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"Les fantômes familiaux" : ce que révèle notre arbre généalogique
©Reuters

Bonnes feuilles

Le fantôme générationnel, représentant le poids du passé familial sur notre inconscient. Il peut être transmis de génération en génération sans faire de dégâts visibles jusqu’à ce qu’il se dévoile sous la forme de phénomènes pathologiques incompréhensibles. Extrait de "Les fantômes familiaux" de Bruno Clavier, publié aux Editions Payot (2/2).

Bruno Clavier

Bruno Clavier

Bruno Clavier est psychanalyste et psychologue clinicien en région parisienne. Il vient de publier "Les fantômes familiaux".

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J’ai déjà présenté la notion de fantôme transgénérationnel comme une structure psychique émotionnelle résultant d’un traumatisme. Il semble qu’elle soit « expulsée » par l'ancêtre qui n'a pas pu la métaboliser, la dépasser, la transcender. Certains auteurs parlent de « patate chaude », je préfère évoquer l’image d’une « grenade dégoupillée » : elle peut être transmise de génération en génération sans faire de dégâts visibles jusqu’à ce qu’elle éclate sous la forme de phénomènes pathologiques incompréhensibles. Ainsi, le deuil impensable d’un parent qui a perdu son enfant peut être repris par l’un ou l’une de ses descendants et fréquemment, plusieurs générations après. La plupart du temps, le souvenir conscient du trauma ancestral s’est perdu, car la personne traumatisée, entrée dans un vide psychique, dans un état d’insensibilité, ne peut plus témoigner de la violence émotionnelle de ce qu’elle » par l’ancêtre qui n’a pasa subi. L’effet de ce trauma ancestral au sein de la famille est très bien décrit par Delphine de Vigan dans Rien ne s’oppose à la nuit, où elle évoque la mort de son oncle alors qu’il était enfant : « Désormais la mort d’Antonin ne serait plus qu’une onde souterraine, sismique, qui continuerait d’agir sans aucun bruit.

Par l’étude de l’arbre généalogique, mis à plat de façon exhaustive, les noms, prénoms, dates de naissance, de mariage, de mort et de traumatismes des aïeux sont autant de traces de ces tremblements de terre originaux capables de provoquer, bien long-temps après, de véritables « tsunamis » familiaux. Le repérage de la répétition de ces signifiants tout au long d’une chaîne généalogique peut permettre de remonter, à partir d’un symptôme d’aujourd’hui jusqu’à sa source d’hier, parfois à cinq, six, voire sept générations antérieures. Ce n’est souvent qu’au prix de ce travail de recherche qu’un descendant peut enfin métaboliser cette émotion résiduelle qui le parasite et qui n’appartient pas à son vécu.

Cette transmission émotionnelle entre générations, observée à partir de l’étude des arbres généalogiques, se retrouve dans ce que la biologie appelle l’épigénétique. Ainsi, on constate qu’un stress, mais aussi bien d’autres facteurs pathologiques, induits par l’environnement à une génération, passent à une autre génération sans qu’il y ait modification visible de l’ADN, et deviennent ainsi un caractère « acquis » et transmissible. Cependant, comme « les variations épigénétiques sont finalement assez plastiques « d’immenses perspectives thérapeutiques » sont envisageables au niveau de la médecine. Il en est de même dans le domaine des transmissions psychiques, car l’expérience clinique m’a montré, ainsi qu’à d’autres cliniciens qui ont travaillé dans ce domaine, que par la connaissance, la parole mise à son propos et, parfois, par certains actes ritualisés accomplis par le descendant, cette mémoire incons- ciente peut se dissoudre.

Extrait de "Les fantômes familiaux" de Bruno Clavier publié aux Editions Payot, 2014. Pour acheter ce livre, cliquez ici.

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