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Bruxelles pourrait retoquer le budget français.
Bruxelles pourrait retoquer le budget français.
©Reuters

L'Édito de Jean-Marc Sylvestre

Selon les informations en provenance de Bruxelles, de Berlin et de toutes les capitales européennes, la Commission pourrait refuser le projet de budget présenté par la France. Une humiliation qui ferait l’effet d’une bombe.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Il n’y a qu’un seul autre exemple dans l’histoire de la zone euro où un pays s’est vu refusé son budget, c’est l’Autriche. L’année dernière, le pays devait revoir en catastrophe tous ses chiffres après le vote par son Parlement. En matière d'humiliation politique, on fait difficilement plus violent. La France est sans doute à la veille d’une telle claque qui sera donnée par la commission Barroso, d’ailleurs sur le départ, et qui ne sera pas mécontente de partir en faisant preuve d’un peu d’autorité. Barroso n’est pas un président qui se soit distingué par son courage de vérité. Il a même été très absent pendant la gestion de la crise depuis 2008. D’où son désir de partir en lâchant cette petite bombe. Car pour François Hollande, il s’agit bien d’une bombe atomique.

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Les faits d’abord. A priori, la Commission estime que dans la présentation du projet de budget 2015, le compte n’y est pas. Il ne s’agit pas d’exiger un respect des normes, tout le monde sait en Europe que dans la conjoncture actuelle ce serait suicidaire. Non, il s’agit de vérifier si les efforts, promis de façon à amorcer un processus de redressement, sont vérifiés dans les chiffres. Il y avait eu un compromis de trouvé. Or, le projet de budget est encore loin de ce compromis. En gros, la commission tolère des marges d’erreur de 0,5% par rapport aux engagements. La France devait organiser une baisse de 0,8% de son déficit structurel, c’est-à-dire corriger les effets de la conjoncture. Concrètement donc, les experts ne demandent pas à la France de faire ce que la conjoncture ne permet manifestement pas de faire. Ces derniers s’étaient donc mis d’accord avec Paris pour une baisse de 0,8%.

Quand les documents sont arrivés à Bruxelles, la baisse n’était pas de 0,8% mais de 0,2%, c’est-à-dire inférieure à la marge d’erreur, ça fait désordre. La Commission européenne, soutenue par toutes les capitales de la zone euro, parait décidée à renvoyer la copie à Paris. Du coup, ça va entrainer des tractations à n’en plus finir pour échapper à des sanctions et une crédibilité bien entamée.

Les conséquences d’une telle expérience sont assez désolantes pour la France. L’hexagone va passer véritablement pour le plus mauvais élève de la classe européenne. Celui qui ne range pas sa maison mais qui en plus raconte des histoires en espérant ne pas se faire prendre. Le comportement est jugé, à juste titre, ridicule.

A Bruxelles, et dans toutes les capitales européennes, ça nous met dans une situation de plus en plus difficile. Chacun sait maintenant que nous ne méritons pas des taux d’intérêt aussi bas et que si nous les avons, c’est grâce à la solidarité européenne. Il suffit que cette solidarité en vienne à se fissurer officiellement et les taux remontent. Un point de taux supplémentaire, c’est 20 milliards de frais financiers en plus. On peut s’en moquer, mais il faudra bien que quelqu’un les paie si on veut ne pas être en défaut de paiement.

A Paris, les effets d’une telle mésaventure sont politiquement contradictoires. D’un côté l’opposition, entrainée par les pro-européens, peut très bien profiter de cette humiliation pour mettre l’accent une fois de plus sur l’incapacité du gouvernement à gérer correctement les finances publiques. Manuel Valls n’a pas besoin de ce type de sanction. D’où l’énergie qu’il met à ne pas obtenir de punition.

D’un autre côté, la gauche peut mettre cet incident à profit pour, une fois de plus, dénoncer la violence de l’Europe, "bouc-émissaire incapable de reconnaitre les vrais problèmes de croissance". Le problème, c’est qu'en attaquant les institutions européennes, elle joint sa voix à celle des anti-européens, ceux de l’extrême gauche… et de l’extrême droite. Si la conséquence politique de cette mésaventure est de cette nature, il ne restera pas beaucoup de monde en France pour défendre l’avenir européen. Les amis de Jacques Delors se sentiront bien seuls. Les européens libéraux aussi.

L’Europe aurait pu être la plus formidable des aventures pour mobiliser les nouvelles générations. La génération Erasmus n’espère qu’une chose : que l’on bâtisse les États-Unis d’Europe. On s’en éloigne de plus en plus.

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