Ces illusions et angles morts du sado-libéralisme macronien<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Economie
Emmanuel Macron lors de sa conférence de presse le 16 janvier 2024.
Emmanuel Macron lors de sa conférence de presse le 16 janvier 2024.
©Ludovic MARIN / AFP

Cuba sans le soleil

Ce que certains décrivent comme une inspiration libérale de la politique économique vantée par le chef de l’Etat lors de sa conférence de presse demeure profondément étatiste et technocrate. L’illusion de l’efficacité du modèle de développement chinois ?

Don Diego De La Vega

Don Diego De La Vega

Don Diego De La Vega est universitaire, spécialiste de l'Union européenne et des questions économiques. Il écrit sous pseudonyme car il ne peut engager l’institution pour laquelle il travaille.

Voir la bio »

Atlantico : Le président de la République a donné sa première conférence de presse depuis 2019 et développé sa vision de l’acte 2 des réformes économiques visant à « libérer les énergies » et à mener la France vers le plein emploi. Beaucoup de commentateurs ont conclu de son discours qu’il assumait un cap clairement libéral. Dans un pays où le périmètre d’intervention de l’Etat ne cesse de se développer, Emmanuel Macron vous paraît-il être un président libéral ?

Don Diego De La Vega : C’est un président libéral à condition d’oublier la prolifération d’interventions publiques souvent capricieuses et aléatoires dans le monde des affaires. C’est un président libéral à condition d’oublier que le libéralisme est fondé sur les sphères et notamment les contre-pouvoirs. C’est un président libéral à condition de ne pas s’intéresser à l’agriculture, à la culture, à la technologie, au transport, à l’énergie, et à l’éducation, ainsi qu’à la santé. C’est un président libéral à condition d’oublier la BPI, la caisse des dépôts et consignations et le plan 2030 avec Bruno Bonnell. C’est un président libéral à condition d’oublier les règlementations, notamment vertes, et à condition de se souvenir qu’il n’a jamais un seul mot sur la politique monétaire et la BCE, ce qui n’est pas très libéral : laisser un pouvoir gigantesque à des gens non élus et pas compétents et ne jamais leur demander des comptes, c’est tout sauf du libéralisme.

Il est libéral si on exclut à peu près tout : la politique économique, sa lecture des institutions, la philosophie sous-jacente, l’interventionnisme sur le moindre petit sujet. Il n’est pas libéral dans sa politique managériale : il fait à peu près tout le travail de ses ministres, avec une extinction totale du Premier ministre. Un président libéral fait son travail et rien que son travail. Il n’est pas libéral manifestement sur le plan économique sinon il respecterait le périmètre de l’Etat : le régalien et une partie de l’Etat social, ce qui est beaucoup. Il n’interviendrait pas de façon capricieuse partout et nulle part avec 25 priorités et très peu de cohérence dans le temps.

Ce qui est malin, c’est d’avoir compris qu’il fallait se présenter comme un libéral sinon quelqu’un appartenant à cette sphère parce que depuis un certain nombre d’année, cela fait tendance, chic, plutôt américain, pro-business. Il a compris qu’il ne devait pas se présenter comme un socialiste « hardcore ». Il est très clair que rien ne le rattache au libéralisme mais les Français ne savent pas ce qu’est le libéralisme. Il prend un certain nombre d’initiatives sado-libérales, qui, il le sait, passeront. C’est un libéralisme d’affichage qui s’avère être l’exact inverse. Il réussit à saper le reste de crédibilité qu’il reste en France du libéralisme tout en ne bougeant pas d’un iota dans le sens libéral. C’est une perversion : c’est comme les gens qui pensent qu’Alain Minc est libéral ou qu’Attali est socialiste. C’est ce qui s’appelle naviguer sous faux pavillon. Le problème c’est qu’à la fin, soit, « pile, les gens ne s’en aperçoivent pas, comme c’est le cas depuis 2017 et les problèmes se succèdent », soit « face, ils s’en aperçoivent alors le roi est nu et cela engendre d’autres problèmes. »

La politique macronienne présente une certaine familiarité avec les conglomérats japonais. Même si cela n’a pas toujours été d’une grande efficience : la politique du convoi, le côté un peu mafieux des groupes japonais ou sud-coréens, cela fonctionne. Et ils existent encore. Le problème en France, est que tout ce à quoi touche l’Etat se passe très mal. Nous voyons les résultats dans l’éducation avec les résultats PISA, dans la santé, la sécurité, l’immigration. C’est tout ce qui relève du régalien, ou du quasi-régalien. Parfois l’état n’agit pas directement mais avec des hommes de l’Etat qu’il place à la tête de différents groupes bancaires ou industriels du pays. Nous voyons ce que donnait Thierry Breton chez Atos, la gestion ORPEA, comme sont gérés les affaires de la BPI et de la caisse des dépôts et consignation. C’est une méthode de gestion plus indirecte. Ce n’est pas du capitalisme, pas même du capitalisme de connivence, c’est très sale et cela ne donne pas de très bons résultats.

Si j’ai utilisé ce qualificatif de conglomérat c’est parce que l’Etat est dans une diversification. Macron n’a pas retenu le principe de « Qui trop embrasse mal étreint » Il ne peut pas s’empêcher de collectionner les interventions. Il y a un empilement logique des actions et des initiatives de l’Etat. Cela donne une impression magmatique, de conglomérat, où l’état est un peu partout. Finalement il est un peu nulle part, ce qui rend très difficile l’évaluation des politiques publiques. Cette hyperactivité de l’Etat rend l’idée de parler d’une économie de marché très délicate : cela va de la transition énergétique, au colmatage de l’Etat providence en passant par les licornes soutenues par Bercy.  Cela montre que l’Etat ne peut s’empêcher d’intervenir tous azimuts, alors que nous n’avons pas le budget des Etats-Unis. Nous n’arrivons pas non plus à atteindre nos objectifs car nous en avons trop. La dispersion des moyens est un saupoudrage. De plus ces objectifs ne sont pas évaluables donc l’Etat ne peut s’améliorer. Cela suscite des questions de lisibilité et de démocratie. Ce sont comme les conglomérats japonais qui étaient très peu transparents. Ils utilisaient une réussite pour justifier dix échecs patents. Cela donnait une impression de traîne. En France c’est un peu le cas.

Vous avez dans le passé évoqué dans les colonnes d’Atlantico une forme de sado-libéralisme des élites françaises, toujours prêtes à lever les protections de l’Etat providence sans pour autant se donner les moyens de consolider un environnement macro-économique favorable à la croissance. Après les milliards des quoiqu’il en coûte et des plans de relance, cela vous paraît-il toujours être le cas aujourd’hui ?

Oui mais à ce sado-libéralisme que j’utilisais pour la BCE mais qui s’applique aussi à Macron, peut s’ajouter le social-clientélisme traditionnel. Il est encore bien ancré dans les collectivités locales, avec la sécurité sociale qui assiste sans restriction et nourrit un rapport à l’Etat pervers. Il y a une volonté d’être affranchi de l’Etat tout en espérant bénéficier d’une prébende ou d’une subvention. A ces deux logiques s’ajoute l’aspect « technophile de bazar » de Macron : comme solutionner les problèmes en créant une vingtaine de licornes. La licorne est la startup française censée être valorisée à 1 milliard d’euro mais qui n’existe pas réellement.  Il ne s’agit pas simplement de développer un terrain favorable pour laisser des acteurs économiques atteindre leur taille critique afin de générer un maximum de marchés, à moyen et long terme. Cela passerait par la formation accrue d’ingénieurs qui savent coder par exemple, un accompagnement, une limitation des impôts les trois premières années pour un certain nombre de startup. Ce n’est pas cela qui est à l’œuvre. Ce qui est à l’œuvre aujourd’hui, c’est le mécano-industriel, un Etat qui se comporte comme un gérant, qui fait du capitalisme sur denier public. Je trouve cela très sale en sachant que ces politiques n’ont jamais connu autre chose en entreprise que certains conseils d’administration. Des politiciens qui ont vendu leur carnet d’adresse de la direction du Trésor Public pour aller chez Rotschild, à 29 ans sans aucune connaissance véritable de ce qu’est le monde de l’entreprise. Dans ces conditions, rares sont les bons résultats. Aucune évaluation, pas de parlementaire pour poser les questions gênantes, pas d’audit véritable des comptes publics. C’est bien souvent réalisé hors-bilan, c’est-à-dire dans des structures considérées comme des investissements d’avenir qui ne sont pas présentées à beaucoup de monde.

Le crony capitalism, le capitalisme des « copains », dit de connivence s’ajoute au social-clientélisme, au sado-libéralisme : il consiste à faire une réforme structurelle pour les autres mais pas à soi-même : quelqu’un qui par exemple a un emploi à vie dans la haute administration, qui décide d’arrêter les indemnisations de ses administrés. Quant à la réforme des retraites, dite la retraite par points, elle a débouché sur une sorte de coup de rabot géant, à savoir une réduction forfaitaire des droits à la retraite. Ce n’est pas vraiment payé par les personnes qui mettent cela en œuvre.

Il faut penser que les réformes du pays font parler mais l’effectivité est douteuse. Le rapport aux vrais problèmes de la France est douteux. C’est la loi du « pile je gagne », « face je gagne » car le personnel politique ne paye pas les conséquences de la réforme. Le français de base comprend bien qu’en disant « nous devons faire les efforts » se transforme en « vous devez faire les efforts », à l’instar du « nous y arriverons d’Angela Merkel concernant l’immigration transformé en « vous y arriverez ». « Faîtes de la place, Taisez-vous » pouvait-elle dire mais Angela Merkel ne vivra jamais à son âge dans un HLM avec les nuisances que cela engendre. Il en va de même pour les réformes à la Alain Minc, Attali, Macron, des réformes de sado-libéralisme qui discréditent le libéralisme. Aux USA par exemple, des réformes ont été effectuées dans les années 80. Elles étaient beaucoup plus profondes : il s’agissait de mettre en œuvre des réglementations du marché dérégulé. En parallèle le Président Reagan a décidé de créer un impôt négatif, sorte de crédit d’impôt pour les personnes ayant de faibles revenus. Cela permettait de lisser le choc de la réforme ou que tout le monde soit gagnant.

Avec Macron, ce sont les gens qui ne votent pas pour lui qui vont le payer cher. Les gens qui votent pour lui, surtout les plus de 70 ans sont déjà à la retraite et pas concernés par les réformes des retraites. Le sado-libéralisme rend les réformes non crédibles aux yeux des français. De plus, elles sont très insuffisantes, peu pertinentes, mal menées dans le temps, dans un manque de coordination avec Francfort, la BCE.

En ajoutant le social-clientélisme et l’interventionnisme capricieux du monde des affaires avec un protectionnisme sous-jacent accru, cela donne un cocktail qui n’est pas libéral, pas efficace et pas juste.

Emmanuel Macron a joué le rôle du monarque républicain et du grand ordonnateur de ce qui se fait en France tout en oubliant à la fois les contraintes extérieures qui pèsent sur le pays comme la nécessité de coordonner ce qui se décide ailleurs en Europe, à Bruxelles comme à Francfort (à la BCE). S’agit-il à vos yeux d’une manière de revendiquer la souveraineté de l’hexagone ou d’une illusion ?

C’est encore une fois de la dispersion et de la diversion. C’est Don Quichotte, une sorte de moulin à paroles qui essaye de faire un programme de réindustrialisation alors qu’a un même moment la BCE orchestre la récession industrielle. La production industrielle recule depuis 20 mois en zone euro depuis avril 2022. Sur un an, la production a reculé de 6.8 %. Ce n’est pas totalement lié au gaz russe. La production industrielle est quasiment « flat ». Cette baisse de production engendre une perte d’emploi industrielle.

De plus, Macron nous explique vouloir réindustrialiser le pays, et relocaliser, alors même que nous n’avons ni l’énergie, ni les compétences. Tandis qu’il donne sa priorité, il passe sous silence la hausse des taux de la BCE. Ces incohérences sont légion.

Il avait dit vouloir arrêter les centrales nucléaires lorsqu’il a nommé Madame Elisabeth Borne. Elle était autrefois la directrice de cabinet de Ségolène Royal à un moment où cette dernière la pressurisait avec une liste de 24 réacteurs à fermer. Maintenant il souhaite ouvrir 6 à 8 réacteurs dans les prochaines années…

Il n’y a pas non plus de cohérence à nommer Pape Ndiaye après Blanquer puis Attal.

Comme Macron n’est pas coordonné avec lui-même, avec les institutions toutes rabaissées et infantilisées : les collectivités locales, le Parlement, pourquoi se coordonnerait-il avec Bruxelles ou Francfort ? Francfort vie sa vie de conglomérat japonisant, Bruxelles vit sa vie à jet continu pour tuer ce qu’il reste de l’économie en zone euro. Macron fait son boulot de son côté sans se soucier de ce qu’il se passe à côté. Il ne fait pas de benchmark, il ne récupère pas les meilleures pratiques. S’il s’y intéresse un jour, il étudiera les cas de la Suisse qui a des chiffres industriels ô combien meilleurs que la France alors qu’elle n’a aucune politique industrielle ni de « Jupiter » à sa tête.

Emmanuel Macron était à Davos hier. Ce pays n’a pas de politique industrielle mais une industrie florissante. Quelles leçons devrions-nous en tirer ?

Cela enseigne la modestie au président de la République. Cela fonctionne selon une approche de bas en haut, « bottom-up » : confiance est faite aux entrepreneurs. Un cadre assez stable leur est donné. Ils ne sont pas accablés de normes et de règlements. L’Etat les laisse se débrouiller. C’est le cas aussi de la Norvège, du Danemark, de la Pologne où comme par hasard il n’y a pas d’euro et s’ils sont l’euro, ils ne respectent pas tellement les normes, notamment celles relevant de la fiscalité. Irlande, Hongrie, Pologne, Norvège, Danemark, Suisse sont quelques exemples de pays où la situation est assez bonne dans différents domaines et notamment sur le plan industriel. Ils sont à part dans le sens où ils n’ont pas d’euro, sinon pas d’Europe sinon ils multiplient les clauses de « coming out » : c’est le fait de garder ce qui est pertinent pour soi comme l’énergie, Schengen. La personnalisation des pays, aussi petits et peu dotés soient-ils, porte beaucoup plus de fruits que se rapprocher du couple franco-allemand avec ses règles. Apparemment, plus les pays s’affranchissent des règles européennes, mieux ils se portent. Macron fait parfois de même mais il reste dans ce cadre du fait de l’euro, des règlementations du Parlement français qui est essentiellement une caisse d’enregistrement et de validation de l’inflation normative de Bruxelles. Il lui reste ensuite un gigantesque ministère de la parole ainsi que quelques deniers publics qu’il arrose de manière non sélective en passant par le Parlement. Il porte un profil de banquier d’affaire-président que l’on retrouve dans d’autres pays. En France, ce comportement est exacerbé car il y’a un saupoudrage de l’argent public.

Au cours de sa conférence de presse, le président a fixé un grand nombre d’objectifs de priorités à son nouveau gouvernement. Peut-on atteindre l’efficacité avec une telle dispersion de l’action publique ? Le président est-il dans son rôle ou dans une sorte d’incapacité à se choisir des priorités ? 

Il est certain que les rares fois où l’Etat met toutes ses forces dans un domaine, la priorité changera six mois plus tard. Les très rares fois où cela dure, ce sont dans des secteurs inutiles comme le plan hydrogène, celui des éoliennes car il nous manque d’abord les énergies pilotables et non pas les non-pilotables. Il nous manque les énergies non-intermittentes. Il faudrait pour cela soit des batteries, soit des énergies totales de type hydrogène ou des barrages. Il aurait fallu anticiper au premier mandat cette stratégie mais Macron est resté dans la continuité d’Hollande. Il faudrait donc mettre les bouchées doubles tandis qu’une bonne partie de l’Europe arrive à solutionner son équation énergétique en apportant discrètement du GNL, du gaz naturel (de schiste) liquéfié, qui est une aberration écologique. Il conviendrait de commercer avec d’autres pays pour assurer notre sécurité énergétique. Aujourd’hui nous ne pouvons plus traiter avec le Qatar, l’Algérie, et discrètement nous approvisionnons des produits avec un impact écologique délétère, en provenance du Texas. Pour éviter cela, il faudrait normaliser le gaz russe mais ce n’est pas la direction qui est prise. Idéalement il faudrait plus de centrales nucléaires pour acquérir une forme de redondance nucléaire que nous n’aurons pas avant 15 ans.

Ce sont des sujets régaliens : c’est une prérogative de l’Etat d’assurer l’autonomie énergétique, même si nous n’avons pas de pétrole. Cette autonomie doit se faire sur l’énergie pilotable. Il en va de même pour l’éducation et la santé.

Comme nous nous dispersons, la justice est embourbée, nous ne maîtrisons plus les frontières, nous perdons la main sur l’énergie. Les missions principales de l’Etat sont alors très mal gérées. Cette dispersion aboutit à la fois à un excès des dépenses publiques, et à des missions régaliennes et un service public à la dérive. Nous perdons sur tous les tableaux car nous jouons sur tous les tableaux. Nous pouvons faire le parallèle avec une tactique militaire : c’est le fait de ne pas aligner tous ses blindés sur la ligne Maginot. Il faut se regrouper en division blindée, composer une phalange macédonienne, se ruer sur l’adversaire pour le neutraliser. En mettant tous ses blindés du Pas-de-Calais à la Suisse, c’est l’adversaire qui risque de nous neutraliser. Il en va de même pour l’action publique.

Celle-ci s’inspire de la formation à l’ENA où il faut être à peu près bon, 14/20 dans toutes les disciplines. Il faut être un peu juriste, économique, historien… En arrivant au pouvoir, le premier réflexe est de donner un peu à la santé, au transport et le dernier qui a parlé a raison et le dernier qui a demandé aura un peu d’argent. Ils savent aussi très bien que s’ils concentrent les efforts, ils feront des mécontents. Le mieux est donc d’abreuver tout le monde pour avoir beaucoup de clients. Personne n’est vraiment satisfait mais cela évite d’avoir des ennemis.

Au-delà, de la gouvernance propre à Emmanuel Macron, vous dénoncez régulièrement la faiblesse des contre-pouvoirs en France. La majorité relative dont dispose le président n’est-elle pas une forme de contre-pouvoir malgré tout ?

La particularité de ce système est d’avoir des contre-pouvoirs afin de contrecarrer les « extrêmes ». Les contre-pouvoirs sont conçus pour contrer Mélenchon ou le Pen, pour contrer par exemple une politique très agressive en matière de nationalisation, sans indemnisation. Maintenant c’est l’hypercentre qui dérive. Finances publiques à vau-l’eau, concentration du pouvoir à l’extrême dans la personne de Macron, il est en état de tropicalisation. Les « Tontons Macoutes » ne sont plus à l’extrême, ils sont énarques. Les gens qui sont en roue libre, qui changent de priorité à tout va, et qui sont instables ne sont plus les gens aux « extrêmes ». En regardant comment a été gérée la crise du Covid, et comment sont gérées les finances publiques, on peut se demander si Mélenchon ou Le Pen n’auraient pas fait mieux ?

Ceux qui doivent remettre à leur place nos élites ne peuvent agir car ils sont trop occupés à surveiller ce qui viendrait de l’extrême gauche ou de l’extrême droite. Mais cela n’arrive pas. Pendant ce temps-là, l’Etat est géré par des gens très raisonnables qui utilisent les deniers publics comme un arrosoir. L’arbitrage relève de la responsabilité du Conseil d’Etat qui pour se faire pardonner de son histoire accablante en autorisant la déportation des juifs, œuvre sans faillir contre les « extrêmes ». Le Conseil Constitutionnel suit un peu le même schéma. Cette pratique de l’Etat se fait finalement en totale impunité, sans évaluation des politiques publiques.

Les politiques au pouvoir sont paniqués à l’idée que le populisme arrive au pouvoir. Eux-mêmes sont devenus extrêmement populistes et complotistes. Ils se disent que s’ils ne font pas du protectionnisme, ce sera encore pire, que les populistes arriveront au pouvoir et ce sera encore pire. Ils sont tellement sûrs de leurs talents, qu’ils essaient d’en faire profiter l’économie française. Pour cela, ils vont créer, subventionner des filières, sauver ORPEA, Atos. Finalement, avec une telle ingérence dans l’économie, il n’y a pas de différence de fond avec les populistes qu’ils disent combattre. Quelque part, en prétendant combattre le populisme, ils pavent la voie pour qu’il advienne. Si l’Etat doit intervenir dans les secteurs autant y’aller franchement et l’assumer.

Cette pratique remonte à leur formation qui leur a donné un tropisme vers la dispersion. Ils n’ont pas compris qu’un Etat libéral était modeste : il y a les trois fonctions régaliennes et l’Etat social. En ajoutant la santé et l’éducation, c’est énorme, mais cela ne leur suffit pas. Si Macron avait été libéral il s’en serait tenu à trois domaines, qu’il aurait budgété pour une période à moyen, long-terme, 5-10 ans.

Israeli disait « la seule mission de l’Etat est de veiller au bien-être social du peuple »

Pourtant, tout a été prioritaire sous leur pouvoir. C’est la ligne Maginot économique permanente, l’absence de colonne vertébrale. C’est à l’inverse de de Gaulle, où il y’avait peut-être trop de colonne vertébrale, l’indépendance nationale à laquelle tout se rapportait : les transports comme l’énergie. Aujourd’hui cette dispersion intempestive passe aux yeux des français. Il y a toujours 25 % des français persuadés que c’est ce qu’il faut faire et que les autres auraient fait pire. L’électorat n’arrive pas percevoir le problème. Ils voient quelque chose de volontariste dans le discours. Ils sont tellement ignorants de ce qu’est le libéralisme qu’ils pensent que cette politique est libérale.

Les élections se gagnent au centre et il est difficile d’admettre que c’est totalement illibéral, qu’il y a beaucoup trop de prise de décisions concentrées en une personne, et que cela ne fonctionne pas. Nous finirons par nous en apercevoir trop tard : quand l’argent et le temps auront été perdu. Contrairement à ce que disait Macron, en 2017, nous n’avions pas 10 ans de retard et en 2027 nous n’aurons pas 10 ans d’avance. Cette communication pour le moins osée a rencontré une grande passivité des français, un manque de rhétorique d’une opposition capable de porter un discours différent.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !