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Ces contrefaçons de produits courants qu'on ne soupçonne pas
©REUTERS/Erik De Castro

Même le café…

La contrefaçon fait moins fréquemment l'objet de l'attention des médias que les principales autres infractions commises en bande organisée. Pourtant elle frappe de plein fouet l’économie, touchant des domaines où on ne l'attend pas. Et peut également avoir des conséquences néfastes pour la santé...

Antoine Chéron

Antoine Chéron

Antoine Chéron est avocat spécialisé en propriété intellectuelle et NTIC, fondateur du cabinet ACBM.

Son site : www.acbm-avocats.com

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  1. Atlantico : Le 3 juillet, les douanes françaises ont saisi 43 tonnes de faux paquets de café de la marque L'Or. Une saisie similaire a eu lieu en Belgique en novembre dernier. Si on connaissait jusqu'ici la contrefaçon des produits de luxe (sacs, parfums,...), la contrefaçon de marque de café semble nouvelle. Y a-t-il d'autres types de contrefaçons qui font moins souvent la une et faut-il les craindre ?

Antoine Chéron : La contrefaçon est moins fréquemment réprimée que les principales autres infractions commises en bande organisée, à savoir le trafic de drogues ou de cigarettes et la prostitution.

Les criminels sont ainsi davantage incités à agir sur le terrain de la contrefaçon et redoublent d’ingéniosité. Ils réalisent notamment des contrefaçons là où les consommateurs et industriels les attendent le moins, comme c’est le cas par exemple pour :

  • Les pièces détachées automobiles
  • Les vélos
  • Les raquettes de tennis
  • Les outils et matériaux de bricolage
  • Les fusibles
  • Les petits pots de bébés alimentaires

  1. Quelle est la particularité des produits concernés ? Des produits de consommation courante, plus faciles à écouler ? Des produits rares mais certifiés pour lesquels la méfiance est moins grande ?

Les contrefacteurs usent de deux stratégies : soit ils fabriquent des produits susceptibles d’être écoulés facilement et dans des volumes importants, comme c’est le cas pour les produits alimentaires (petits pots de bébé), soit ils se concentrent sur des produits à grande valeur ajoutée, comme c’est le cas pour les œuvres d’art.

Dans le cas de la contrefaçon de paquets de café, les contrefacteurs ont adopté la première stratégie, dans la mesure où le consommateur est moins vigilant s’agissant de produits alimentaires, et les ressemblances apparentes entre les produits permettent de fixer des prix similaires aux originaux. Les paquets de café de la marque L’Or présentent la particularité d’être des produits alimentaires de consommation courante de haute qualité, ce qui permet de fidéliser une clientèle spécifique attachée à la marque (pour rappel, la marque L’Or est la première marque de dosettes compatibles Nespresso).

  1. Est-ce aussi une stratégie des contrefacteurs : s'attaquer à des secteurs où on ne les attend pas, pour diminuer les risques d'être démasqués ?

Cette stratégie est courante car l’effet de surprise bénéficie au contrefacteur tant s’agissant des services douaniers que des consommateurs.

En effet, le consommateur est moins méfiant s’agissant des produits alimentaires, pour lesquels il regarde rarement la composition du produit mais s’attache davantage au packaging, ce qui facilite la tâche des contrefacteurs. La plupart des affaires de contrefaçon de produits alimentaires concernent d’ailleurs le packaging : les contrefacteurs reprennent quelques éléments reconnaissables d’une marque alimentaire (logo, couleur…) afin de faire passer un produit bas de gamme pour un produit de qualité supérieure. Dans le cadre des paquets de café contrefaits, les contrefacteurs ont au contraire reproduit à l’identique le packaging pour créer une véritable confusion dans l’esprit du consommateur.

Les services douaniers sont quant à eux davantage formés à débusquer des contrefaçons de produits de luxe (sacs à main, chaussures, vêtements, parfums), c’est pourquoi il est aujourd’hui encore complexe pour eux de saisir des stocks de produits alimentaires contrefaits.

  1. Moins médiatisées, ces contrefaçons sont-elles plus dangereuses ? Et d'autant plus dangereuses qu'elles sont moins bien connues des consommateurs ?

Ces contrefaçons peuvent à plusieurs égards être considérées comme plus dangereuses dans la mesure où elles peuvent avoir des conséquences sur les consommateurs, lesquels ne sont pas informés du fait de l’absence de médiatisation.

S’agissant des produits alimentaires, certains ne sont pas propres à la consommation compte tenu des législations propres à leur pays de destination, qui divergent parfois de celles du pays émetteur. Par exemple, les autorités américaines avaient saisi sur le sol américain du faux dentifrice Colgate en provenance de Chine, lequel contenait un produit chimique toxique utilisé notamment dans l’antigel.

D’autres types de contrefaçons peuvent également avoir des conséquences néfastes. Tel est par exemple le cas des contrefaçons de parfum ou de produits cosmétiques, qui ne sont pas forcément hypoallergéniques, ce qui peut déclencher des réactions plus ou moins graves sur la peau des consommateurs. Il en va de même pour les contrefaçons médicamenteuses, comme c’est le cas des sirops pour la toux.

  1. Si on place du point des vues des acteurs du secteur (industriels, marque,...) et non plus seulement des consommateurs, quel est l'impact économique ? Comment s'en prémunit-on ?

L’impact économique est important pour les acteurs du secteur dans la mesure où leurs investissements sont utilisés par des concurrents sans qu’ils perçoivent une rémunération à ce titre. En effet, en tant que titulaires de droits de propriété intellectuelle sur la marque ou les brevets concernés, ils sont supposés percevoir des redevances pour chaque utilisation de leurs produits qu’ils ont préalablement autorisée. À l’inverse, les contrefacteurs réalisent des économies d’échelle parfois considérables.

Afin de se prémunir des risques de contrefaçon, les producteurs recourent parfois à des campagnes de formation auprès des services douaniers afin que les produits contrefaits aient le moins de chance possible de pénétrer sur le territoire français. Les campagnes de prévention auprès des consommateurs sont également fréquentes afin de pousser ces derniers à davantage de vigilance. Certains producteurs de cigarette, comme c’est le cas de British American Tobacco, procèdent de la sorte en mettant en ligne une page dédiée à la contrefaçon sur leur site internet.

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