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Ce moment (peu connu) où la France a tenté de favoriser la liberté sous l’égide d’un monarque improbable
©LIONEL BONAVENTURE / AFP

Bonnes feuilles

La doxa dominante décrète que le libéralisme, cette doctrine "anglo-saxonne", ne saurait prospérer dans l’Hexagone. Or, non seulement il y a un libéralisme français, mais il connut son heure de gloire sous la monarchie de Juillet. Louis-Philippe est alors au pouvoir et s’entoure d’hommes de grande valeur. Ils sont imprégnés de la pensée d’intellectuels tels que Frédéric Bastiat, Alexis de Tocqueville et Jean-Baptiste Say. Sous leur houlette, la France rattrape une partie du retard économique qu’elle avait accumulé sur l’Angleterre. Extrait du livre "La parenthèse libérale" de Jean-Baptiste Noé, aux éditions Calmann-Levy (1/2).

Jean-Baptiste Noé

Jean-Baptiste Noé

Jean-Baptiste Noé, historien, spécialiste de l’histoire du christianisme. Il est rédacteur dans la revue de géopolitique Conflits. Dernier ouvrage paru Géopolitique du Vatican (PUF), où il analyse l'influence de la diplomatie pontificale et élabore une réflexion sur la notion de puissance.

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C’est un travers de l’histoire que de considérer que toute époque est charnière, à la croisée des mondes et passage entre la modernité et l’ordre ancien. Il est possible de dire cela de toutes les époques et de tous les régimes, puisque l’histoire est en mouvement et que la société progresse. Ce qui est vrai, c’est que les hommes de Juillet sont nés pour la plupart à la fin du xviiie siècle ou au début du xixe  siècle pour les plus jeunes. Beaucoup ont connu l’exil pendant la Révolution, d’autres ont vu leurs parents assassinés et tous ont pris conscience du changement de monde. Ils s’accommodent des nouveautés et ne développent pas de réflexe réactionnaire, contrairement à certains hommes de la Restauration qui rêvent de revenir à une monarchie prérévolutionnaire qu’ils fantasment largement et que certains avaient même combattue. Mais tout en acceptant le changement, ils cherchent à conserver la stabilité de l’ordre ancien et ce qui leur paraît essentiel pour le bon fonctionnement d’une société. Ils ne sont pas tant attachés à la monarchie comme système politique qu’à la France comme porteuse d’une culture et d’une civilisation à protéger et à développer. Raison pour laquelle des hommes de Juillet se sont ensuite retrouvés sur les bancs des républicains. La monarchie de Juillet est donc plus un esprit qu’une doctrine. C’est un certain goût de la liberté couplée à la défense du droit, au respect des personnes, et au souci de contenir l’État.

Défendre la liberté dans un pays épris d’égalité n’est pas chose aisée. Le goût de la servitude volontaire démontré par Étienne de La Boétie au xvie  siècle n’a disparu ni des consciences ni des réflexes politiques. Cette France-là nous paraît bien lointaine aujourd’hui : il n’y a ni électricité ni eau courante, les disettes pointent encore leur nez, il faut plusieurs jours pour rejoindre les grandes villes à cheval et l’économie nous semble bien archaïque. Mais les interrogations, les combats et les transformations témoignent du fait que la France de 1840 n’est plus celle de 1780, que la Révolution est désormais ancrée et que les transformations sociales bouleversent un monde que la Comédie humaine de Balzac décrit avec justesse. C’est l’attrait de Paris, de la nouveauté et de la modernité, ce sont les clivages entre les provinces et la capitale, ce sont les passions politiques qui ne cessent pas de retomber et qui font que les barricades surgissent à tout moment, à Lyon, Marseille ou Paris. Né un peu par hasard, ce régime a duré dix-huit ans. Oublié aujourd’hui, peu connu, il demeure pourtant un moment où la France a tenté de favoriser la liberté sous l’égide d’un monarque improbable, Louis-Philippe.

Extrait du livre "La parenthèse libérale" de Jean-Baptiste Noé, aux éditions Calmann-Levy

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