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Jean-Christophe Cambadélis a récemment appelé à une "union de la gauche" en vue des prochaines élections régionales.
Jean-Christophe Cambadélis a récemment appelé à une "union de la gauche" en vue des prochaines élections régionales.
©Reuters

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Selon un sondage Elabe exclusif pour Atlantico, l'auto-positionnement politique des Français est resté relativement stable depuis octobre 2014. 28% d'entre-eux se déclarent à gauche ou très à gauche (=), et 29% à droite (+1).

Yves-Marie Cann

Yves-Marie Cann

Yves-Marie Cann est Directeur en charge des études d'opinion de l'Institut CSA.
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Atlantico : Si les équilibres entre droite et gauche semble à première vue stables, les lignes idéologiques sont-elles restées les mêmes ? Qu'est-ce qui différencie aujourd'hui quelqu'un de droite de quelqu'un de gauche sur le plan des attentes politiques ? 

Yves-Marie Cann : Tout d’abord insistons sur le fait que s’il est de bon ton de proclamer aujourd’hui que la droite et la gauche ne veulent plus rien dire, nous avons toujours, comme en 2014, une nette majorité de Français (68%) se disant de gauche, du centre ou de la droite. Cette proportion enregistre toutefois un léger recul sur un an (-2 points), la fraction de Français interrogés se disant ni de gauche, ni du centre, ni de la droite atteignant désormais près d’un tiers de la population en âge de voter (32% exactement). Un résultat qui est loin d’être négligeable et qui témoigne du contexte de défiance générale que nous observons à l’égard des partis politiques et de leurs principaux représentants.

Pour autant, le positionnement des Français sur l’axe gauche-droite n’est pas neutre et révèle en effet des attitudes et des valeurs différentes. D’une manière générale, ceux se situant à gauche tendent à davantage privilégier le collectif que l’individualisme, l’égalité par rapport à la liberté, le dépassement des Etats nations plutôt que la souveraineté national, le progressisme plutôt que le conservatisme et valorisent le multiculturalisme. Ceux se positionnant à droite se disent quant à eux plus réalistes qu’idéalistes, privilégient la défense de notre héritage historique et culturel plutôt que l’ouverture au multiculturalisme. Sur le plan économique, ils valorisent davantage que la gauche le secteur privé, et préfèrent nettement la liberté à l’égalité. En matière de lutte contre l’insécurité, ils privilégient la répression plutôt que la prévention.

Jean-Christophe Cambadélis a récemment appelé à une "union de la gauche" en vue des prochaines élections régionales. Comment ces derniers marqueurs de la sensibilité politique ont-ils évolués cette dernière décennie pour la gauche ?

Même si certains font de la résistance, les lignes idéologique sont tout sauf figées. Sous l’effet des alternances politiques, de l’évolution du économique et social ou encore de la transformation des modes, etc. elles évoluent en permanence au sein de la société. A titre d’exemple, nous avons observé ces dernières années un rapprochement des positions des sympathisants de gauche et de droite sur les enjeux sécuritaires. Le centre de gravité s’est ainsi déporté à droite sur cette thématique, même si les proches de la gauche manifestent toujours par une plus grande attention accordée à la prévention. De même sur le plan économique, le secteur public est moins valorisé que par le passé à gauche. Les sympathisants de gauche reconnaissent ainsi davantage qu’avant  le rôle du secteur privé, tout en valorisant la nécessité d’un secteur public fort et d’un secteur associatif dynamique.

Et pour la droite ? 

Sur des questions dites de "société", le centre de gravité a plutôt eu tendance à se déplacer à gauche. Par exemple sur la question du droit au mariage pour les couples homosexuels, les sympathisants de droite campent désormais sur une position nettement moins dure qu’il y quelques années. Chez bon nombre d’entre eux, ce n’est pas tant le principe du mariage des couples de même sexe qui suscite leur opposition mais plutôt le droit qui en découle d’adopter des enfants et la crainte que la prochaine étape soit la légalisation de la PMA voire de la GPA.

Sur d’autres sujets, nous observons en revanche une radicalisation des positions, notamment sous l’effet de la montée en puissance du Front national. Le rapport à l’immigration s’est ainsi sensiblement durci. Dans le même temps, les crispations sont très fortes autour au sujet de la place de l’Islam en France et ce n’est pas sans conséquences sur l’attachement aux racines ou à l’héritage judéo-chrétien de la France, davantage revendiqué qu’il y a quelques années. De même, sur le plan social, la dénonciation de "l’assistanat" avec en toile de fond la figure de l’immigré qui profiterait indument de notre système social rencontre elle aussi un succès grandissant et constitue un point de différentiation important avec les sympathisants de gauche.

Sur quels thèmes partis de droite et gauche sont-ils plus crédibles ? 

A partir de quatorze thématiques régulièrement présentes dans le débat public, nous avons demandé aux personnes interrogées de nous préciser des idées ou des propositions de quel camp politique elles se sentent le plus proche. Auprès des catégories populaires, c’est-à-dire les employés et les ouvriers, la droite entendue au sens large (avec l’extrême droite) l’emporte nettement face à la gauche sur dix thématiques ! C’est notamment le cas en ce qui concerne l’immigration (36% de proximité à la droite contre seulement 18% pour la gauche), la place de l’Islam en France (35% contre 16%) et pour la sécurité des biens et des personnes (33% contre 15%). A l’inverse, la gauche ne l’emporte très nettement que sur deux sujets : l’accès aux aides sociales (31% contre 23% pour la droite)… et sur les enjeux climatiques (24% contre 15%). Droite et gauche font enfin jeu égal sur le rôle de la famille et l’éducation des enfants. A l’échelle de l’ensemble de l’échantillon, ce sont les mêmes enseignements, ce qui témoigne d’une "bataille culturelle" perdue par la gauche face à la droite.

Et à l'inverse sur lesquels droite et gauche ont-ils perdus en crédibilité ?

Sur la plupart des thématiques serais-je tenté de dire, car si la droite réalise sur une majorité d’entre elles de meilleurs scores que la gauche, nous observons dans le même temps une très forte proportion de personnes interrogées ne se sentant proche ni de la gauche, ni du centre, ni de la droite. Ceci est particulièrement flagrant sur la question du chômage et de l’emploi pour laquelle 40% répondent "aucun camp en particulier" contre 28% pour la droite, 20% pour la gauche et 8% pour le centre. Le constat est le même sur la fiscalité, l’éducation des enfants, l’Union européenne ou encore la mondialisation. Autant de sujet sur lesquels l’offre politique actuelle ne parvient pas à répondre aux attentes d’une majorité relative de Français.

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