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Au terme des 100 premiers jours, Macron se retrouve déjà en risque de disgrâce pour cause d’autoritarisme déplacé et d’excès de technocratie
©ANNE-CHRISTINE POUJOULAT / AFP

Atlantico Business

Ca sent la fin de l’état de grâce. A peine est-il en marche pour fêter ses 100 premiers jours de pouvoir que le président de la République se retrouve confronté à une opinion publique déçue et à une majorité qui bégaie.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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La fin du mois de juillet s’est terminée de façon assez désastreuse pour le président de la République. Les sondages le créditent d’une dégringolade sévère. Sa cote de popularité a baissé dans la dernière semaine à un niveau que ses prédécesseurs n’avaient jamais atteint. Nicolas Sarkozy et même François Hollande étaient mieux cotés que lui au début du mois d’aout de leur première année.

Emmanuel Macron paie le cafouillage autour du budget de la défense et du départ du général en chef des armées, le général de Villiers. Il paie aussi l’annonce par le ministre du budget d’un rabotage de 5 euros sur les APL, l’allocation logement qui a permis aux insoumis de Jean-Luc Mélenchon de s’emparer de ces dossiers pour démontrer qu’il est le seul à représenter les classes défavorisées. Macron paie aussi le désordre à l’Assemblée nationale, y compris et surtout dans les rangs du mouvement En marche, qui faute d’expérience, tourne en rond. 

Sans parler des couacs qui se sont multipliés après le discours de politique générale du Premier ministre Edouard Philippe. 

A tort ou à raison, l’opinion publique tient le président responsable de des cafouillages et de cette mauvaise gouvernance.  

Voilà en gros pour les faits qui expliquent les mauvais sondages et qui prouvent que le président est beaucoup moins à l’aise dans la gestion des affaires domestiques que dans la représentation internationale. 

Faut dire que lors des premières semaines de son quinquennat, le président de la République a fait un sans faute en donnant l’image du chef qui assume la charge et qui incarne la France sur la scène internationale.

L’arrivée au pouvoir, les activités internationales, les G7 et les G20, la visite de Poutine à Versailles et celle de Donald Trump à la Tour Eiffel ont redoré le blason de la France sur les marchés étrangers. 

Cela dit, une fois les séquences internationales bouclées, il s’est retrouvé confronté à la réalité de la gouvernance. S’est-il aperçu que de déléguer le pouvoir à ses ministres, tout en assumant la responsabilité de la fonction, cela pouvait entrainer quelques contradictions. 

Toujours est-il, que lorsque le général en chef des armées a déclaré publiquement son désaccord, sur les économies budgétaires sur les équipements militaires, ce dernier a bien évidemment outrepassé son rôle. Mais quand le président au soir du 14 juillet l’a humilié publiquement, ça n’a pas été très habile. 

Cette affaire aurait pu être gérée autrement, notamment par la ministre des armées dont c’est le rôle. Erreur de management. 

Quand Gérald Darmanin, le jeune ministre du budget reprend à son compte une note de son ministère qui lui conseille de raboter l’APL de 5 euros, personne à Bercy ou à l’Elysée ne trouve rien à dire, jusqu'à ce que Jean-Luc Mélenchon en profite pour mettre le feu au débat en rejetant la responsabilité sur le président, « l’ami des riches et des nantis ». L’obligeant à faire machine arrière et à trouver une autre solution. 

Le moral des députés En marche n’est pas meilleur. Ils sont débordés par leur inexpérience. La semaine dernière la majorité, mal formée, mal dirigée, a mis un désordre invraisemblable à l’Assemblée nationale. Là encore, on s’est aperçu que Richard Ferrand, l'homme chargé de driver le mouvement était particulièrement absent, au point où beaucoup le soupçonnent déjà de laisser cette situation se dégrader pour se venger d’avoir été lâché par le président quand on a commencé à parler de ses affaires de favoritisme avec les mutuelles de Bretagne. Là encore, problème de compétence, d’expertise et de management.

Enfin, dernier dossier assez difficile à gérer et à comprendre, la nationalisation de STX, les chantiers navals de St Nazaire. Alors que l’un des actionnaires, un groupe sud coréen, devait passer la main à l'italien Ficantieri, et que, à priori tout le monde était d’accord, on s’est aperçu que les Italiens étaient sans doute très proches des entreprises chinoises et qu’ils pouvaient travailler pour Pékin. 

Sans aucune preuve, on a donc fait machine arrière, la veille de la signature par crainte de se voir accusé de brader des chantiers en pleine santé à des chinois via des italiens.

Donc le ministre de l’Economie a proposé une nationalisation temporaire en attendant de retrouver une solution plus politiquement correcte. Cette affaire est évidemment purement politique, mais comment expliquer ensuite ce protectionnisme alors que l'on travaille à l’Europe unie et que beaucoup de capitaux et d’entreprises françaises ont tissé des liens avec des investisseurs italiens ? Vivendi vient de débarquer chez Telecom italiano, Amundi (crédit agricole) est entré chez Pioner, Essilor est arrivé chez Luxottica (Ray ban).

Les technocrates de l‘Elysée ont fonctionné en technocrates. La presse internationale est désastreuse. 

En fait, à presque 100 jours de gouvernance, on commence à bien comprendre comment fonctionne Jupiter. Emmanuel Macron a montré un talent inouï pour accéder au pouvoir. Son talent est moins évident pour l’exercer

Les hommes choisis ne sont pas forcément les meilleurs, les plus pointus et surtout l’absence de contrepouvoirs responsables se fait cruellement sentir

Emmanuel Macron est menacé par deux dangers.

L’autoritarisme aigu d’abord. C’est dans son caractère certes mais c’est difficilement compatible avec une gouvernance démocratique et sereine. Les collaborateurs ont l’Elysée, les ministres qui ont déjà essayer plusieurs colères s’en souviendront, mais ils savent et expliquent que la colère ne permet pas de trouver la solution.  

Le deuxième risque, c’est la dérive technocratique. Toutes les mesures, les projets qui ont provoqué des couacs et des incertitudes et du stress, sont finalement des projets et des mesures directement issues de la technostructure. Celle qui est entrée dans les cabinets ministériels comme celle qui sévit dans l’administration. La technostructure suggère des décisions sans en évaluer l’impact politique et humain. 

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