Voilà pourquoi les bassines n’affecteraient pas la nappe phréatique dans les Deux-Sèvres<!-- --> | Atlantico.fr
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Un réservoir d'eau, aussi appelé bassine, à Mauzé-sur-le-Mignon, dans les Deux-Sèvres, en octobre 2022.
Un réservoir d'eau, aussi appelé bassine, à Mauzé-sur-le-Mignon, dans les Deux-Sèvres, en octobre 2022.
©AFP

Atlantico Green

Les activistes opposés au projet font abstraction du contexte géologique particulier de la zone alors que c’est précisément l’élément qui explique que le BRGM s’y soit déclaré favorable.

Terre à Terre

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Le compte Twitter de Terre à Terre est géré par un enseignant agrégé de Sciences de la Vie et de la Terre.

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Cela fait quelques semaines que le projet de retenues de substitution des Deux-Sèvres fait débat. D’un côté, les opposants prétendent que l’eau prélevée pendant l’hiver contribuera à assécher progressivement les nappes, et que par conséquent ces bassines ne seraient en rien une solution pérenne.

De l’autre, les agriculteurs favorables au projet affirment au contraire que l’eau prélevée le sera aux dépends de l’écoulement vers la mer, ce qui ne menacerait en rien l’état des nappes phréatiques…

Dans ce contexte tendu, la Coopérative de l’eau qui porte le projet, s’appuie sur une étude locale du BRGM dont les conclusions paraissent très favorables.

Il y est notamment indiqué que le scénario « permettrait une amélioration globale du niveau des nappes », avec « un effet positif en printemps/été » et un « impact (…) faible et négligeable » pendant l’hiver. Dans ce rapport, même le marais Poitevin semble y trouver un bénéfice, avec « des gains de débits et de niveaux piézométriques en printemps/été » qui « pourraient améliorer les conditions de développement de la biodiversité ». 

Pourtant, cela fait des années que des spécialistes nous mettent en garde contre ce genre de projet, du moins dans le cas général… Dès lors, les conclusions du BRGM peuvent paraitre bien singulières, voire paradoxales. 

Et pourtant, il n’en est rien, car comme nous allons le voir la région bénéficie d’une situation géologique singulière. 

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En effet, la région ciblée par le projet se trouve à proximité du « Seuil du Poitou », dont la particularité est d’être situé à la jonction entre deux grands bassins sédimentaires : le Bassin Parisien au nord et le Bassin Aquitain au sud. Coincé entre deux grands massifs cristallins (Massif Armoricain et Massif Central), le Seuil du Poitou se caractérise par la présence de couches sédimentaires peu épaisses, du fait que le socle granitique ne se trouve pas très loin sous la surface.

Or, ce socle cristallin est un très mauvais aquifère (il ne contient que très peu d’eau), du fait de sa très faible porosité. Les nappes phréatiques sont donc exclusivement contenues dans les fines couches sédimentaires sus-jacentes.

En conséquence, les aquifères contenant ces nappes présentent de faibles volumes de stockage, et les nappes concernées sont généralement des nappes libres, en relation directe avec la surface, contrairement à la majorité du Bassin Aquitain qui est constitué d’une sorte de « mille-feuilles » sédimentaire. 

Intéressons-nous maintenant à la nature de ces aquifères : il s’agit de roches d’âge Jurassique, donc principalement des calcaires massifs. Ce type de calcaires ne présente que peu de porosité, mais en revanche l’eau peut être contenue dans des failles qui peuvent s’élargir par dissolution, le calcaire étant en effet une roche facile à dissoudre.

Ainsi, suivant l’état de dissolution, on peut avoir des aquifères de type « calcaires fissurés » si les fissures sont peu élargies (c’est le cas sur toute la moitié sud de la zone ciblée), [p. 17] ou des aquifères de types « karstiques », si les fissures sont très élargies (c’est le cas dans la partie nord de la zone ciblée, dans la zone la plus proche du Seuil du Poitou). [p. 15]

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Dans les deux cas, on a un volume d’eau stocké par m3 de roche qui est plutôt faible, ce qui valide bien le fait que les aquifères de la région sont de faible capacité.

Mais ce n’est pas tout, car dans ces types d’aquifères karstiques ou fissurés l’eau circule très rapidement : on dit qu’il s’agit d’aquifères à forte diffusivité.

Si l’on récapitule tout ça, on a des nappes…

-Majoritairement à nappe libre : pas de terrain argileux étanche entre la nappe et la surface.

-De faible capacité : le volume d’eau stocké est faible à cause de la faible épaisseur sédimentaire et de la faible porosité des roches.

-De forte diffusivité : l’eau circule rapidement dans les fissures et dans le karst, ce qui implique des échanges importants entre la nappe et les cours d’eau. 

Le temps de séjour de l’eau dans l’aquifère, qui peut s’estimer en divisant le volume d’eau stockée par la vitesse des échanges avec le réseau hydrographique, est donc très faible dans la région.

C’est ce qu’on appelle des « nappes à faible inertie ». [p. 17

Concrètement, qu’est-ce que ça signifie ? Que l’eau présente à un moment « t » sera déjà partie de l’aquifère quelques mois plus tard.

En conséquence :

-Les cours d’eau et les nappes sont étroitement connectés. [p.23]

Cette caractéristique se manifeste sur les piézomètres par une forte réactivité de la nappe en fonction de la pluviométrie et du débit des cours d’eau, du moins une fois la « réserve utile » du sol saturée. [p. 19]

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Ainsi, contrairement à ce que l’on pourrait penser, il n’y a dans cette zone pas vraiment de différence entre prélever l’eau dans la nappe ou dans le cours d’eau. 

- Le temps de séjour de l’eau dans l’aquifère est inférieur à la durée entre les saisons. En conséquence, les situations hydrologiques des nappes sont indépendantes entre l’hiver et l’été : il n’y a pas de cycle pluriannuel. 

Cela signifie que, quel que soit l’ampleur de la sécheresse estivale, les nappes ont de fortes probabilités de se remplir pendant l’hiver quand même. Et inversement, les prélèvements faits pendant l’hiver n’ont pas forcément d’impact sur le niveau de la nappe l’été. [p. 38

-Le stockage artificiel de l’eau en profondeur dans les nappes n’est pas une solution viable sur ce territoire : la diffusivité importante de ces aquifères associée aux faibles capacités de stockage des nappes rend ces techniques caduques. Concrètement, l’eau que l’on stockerait dans la nappe pendant l’hiver ne serait pas retenue suffisamment longtemps pour qu’elle nous soit utile l’été. 

Pour toutes ces raisons, le stockage de l’eau en surface dans des retenues de substitution est particulièrement bien adapté dans cette région… Ce qui ne signifie pas que ce serait le cas ailleurs. [p.39]

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