozy. Est-il parvenu à regagner du terrain sur la candidate d’extrême-droite ?

Elle reste dangereuse car ce vote reste en grande partie imprévisible. Sa qualification pour le second tour est cependant devenue beaucoup moins probable, selon les derniers sondages. Il est possible que le vote Le Pen soit sous-estimé, mais sans doute pas au point d’un croisement des courbes.

Les intentions de vote qui se sont détournées de Marine Le Pen se sont redirigées vers Nicolas Sarkozy. La somme de ces deux votes n’a pas évolué. Seule la répartition entre les deux change. Ce cumul avoisine les 40%.

Propos recueillis par Romain Mielcarek

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