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Carlos : dinosaure du terrorisme ?
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Terroristus Rex

Carlos comparaît cette semaine pour quatre attentats commis il y a une trentaine d'années. L'occasion de s'intéresser à ses méthodes terroristes... dépassées ou toujours d'actualité ?

François-Bernard Huyghe

François-Bernard Huyghe

François-Bernard Huyghe, docteur d’État, hdr., est directeur de recherche à l’IRIS, spécialisé dans la communication, la cyberstratégie et l’intelligence économique, derniers livres : « L’art de la guerre idéologique » (le Cerf 2021) et  « Fake news Manip, infox et infodémie en 2021 » (VA éditeurs 2020).

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À en croire la presse, Illitch Ramirez qui va être jugé pour des attentats commis dans les années 1980, n'est plus qu'un revenant d'une époque sanglante, et seule l'excellente série "Carlos" de Benassayag a évité au sexagénaire séducteur et narcissique de sombrer dans l'oubli.

Déjà condamné à perpétuité pour avoir abattu deux policiers et un "traître" en 1974, il est poursuivi cette fois pour quatre attentats à la bombe qui ont fait onze morts et qui étaient destinés à envoyer un message au gouvernement socialiste d'alors. Certes, le respect dû aux victimes et les règles de l'État de droit exigent qu'il soit jugé en toute clarté. Sans porter atteinte à la présomption d'innocence, on peut pourtant penser qu'il n'y a guère de chances qu'il sorte blanchi de crimes qu'il avait revendiqués et peu de gens attendent un coup de théâtre de ce procès.

Pourtant, au-delà de l'éventuelle "leçon morale" qu'il nous apporterait, ce procès pourrait être l'occasion de poser au moins deux questions de fond : celle du terrorisme d'État et celle des pouvoirs de l'idéologie.

Carlos, ce "touriste-terroriste"

Véritable touriste-terroriste, Carlos n'a cessé de voyager, trouvant ici un protecteur, là un camp d'entraînement ou un financement, ailleurs encore un refuge où se mettre à l'abri des poursuites. URSS, RDA, Hongrie, Irak, Libye, Syrie, Yemen, Soudan, Liban... pays socialistes, pays arabes, pays "anti-impérialistes" lui ont fourni suivant le cas, des cibles et des instructions, de l'argent et des armes, quelques semaines de tranquillité ou un bout de piste pour faire atterrir un avion détourné. C'était l'époque de la "diplomatie par les bombes" : les États voyous réglaient leurs comptes par attentats interposés et des gouvernements, par peur de leurs "hôtes" par solidarité anti-impérialiste et pro-palestinienne, les laissaient passer, se reposer ou "travailler".

La bipolarisation géopolitique favorisait ces complicités et les documents des services des ex pays socialistes nous en apprendront sans doute beaucoup sur leur nature et leur étendue. Le terrorisme d'État "sponsorisé", la manipulation via des services secrets de groupes commettant des attentats sur d'autres territoires aura-t-il duré de la première guerre mondiale  (attentat de Sarajevo) à la chute du Mur ? De récentes affaires comme celle du bizarre complot pour tuer un diplomate saoudien à Washington justifient peut-être que l'on ne soit peut-être pas si affirmatif.

Le terrorisme du fort

Par ailleurs, quelles que soient ses motivations narcissiques (être la superstar du terrorisme) ou intéressées (l'argent de ses commanditaires), Carlos agissait par conviction idéologique. Idéologie syncrétique puisqu'elle l'a mené du marxisme de son enfance à l'islam révolutionnaire en passant par la case anti-sioniste. Mais cette idéologie lui a toujours fourni une vision du monde divisé en deux camps, une certitude historique de la victoire et surtout une conviction absolue que le terroriste, c'est l'autre, l'impérialisme ou l'État, le puissant qui a des bombardiers et des missiles. Donc que le terroriste défenseur des opprimés ne fait que se défendre. En cela Carlos est profondément moderne car ce discours n'a pas fini de retentir.

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