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Ces terreaux qui conduisent les sociétés au génocide
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Bonnes feuilles

Que ferais-je si... ? Comment moi, jeune ou adulte de 2015, ayant toujours vécu en paix dans un pays démocratique, je réagirais ? La question n'est pas abstraite tant, partout dans le monde, elle est désormais présente. Même dans nos pays démocratiques où racisme, antisémitisme, négationnismes divers, haines multiples de l'Autre prospèrent. Extrait de "Pour résister", sous la réalisation de Alain Chouraqui, directeur de recherche au CNRS (2/2).

Alain  Chouraqui

Alain Chouraqui

Le contenu de cet ouvrage a été réalisé sous l'autorité du Conseil Scientifique de la Fondation du Camp des Milles – Mémoire et Éducation et sous la direction d'Alain CHOURAQUI, directeur de recherche au CNRS.

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Dans toute société, il existe à des degrés divers des tensions permanentes, plus ou moins maîtrisées, que renforcent les frustrations individuelles, la divergence des intérêts et les injustices sociales : parmi elles, les préjugés, le rejet de l’autre, le racisme et l’antisémitisme, la xénophobie, les peurs et angoisses multiples…

À quoi s’ajoutent des comportements psychosociaux très répandus et qui peuvent être dangereux ; parmi eux, la soumission aveugle à l’autorité, la passivité et l’indifférence, l’effet de groupe et le conformisme.

L’image du « terreau » aide à comprendre que le processus pouvant conduire au génocide n’est pas un phénomène émergeant par hasard, ex nihilo, mais qu’il trouve ses racines dans des tensions et des comportements permanents qui vont aussi en nourrir chacune des étapes.

Si les préjugés macèrent et se diffusent longuement dans les sociétés, si les confl its sont inévitables entre les individus et entre les groupes humains, ces diffi cultés demeurent le plus souvent latentes ou se gèrent pacifi quement selon les lois démocratiques. C’est à la faveur de crises que les préjugés s’exacerbent : diffi cultés politiques, économiques ou sociales, crises morales, tensions internationales ou simples faits divers peuvent provoquer des mouvements de rejet fondés sur l’origine des personnes.

La dégradation de la situation économique, avec son corollaire dramatique de chômage et d’insécurité sociale, constitue ainsi un puissant ingrédient de la destruction des liens sociaux. Elle suscite la recherche de coupables, la désignation de « boucs émissaires » à qui l’on fait endosser la responsabilité des dégâts causés par les crises. Elle favorise ainsi les équations simplistes comme celles qui relient sommairement chômage et immigration ou insécurité et étrangers. Elle peut conduire à prêter des intentions ou des actions destructrices à des groupes humains et à valider certains préjugés par des faits isolés et ponctuels que l’on généralise abusivement contre un groupe.

Depuis quelques décennies, en plus des crises, passagères par défi nition, de multiples déstabilisations et changements profonds et durables atteignent de nombreux champs de la société (l’économique, le social, le politique, le religieux…), provoquent des peurs et des pertes de repères collectifs, et accentuent dangereusement les tensions permanentes du terreau.

Les moyens d’information et de communication, en particulier Internet, peuvent aujourd’hui se révéler de redoutables vecteurs de diffusion et de radicalisation des discours de haine. L’emballement raciste ou antisémite se heurte parfois à des résistances mais il peut aussi se trouver facilité par des réactions de relativisation, de banalisation, voire de négation. L’indifférence ou la passivité constituent ainsi deux postures qui laissent le champ libre aux manipulations extrémistes et favorisent la progression des attitudes de rejet et de discrimination.

Extrait de "Pour résister - À l'engrenage des extrémismes, des racismes et de l'antisémitisme", sous la réalisation de Alain Chouraqui, directeur de recherche au CNRS, publié au Cherche-Midi éditeur, 2015. Pour acheter ce livre, cliquez ici.

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