Pollution
Après les pluies acides, nous voilà confrontés aux pluies... de plastique
Les retombées de plastique dans les eaux de pluie sont des phénomènes qui sont de plus en plus constatés aux Etats-Unis. Des moyens existent pour limiter ces pluies de plastique.
Gaël Le Roux
Gaël Le Roux est directeur de recherche au CNRS-Université de Toulouse. Il participe actuellement à un projet sur les plastiques dans les Pyrénées et les stratégies de réduction dans l'environnement. Il a également contribué au dossier sur les plastiques de l'université de Toulouse.
Atlantico : On recense de plus en plus de phénomènes de pluies de plastique, notamment aux Etats-Unis, à quoi sont-elles dues ? Arrive-t-on à estimer les quantités de plastique que cela représente ?
Gaël Le Roux : En fait, les retombées de plastiques existent sûrement depuis l'explosion de notre utilisation globale de ces polymères et notre mauvaise gestion des déchets associés. Mais ces pollutions ont été détectées seulement récemment dans des grandes villes comme Paris puis dans des endroits plus vierges comme les Pyrénées ou les grands parcs américains. Comme on ne cherchait pas, on ne trouvait pas.
Le problème de la pollution aux plastiques a été mis en évidence en premier dans les océans dans les années 70 et depuis la communauté scientifique remonte le problème : des océans, aux rivières, des rivières aux milieux terrestres dont les montagnes !
Les microplastiques dans l'environnement ont deux sources principales. La dégradation de microplastiques issus de notre utilisation de ces matériaux et l'utilisation directe des microplastiques par exemple dans l'alimentaire, la cosmétique ou l'industrie.
Il est pour l'instant difficile de quantifier la masse de plastique car les mesures n'ont pas encore été faites dans tous les endroits du globe. Toutefois à titre d'indication, une étude américaine mentionnait plus de 1000 tonnes de plastiques déposées annuellement sur les grands parcs américains.
En déterminant la composition chimique des microplastiques, on peut soupçonner plusieurs sources de ces microplastiques dans l'air : les plastiques à usage unique, les fibres de vêtements (ex. les "polaires"), les plastiques agricoles. Notre étude et l'étude américaine montrent aussi que les centres urbains sont des sources vraisemblables de microplastiques car ces particules peuvent être transportées sur de longue distance : des lieux habités jusqu'aux montagnes.
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Y-a-t-il des lieux plus propices à la concentration de microplastiques ? Qu’est ce qui explique notamment la forte concentration que vous avez étudié dans les Pyrénées ?
Les microplastiques atmosphériques sont principalement importants dans les zones urbaines comme les grandes métropoles mondiales. Nous avons montré aussi qu'il existe un véritable cycle atmosphérique des microplastiques puisque les embruns marins peuvent réémettre des microplastiques océaniques dans l'air proche de la côte.
Dans les montagnes comme les Pyrénées, il est connu que les polluants atmosphériques peuvent s'accumuler par transport lointain puis entraînement préférentiel dans la colonne d'air. Pour dire simplement, il pleut plus dans les montagnes donc cela entraîne plus de polluants vers les sols même si l'air est relativement plus propre en montagne. D'autres mécanismes atmosphériques peuvent également expliquer des hot-spots - points chauds - de pollution. C'est quelque chose que nous continuons à étudier dans le cadre d'un projet appelé ATMO-PLASTIC financé par l'agence nationale de la recherche.
Certains comparent ces pluies de plastique aux pluies acides, est-ce une comparaison pertinente ? Quels sont les dangers de ces pluies de plastique ?
Les pluies acides perturbent grandement et visuellement les écosystèmes. Par exemple les arbres qui dépérissent. Pour les microplastiques, il s’agit d’une pollution invisible mais omniprésente ; les impacts sont sûrement plus pernicieux : perturbation des écosystèmes car les microplastiques sont sources de contaminations comme les polluants organiques, des perturbateurs endocriniens, l'apport d'espèces microbiennes invasives voir un impact direct sur les écosystèmes ou la santé. Une étude récente a montré, par exemple, l'impact de ces microplastiques atmosphériques qui pourraient perturber les cellules pulmonaires.
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Est-il possible d’empêcher ce phénomène ou au moins de réduire son expansion ? Si oui comment ?
Une meilleure gestion des déchets, une moindre utilisation des plastiques à usage unique sont les premiers gestes logiques. Toutefois cela ne suffira pas : l'utilisation des plastiques explose actuellement dans le monde avec une consommation jamais égalée. De plus notre utilisation des plastiques laisse un héritage de plastiques dans les océans, les sols, les rivières et beaucoup de ces plastiques ne font que se dégrader en particules plus fines mais qui ne disparaissent jamais véritablement.
Gaël Le Roux est directeur de recherche au CNRS-Université de Toulouse. Il participe actuellement à un projet sur les plastiques dans les Pyrénées et les stratégies de réduction dans l'environnement. Il a également contribué au dossier sur les plastiques de l'université de Toulouse.
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