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Choisir le bon régime pour lutter contre la dépression
©PHILIPPE HUGUEN / AFP

Pas seulement la crème glacée !

Plusieurs études montrent qu'une alimentation équilibrée participe à entretenir sa bonne santé mentale.

Catherine Grangeard

Catherine Grangeard

Catherine Grangeard est psychanalyste. Elle est l'auteur du livre Comprendre l'obésité chez Albin Michel, et de Obésité, le poids des mots, les maux du poids chez Calmann-Lévy.

Elle est membre du Think Tank ObésitéS, premier groupe de réflexion français sur la question du surpoids. 

Co-auteur du livre "La femme qui voit de l'autre côté du miroir" chez Eyrolles. 

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Atlantico : Quels sont les liens étroits entre un mauvais régime alimentaire et la dépression au sens large du terme ?

Catherine Grangeard : L’influence de la nourriture sur le corps est déjà prouvée. Sur le psychisme, il en est de même. Sur ce premier niveau métabolique, c’est identique pour le corps biologique, bien sûr. Le lien entre soma et psyché n’est plus à démontrer. Donc, un régime alimentaire qui apporte à l’être humain tout ce qui lui est nécessaire, qui ne le surcharge pas, ni ne le dénutrie, est celui qui est le meilleur pour lui, physiquement comme psychiquement.

L’auto-intoxication, c’est ce qui se passe quand on se donne à ingérer des produits, quels qu’ils soient (aliments, boissons, médicaments, drogues, etc.) qui ne sont pas corrects pour la santé.
Le mauvais régime alimentaire, ce sont les produits toxiques qui ont été utilisés par l’agriculture, par la transformation. Les conséquences sur la santé sont minimisées par les lobbies. Et c’est un scandale aussi important que celui du tabac par exemple. Qui peut penser que boire du soda est bon pour le corps ? Qui n’a pas entendu d’émissions, lu de papiers sur la nocivité de la malbouffe ?

Le mauvais régime alimentaire, c’est un régime déséquilibré. Il entraîne des déséquilibres, à plus ou moins long terme. Attention de ne pas apeurer la population ! Ni la culpabiliser.

Le mode de vie a des conséquences sur sa santé mentale : plus on est mal-nourri, à entendre au sens large, pas seulement par son assiette, mais aussi par le milieu dans lequel on vit (qui peut être tout aussi toxique que des nourritures terrestres), si on est mal entouré, si on a un travail épuisant (ou un manque de travail tout aussi stressant), si on a une pauvreté intellectuelle, si… vous voyez tout ceci participe à être ou pas en dépression… Et quand on est en dépression (au sens large) on n’a pas, par définition, vraiment envie de prendre soin de soin. Donc, on a du mal à bien se nourrir (sur tous les plans)… C’est un cercle vicieux.

Une étude menée auprès de 964 personnes, sur une période de plus de six ans, faite par le professeur Laurel J. Cherian aux Etats-Unis tend à démontrer des taux plus faibles de dépression chez les gens qui ont suivi le régime "DASH" par rapport à la population de manière générale. Comment expliquer ces résultats ?

Suivre sur une longue période un régime, un régime sain, forcément mène à de bons résultats !

Manger équilibré et faire attention à soi, durablement, ne peut que faire le plus grand bien !

Il n’y a rien de révolutionnaire dans les constats de cette étude. A l’inverse, je vous renverrai au film « Super size me », où (heureusement pour lui) le réalisateur n’a suivi le régime Mac Do que quelques semaines mais Morgan Spurlock allait quand même très mal, avait pris de nombreux kilos, se sentait mal non seulement physiquement mais aussi psychiquement.

Mais, oui ! l’alimentation est une médecine. Les nutritionnistes, les diététiciennes (ce sont en grande majorité des femmes) aident à manger en fonction de qui on est, de ce que l’on aime et le mode de vie. Bien sûr… on sait, dans les affections graves, les cancers par ex. que l’on aidera la prise en charge avec l’alimentation, le sommeil…

Car on ne peut qu’aider. Tout est toujours plurifactoriel. L’alimentation ne résout pas tout mais y participe.

Ainsi, les dépressions (au sens le plus large du terme et pas uniquement médical) vont s’aggraver si le mode de vie est totalement à côté de la plaque et s’améliorer à l’inverse. MAIS ça ne marche que si les causes de ces dépressions sont également modifiées. Les racines ne peuvent être oubliées et se contenter de l’assiette.

Prenons des exemples si vous voulez ? si ce sont les conditions de vie qui créent la dépression, il est indispensable de modifier ce qui peut l’être et même si c’est compliqué. Je pense à une femme vivant sous l’emprise de son conjoint, subissant des violences verbales permanentes, un rabaissement tout aussi permanent. Elle me disait être passée au bio espérant qu’elle se sentirait mieux… Est-ce bien raisonnable de croire que le bio, à lui seul, aura vraiment un impact miraculeux ? Je vous confie que j’en doutais fortement !Elle avait très envie de se soustraire à sa situation et ne sachant pas comment prendre le problème pensait y arriver en donnant à son corps ce qui allait l’aider de l’intérieur.Par ailleurs en ayant démarré une psychothérapie, cette femme commençait à remettre en cause sa relation tout aussi toxique que sa nourriture. Là, on se dit qu’elle prend vraiment mieux son problème en l’envisageant globalement.

Une alimentation équilibrée ou un régime DASH est-elle pour autant une fin en soi ?

C’est un moyen ; il s’agit de « manger pour vivre et non vivre pour manger ». Les extrêmes attirent toujours les gens les moins à l’aise avec les repères. La modération exige de la jugeotte et de se faire confiance. Nous voyons de plus en plus de gens obsessionnels avec la nourriture. Il y a tant et tant de conseils, de méthodes, et pire d’applis… Tout cela entraîne un sentiment de perdition. Oui, de perdition ! A quel Saint se vouer ? A quel régime, à quel gourou ou expert « vu à la télé » ?

Le processus est le suivant :

  • Des éléments réels : la nourriture proposée est moins saine qu’elle pourrait l’être. L’agriculture utilise trop de pesticides, de produits pour obtenir un rendement conséquent et il s’en suit des aliments qui les contiennent et dont l’intérêt nutritionnel est médiocre. Régulièrement, des tests en magasin montrent que la malheureuse salade à l’étalage est contaminée !
  • Utiliser l’inquiétude et proposer une solution simple, efficace en apparence. Quand on est perdu, ça marche à tous les coups ! Suivez le guide… Le mot « régime » est intéressant. Il est à la fois politique et nutritionnel. Je vous laisse réfléchir aux conséquences des Régimes autoritaires, simplistes…

Pour résister, il suffit d’une logique réfléchie en fait. Ne pas vouloir de solution « clés en mains ». Ni de promesses qui font rêver. L’alimentation équilibrée est moins simple à suivre au long cours qu’un « régime » dicté par la dernière mode. Pourtant, c’est la seule manière d’être au mieux de sa forme.La sienne, à soi, en ce moment… Sans doute qu’en période de soucis, vous irez moins bien que lorsque les nuages dans votre ciel sont rares. Alors, même avec une alimentation top vous serez moins bien qu’en d’autres moments de votre vie. Et c’est normal ! L’essentiel alors est de résoudre les problèmes, de ne pas en rajouter en aggravant la situation à mal vous nourrir MAIS ce n’est pas non plus en ces temps difficiles que vous aurez forcément le temps, l’envie de faire votre marché bio…ET ce n’est pas GRAVE. Rajouter de la culpabilité le serait en revanche.

Tomber dans l’orthorexie est un risque à trop se pencher sur son assiette. Devenir obsessionnel de ce que l’on mange est tout aussi grave que manger/boire n’importe quoi en fonction des promos et des publicités.

Manger équilibré pour être équilibré serait finalement la conclusion qui pourrait donner aux lecteurs une ligne sage et antidépressive !

PS : bien sûr je n’ai rien contre le bio, bien au contraire d’ailleurs. Mais les extrémistes, y compris bio, posent problème. Ils ont une fâcheuse tendance à tout simplifier, à culpabiliser les autres, comme tous ceux qui savent tout pour les autres, qui ne se remettent pas en cause, comme si chacun pouvait prendre soin de soi sans que d’obscures raisons ne s’immiscent dans les choix de vie.

Le sujet vous intéresse ?

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