Blocages en série et appels à la grève générale : mais qui a vraiment intérêt à ce que tout pète un an avant la présidentielle ?<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Politique
Blocages en série et appels à la grève générale : mais qui a vraiment intérêt à ce que tout pète un an avant la présidentielle ?
©Sebomari.com

Opération risquée

La contestation contre le projet de loi El Khomri semble prendre un nouveau tournant avec la mise en place de blocages de raffineries. Même si le Secrétaire d'Etat aux Transports, Alain Vidalies, affirme qu'il n'y a "pas de risque de pénurie de carburant", la situation pourrait dégénérer à tout moment, aussi bien socialement que politiquement.

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe est le fondateur du cabinet Parménide et président de Triapalio. Il est l'auteur de Faut-il quitter la France ? (Jacob-Duvernet, avril 2012). Son site : www.eric-verhaeghe.fr Il vient de créer un nouveau site : www.lecourrierdesstrateges.fr
 

Diplômé de l'Ena (promotion Copernic) et titulaire d'une maîtrise de philosophie et d'un Dea d'histoire à l'université Paris-I, il est né à Liège en 1968.

 

Voir la bio »

Atlantico : Après les manifestations de rue contre le projet de loi El Khomri, ce sont désormais des blocages qui sont opérés. Jusqu'où la situation pourrait dégénérer ? Qui a intérêt à une telle évolution de la situation ? 

Eric Verhaeghe : Il me semble que la situation est très incertaine. On ne sent nulle part une sorte d'engouement pour le "mouvement social". En revanche, les blocages de raffinerie constituent un élément nouveau. Jusqu'ici, le secteur privé était resté relativement imperméable à la contestation contre la loi. Le fait que certains salariés du privé décide de passer à l'action est un signal envoyé sur une évolution du mouvement. Pour l'instant, ce signal est "cantonné" et n'est suivi d'aucun ralliement de masse. En revanche, rien n'exclut dans les jours à venir un durcissement des actions et un pourrissement de la situation. Certains, notamment à Force Ouvrière, parie sur une dégradation de la situation et une mise en difficulté du gouvernement par ce biais.

Ce type d'actions (manifestations, blocages) est généralement menées par des sympathisants-adhérents de gauche. Or, elles mettent en difficulté le gouvernement de gauche à moins d'un an de la présidentielle. N'est-ce pas risqué sur le plan politique ? Ne favorisent-elles pas, à l'inverse, la montée de la droite et de l'extrême-droite ? 

Je suis assez frappé par la polarisation de l'opinion, et par ses clivages. Il y a manifestement deux France qui s'affrontent. L'une, encline à soutenir le mouvement, est plutôt attachée à la préservation des grands équilibres sociaux. L'autre est de plus en plus ouvertement écoeurée par les blocages internes et par l'incapacité du pouvoir à agir. Le fait que la gauche soit largement à l'origine de ces bâtons mis dans les roues de la gauche ne contribue en effet pas à la sérénité des débats. C'est peut-être le principal point à craindre: le dialogue entre les deux "parties" risque de se compliquer singulièrement dans les semaines à venir, et la loi est encore loin d'être promulguée. 

Face à l'évolution de la situation, quelle attitude les syndicats auraient-ils le plus intérêt à adopter ? Leur jeu actuel consistant à mettre en difficulté le gouvernement socialiste n'est-il pas dangereux ? 

Je nuancerais quand même. La CFDT est un soutien sans faille au gouvernement, qui peut se réclamer, au fond, du soutien accordé par des syndicats qui représentent une bonne moitié de salariés (CGC, CFTC, CFDT). Reste l'autre moitié: FO et la CGT, qui ont décidé de compter leurs forces sur ce dossier. Il faut comprendre que ce clivage entre organisations syndicales obéit évidemment à des calculs "politiques" qui dépassent largement la loi Travail.FO est un syndicat historiquement proche du Parti socialiste, mais il fait le pari d'une contestation qui annonce un climat délétère à gauche pour les présidentielles de 2017. FO est engagé dans une course au rattrapage de la CGT, notamment dans la fonction publique, qui explique largement cette stratégie. Et là encore, on peut déplorer que le pays soit largement l'otage de ces considérations tactiques. 

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !