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"Le journal d'Alix" de Iégor Gran : un journal féministe, qui ausculte les rapports de séduction, de domination et de pouvoir
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Le monde impitoyable de l’entreprise sous l’angle du féminisme

Charles-Édouard Aubry pour Culture-Tops

Charles-Édouard Aubry pour Culture-Tops

Charles-Édouard Aubry est chroniqueur pour Culture-Tops.

Culture-Tops est un site de chroniques couvrant l'ensemble de l'activité culturelle (théâtre, One Man Shows, opéras, ballets, spectacles divers, cinéma, expos, livres, etc.).
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THÈME

"Quand l’homme est mangé cru, il est moelleux sous la dent, sa chair est délicate, et je ne sais jamais quel vin choisir."

Ainsi commence le stupéfiant monologue qu’Alix livre à son journal. 

Journal éminemment féministe, qui ausculte les rapports de séduction, de domination et de pouvoir qui régissent sa vie professionnelle au Ministère de la Culture et dans sa vie privée.

POINTS FORTS

La critique féministe occupe une place centrale dans la critique sociale, en interrogeant la spécificité des rapports sociaux. Iegor Gran  nous livre, sur le mode romanesque, une étude brillante sur les rapports de domination au sein de l’entreprise.

Comment traduire le féminisme dans la vie quotidienne d’une grande entreprise ? Alix se rebelle contre son supérieur en faisant avancer les dossiers qu’il fait tout pour enterrer, en rassemblant les énergies positives pour faire front contre les pratiques de domination qui régissent les rapports hiérarchiques, en bousculant traditions et pratiques quotidiennes, en démontant jour après jours la mécanique d’assujettissement masculine, en exprimant avec force et conviction un discours volontariste …

La langue de Iegor Gran est magnifique et use de multiples métaphores pour nous emporter dans le monde fantasmé d’Alix. Usant d’une langue totalement libre et d’une structure faite de courts chapitres, eux-mêmes composés de courts paragraphes qui mettent parfaitement en valeur l’audace de la langue.

Le cannibalisme devient l’obsession ultime d’Alix, prête à dévorer l’homme, à croquer la vie à pleines dents dans un combat d’où ne peut sortir qu’un seul vainqueur.

Cette posture se double d’un appétit sexuel débridé pour une de ses collègues, Apolline, qui la pousse à reproduire le même processus de domination et de possession contre lequel elle lutte.

QUELQUES RÉSERVES

Le livre nous offre de magnifiques fulgurances littéraires et, forcément, des temps plus faibles qui sont autant de respirations qui permettent au lecteur de reprendre son souffle.

ENCORE UN MOT...

L’écriture sert d’exutoire à cette énergie dévorante et propose une façon originale de lire le monde de l’entreprise, entre fantasme et réalité.

UNE PHRASE

- “ La bonne humeur ne doit pas être ce rideau d’opium qui ferme nos yeux sur les injustices de ce monde en créant l’illusion de la normalité.” (page 134)

- “ Toujours avancer à contre-pied – se surprendre soi-même est une bonne raison pour continuer à vivre.” (page 162)

- “ Dans un groupe, combien faut-il de personnes déterminées, parlant fort, pour faire basculer le débat en isolant la majorité silencieuse, tout en prétendant parler en son nom.” (page 210)

L'AUTEUR

Iegor Andreïevitch Siniavski est né à Moscou, dix ans avant que son père, fraîchement libéré, n’obtienne l’asile politique en France où il déménagea avec sa famille.

Ingénieur et diplômé de l’Ecole Centrale de Paris, il est français et devenu écrivain en empruntant le nom de famille de sa femme.

Il a publié quinze livres, tous chez P.O.L., dont deux chroniqués par Culture-Tops :
Les services compétents
Le retour de Russie

Il collabore également avec Charlie Hebdo depuis 2015.

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