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La diversification chez France Télévisions, avenir de la TV numérique
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Télé numérique

Alors qu'Internet nous prend de plus en plus de temps, la télévision est au centre de multiples questions quant à son avenir. Celui-ci passe sans doute par une diversification de sa programmation. C'est l'épisode 3 de notre feuilleton consacré à la télévision numérique.

Jean-Noël Dibie pour Culture-Tops

Jean-Noël Dibie pour Culture-Tops

Docteur en droit, Jean-Noël Dibie a une très longue expérience de l'audiovisuel et des médias : directeur de la SFP (Société française de production), responsable des affaires européennes à France Télévision, conseiller du directeur général de l'UER (Union européenne de radio-télévision). 

Aujourd’hui consultant, il s’investit dans les activités de recherche, notamment au sein d’EUROVISIONI, et d’enseignement (président du conseil pédagogique de l’EICAR, l’Ecole des métiers du cinéma de l’audiovisuel et des nouveaux médias, et chargé de cours à l’EDHEC).

Jean-Noël Dibie est l'auteur d'un A-book en six parties paru en 2014 sur Atlantico éditions : Communication politique, le plus vieux métier du monde

 

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«C’est le contenu du programme qui sera le plus important ». (Rupert Murdoch, Los Angeles, 11 janvier 1994 - conférence de lancement du projet américain des «autoroutes de l’information» (NII), par Al Gore, vice président des Etats Unis d’Amérique).

Le magnat des médias explicitait ainsi le fondement des affrontements engagés entre les opérateurs de tuyaux et les industries de programmes, devenus contenus. La sémantique illustre la prédominance déjà prise par les télécoms, dont relèvent les réseaux en ligne, sur la télévision. Depuis lors, les premiers n’ont eu de cesse d’accéder aux programmes, tandis que les seconds multiplient leurs efforts pour tenter d’élargir leurs capacités de diffusion.

C’est ce que nous rappelle aujourd’hui l’actualité, qui voit Canal+ reprendre les chaînes en clair de Bolloré («Direct 8» et «Direct Star »), et TF1 menacer de fermer «LCI», si la chaîne n’obtient pas un canal en clair dans le bouquet de la TNT.

Les modes de consommation des programmes audiovisuels ont évolué. La convergence du cinéma, de la télévision et de l’Internet a induit de nouveaux modèles non-linéaires, qui se développent parallèlement au modèle linéaire de la télédiffusion. Les radiodiffuseurs confrontés à ces mutations cherchent à sécuriser leurs capacités de production en élargissant leur diffusion. Bien qu’exclues des grandes manœuvres capitalistiques, les télévisions de service public sont également tenues de se diversifier. 

Les bouleversements de l’univers de la communication audiovisuelle ne sont pas sans rappeler ceux apparus à la fin du XVe siècle, après l’invention de l’imprimerie. L’imprimeur, qui constate que son indépendance financière est inversement proportionnelle au volume de ses tirages, se tourne vers l’éditeur, client débiteur, et se défie du papetier, fournisseur créancier. Dans le même temps, la Sorbonne créée en son sein «L’imprimerie de France» pour échapper aux pressions économiques et culturelles de l’imprimeur et de l’éditeur.

La «vidéosphère», dont la télévision a été la première composante, s’est substituée à la « graphosphère », installée par l’imprimerie. Pour autant, France télévisions, nonobstant la fonction éducative et culturelle de la télévision de service public, n’a pas vocation à remplacer la Sorbonne. Dans l’environnement d’hyper-concurrence du secteur audiovisuel, les radiodiffuseurs publics - privé de la protection que leur assurait l’encadrement de la rareté de l’univers analogique – doivent optimiser leurs investissements dans les programmes. A cette fin, ils ont, notamment, la possibilité d’ajouter une corde à leur arc, celle d’éditeur de programmes audiovisuels. En France, la politique de soutien au développement d’une industrie de programme, a fait que le radiodiffuseur n’est pas identifié comme l’éditeur des programmes qu’ils diffusent, y compris des œuvres originales dont il a le plus souvent l’initiative. Pour autant, comme l’éditeur est un intermédiaire entre l’auteur et le lecteur, le radiodiffuseur est un intermédiaire entre les auteurs - l’œuvre audiovisuelle est collective - et le téléspectateur.

La stratégie de marque initiée par France télévisions pour chacune de ses chaînes, peut être vue comme un premier pas vers un positionnement d’éditeur de programmes. Comme la BBC en Angleterre ou la Rai en Italie, le radiodiffuseur public français diffuse plusieurs chaînes identifiées par leurs programmes : ce faisant ces radiodiffuseurs s’inscrivent dans une dynamique comparable à celle de groupes d’édition qui rassemblent des éditeurs ayant chacun des lignes éditoriales propres.

Reconnaitre au radiodiffuseur capacité à être éditeur, c’est l’inciter à investir dans la production de programmes conformes à son image et à sa ligne éditoriale. Dans l’environnement multi-support de l’audiovisuel numérique, le radiodiffuseur se doit d’être éditeur afin d’accroitre son rayonnement par une diffusion élargie d’œuvres clairement identifiées. Inscrite dans une stratégie de marque, une telle dynamique facilite l’accès à de nouveaux marchés, notamment, ceux de la télévision à la demande.

Ce ne sont pas les offres permises par la technologie mais les demandes résultants de comportements sociaux qui installent les usages : c’est pourquoi, les radiodiffuseurs, en clair - publics et privés - ou cryptés, sont tenus d’adapter leurs stratégies aux attentes des téléspectateurs, sous peine de disparaître.

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