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La reprogrammation cellulaire, technologie utilisée pour augmenter l’espérance de vie et réduire le risque de maladies chroniques.
La reprogrammation cellulaire, technologie utilisée pour augmenter l’espérance de vie et réduire le risque de maladies chroniques.
©FLORENT VERGNES / AFP

Redevenir jeune

Aujourd'hui, un certain nombre de sociétés de biotechnologie et de laboratoires de recherche travaillent sur la reprogrammation cellulaire, des technologies utilisées pour augmenter l’espérance de vie et réduire le risque de maladies chroniques.

Laurent Alexandre

Laurent Alexandre

Chirurgien de formation, également diplômé de Science Po, d'Hec et de l'Ena, Laurent Alexandre a fondé dans les années 1990 le site d’information Doctissimo. Il le revend en 2008 et développe DNA Vision, entreprise spécialisée dans le séquençage ADN. Auteur de La mort de la mort paru en 2011, Laurent Alexandre est un expert des bouleversements que va connaître l'humanité grâce aux progrès de la biotechnologie. 

Vous pouvez suivre Laurent Alexandre sur son compe Twitter : @dr_l_alexandre

 
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Atlantico : Aujourd'hui, un certain nombre de sociétés de biotechnologie et de laboratoires de recherche travaillent sur la reprogrammation cellulaire. De quoi s’agit-il ?

Laurent Alexandre : Ce sont des technologies utilisées pour augmenter l’espérance de vie et réduire le risque de maladies chroniques. Globalement, les principaux investisseurs de ces technologies démiurgiques sont sur la côte Ouest des Etats-Unis et notamment dans la Silicon Valley. Jeff Bezos, avec Altos, Elon Musk avec Neuralink, Calico, filiale de Google ou encore la fondation de Mark Zuckerberg qui veut guérir toutes les maladies d’ici 2099. Il y a des technologies génétiques, épigénétiques et médicamenteuses mais aussi électroniques pour espérer augmenter l’espérance de vie. 

En particulier, certaines technologies cherchent à renverser l’horloge biologique : rajeunir les cellules et donc incidemment de limiter les maladies liées aux dégénérescences des cellules. L’idée est qu’en diminuant le vieillissement des cellules on pourrait limiter les maladies liées à la sénescence. Il y a trois ou quatre voies pour orchestrer ce rétro vieillissement. Le premier, génétique, via la technique du japonais Yamakanaka, le père des cellules souches totipotentes, des cellules souches fabriquées à partir de cellules ordinaires. Par exemple, nos cellules de la peau âgées ne peuvent plus se diviser, ce qui crée les rides. La technique Yamanaka vise à permettre aux cellules de pouvoir à nouveau se diviser en intégrant dans leur ADN 4 gènes de croissance. La deuxième voie est épigénétique, c’est à priori ce que veut faire Altos, c’est-à-dire modifier non pas l’ADN mais les protéines autour de l’ADN et l’ARN qui régule l'ADN, c’est ce qu’on appelle la reprogrammation épigénétique. Certaines méthodes cherchent à modifier le métabolisme des cellules. C’est par exemple la voie de la transfusion de sang jeune chez les personnes âgées. Une stratégie défendue par Peter Thiel notamment. Plusieurs startups essaient de trouver comment remplacer ces transfusions par des injections de protéines présentes dans le sang des jeunes. Cela aurait surtout un avantage éthique, pour éviter d’avoir à prendre du sang aux jeunes pour le donner aux vieux, et de ne pas risquer de transmettre des maladies qu’on n’aurait pas identifiées (cette technique aurait par exemple été une catastrophe aux débuts du SIDA). Il y a enfin des voies plus électroniques visant à limiter le vieillissement cérébral, lutter contre la démence notamment. 

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Où en est la recherche actuellement ?

Ces techniques marchent plutôt bien sur des cellules en éprouvette et sur des petits animaux comme la souris. Mais la physiologie des petits mammifères et la biologie humaine sont différentes. Certains anticancéreux marchent très bien chez les animaux mais pas chez l’homme. C’est la même chose pour le vieillissement.  Il faut donc se méfier des effets d’annonce car tout n’est pas transposable dans l’espèce humaine. Pour l’instant nous n’avons rien trouvé pour l’homme. Donc ce sont des projets de moyen long terme. On peut espérer des avancées entre 2030 et 2050, mais ce n’est pas certain. Et en plus, on ne sait pas quelles seraient les réactions des autorités de tutelle, de la société. Avons-nous envie de payer pour augmenter la vie des vieux ? Aujourd’hui, aux Etats-Unis, où la recherche est la plus avancée au monde, l’espérance de vie baisse. Le principal problème de 2023 n’est donc pas l’immortalité des milliardaires mais cette baisse de l’espérance de vie liée d’une part à la généralisation de l’utilisation des morphiniques comme antalgique – il va falloir que les Américains réapprennent à « souffrir » un peu - et d’autre part l’épidémie d’obésité – renforcée par le fait que c’est devenu quasiment impossible de dire que l’obésité est une maladie mortelle et qu’il est important de maigrir -. Les différences d’espérance de vie ne cessent de se creuser entre la France et les Etats Unis alors que les chiffres étaient presque identiques il y a quelques années.

Comment expliquer les sommes colossales investies ?

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C’est un marché immense. Si d’ici quelques décennies on trouvait le moyen de prolonger durablement l’espérance de vie, le marché pèserait des milliers de milliards de dollars. Et si l’on arrive à diminuer un vieillissement physique, on pourra réduire le vieillissement cérébral et les maladies. C’est pour ça que beaucoup de gens investissent, même si la technologie est immature. L’autre raison est que, si on est extrêmement riche, comme les patrons de la Silicon Valley, l’intérêt n’est pas tant gagner plus d’argent que de vivre plus longtemps. Le fondateur de Google a investi 500 millions de dollars pour la recherche contre Parkinson, après avoir découvert qu’il était porteur d’un variant gènetique qui favorise énormément le risque d’être atteint de cette maladie. 

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