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Budget de la défense : cette assurance vie pour la France qu’il faut absolument préserver
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Le nerf de la guerre

A gauche, les déclarations se multiplient en faveur d’une réduction du budget de la Défense. Dans un monde de demain qui ne semble pas moins dangereux que celui d’hier, une telle orientation pourrait coûter cher à la France.

Guillaume Lagane

Guillaume Lagane

Guillaume Lagane est spécialiste des questions de défense.

Il est également maître de conférences à Science-Po Paris. 

Il est l'auteur de Questions internationales en fiches (Ellipses, 2021 (quatrième édition)) et de Premiers pas en géopolitique (Ellipses, 2012). il est également l'auteur de Théories des relations internationales (Ellipses, février 2016). Il participe au blog Eurasia Prospective.

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Au sein de la probable future majorité de gauche française, les déclarations se multiplient en faveur d’une réduction du budget de la Défense. Le nouveau ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, dont l’intérêt pour les questions militaires est ancien, considère qu’il ne faut pas s’arrêter à une approche comptable. Jean-Vincent Placé, au nom des Verts, veut poser la question du coût de nos forces nucléaires (10% du budget de la défense, soit un peu plus de trois milliards d’euros par an). François Hollande, comme candidat, avait déjà jugé que la défense devrait prendre sa part de la nécessaire réduction des dépenses publiques.

C’est oublier qu’au nom d’un renforcement des capacités d’intervention dans la lignée du Livre blanc de 2008, les armées françaises ont déjà subi une cure de minceur sous la présidence Sarkozy (fermeture de bases, suppression de 54 000 postes sur un peu plus de 300 000). Mais il est vrai que l’armée, la « grande muette », ne descendra pas dans la rue pour défendre son budget. Et que la diminution des dépenses militaires arrive en tête des coupes budgétaires que les Français accepteraient : 45 % d’opinions favorables en 2010 contre seulement 25 % pour les aides aux chômeurs…

Pourtant, le contexte stratégique est tout sauf favorable à une réduction des dépenses militaires. La France est, avec le Royaume-Uni, le seul Etat européen à entretenir des forces armées crédibles. Ceci au prix d’un effort budgétaire conséquent (32 milliards d’euros par an), 50% du total européen pour les deux Etats. Il faut préserver cette spécificité. D’abord parce que François Hollande appelle à une relance de l’Europe de la défense et à une réaffirmation du poids de la France dans l’OTAN. Or, qu’on l’appelle Europe de la défense ou « pilier européen » de l’OTAN, toute alliance est une auberge espagnole : on y mange ce que l’on apporte. Paris sera d’autant plus fort au sein de l’Alliance atlantique qu’il apportera beaucoup en termes de moyens militaires, donc de budget militaire. De ce point de vue, force est de constater que le départ anticipé d’Afghanistan ne nous place pas dans la meilleure des positions face à nos alliés restant sur le champ de bataille.

Ensuite parce que François Hollande s’est dit favorable à une intervention armée de la France en Syrie dans le cas, il est vrai extrêmement improbable, où le Conseil de sécurité l’autoriserait. Mais l’opération Harmattan en Libye, en 2011, a justement montré que l’armée française avait besoins de plus (drones, moyens de renseignement) et non de moins d’investissements. Enfin parce que le monde de demain ne semble pas moins dangereux que celui d’hier : déstabilisation du Sahara, nucléarisation de l’Iran, montée de la Chine sont autant de menaces auxquelles la France peut être confrontée. Et l’administration Obama, en déplaçant les forces américaines vers le Pacifique, montre que les Etats-Unis ne seront pas toujours là pour protéger l’Europe et lui permettre de consacrer ses impôts à l’entretien d’un généreux Etat Providence.  

Un choix politique porteur d’avenir consiste donc plutôt à maintenir notre effort de défense au niveau prévu par la loi de programmation militaire 2009-2014 alors même que les gels de crédits en 2011 avaient représenté un décrochage par rapport aux montants prévus. L’actuel gouvernement, et la future majorité, doivent donc dépasser les attentes de leur électorat et préserver ce budget de défense. Il constitue une assurance vie pour la France dont le coût est à relativiser. Il faut rappeler qu’au moment où Londres repousse à 68 ans l’âge de la retraite (progressivement jusqu’en 2046), le coût du retour annoncé à la retraite à 60 ans pour certaines catégories de salariés français représente, de l’aveu même du gouvernement, trois milliards d’euros en 2017. Soit le budget de notre arme nucléaire…

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