Quand le calamar se marre et quand la grisaille bataille : c’est l’actualité des montres en mode floréal<!-- --> | Atlantico.fr
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Le grand choc du néo-chic vintage poussé dans ses moindres retranchements (Baltic).
Le grand choc du néo-chic vintage poussé dans ses moindres retranchements (Baltic).
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Atlantic-Tac

Mais aussi une touche française à pans coupés, des repompeurs pleins aux as, un vaisseau spatial en carbone, une feuille de houx à six chiffres, un cadran grainé à l’ancienne et la plongeuse disparue d’un guérillero exécuté…

Grégory Pons

Grégory Pons

Journaliste, éditeur français de Business Montres et Joaillerie, « médiafacture d’informations horlogères depuis 2004 » (site d’informations basé à Genève : 0 % publicité-100 % liberté), spécialiste du marketing horloger et de l’analyse des marchés de la montre.

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VACHERON CONSTANTIN : Une saisissante grisaille…

La manufacture suisse fait un détour par le musée du Louvre pour y renforcer son partenariat avec les arts et la culture. Cette montre de la série Les Cabinotiers est une pièce unique en hommage au peintre Rubens : le motif interprété en émail reprend le dessin de Rubens intitulé « La lutte pour l’étendard de la bataille d’Anghiari ».L’acheteur de cette montre bénéficiera d’une visite privée du musée, pour y découvrir cette œuvre en compagnie des experts du Louvre et des maîtres artisans de la manufacture genevoise. L’histoire du dessin est singulière : lors de son séjour en Italie, au début du XVIIesiècle, le peintre flamand Pierre Paul Rubens aurait acheté, puis retouché à l’encre, au lavis et à la gouache, cette feuille représentant la « Bataille d’Anghiari », vaste composition commandée à Léonard de Vinci pour la salle du Grand Conseil du Palais de la Seigneurie – par la suite devenu Palazzo Vecchio – à Florence. Considérée comme l’un des grands chefs d’œuvre de l’artiste, l’immense peinture, qui célébrait une fameuse victoire des armées du pape Eugène IV et des républiques de Venise et de Florence sur celles du duc de Milan, laissée inachevée par Léonard en 1506, se dégrada très rapidement. Il n’en restait pratiquement rien lorsque Giorgio Vasari, au milieu du XVIesiècle, restructura la salle à la demande du duc Cosimo I, pour en faire l’actuel Salone de Cinquecento, et recouvrit les murs d’un nouveau décor exaltant les hauts faits de la maison des Médicis. Les vestiges de la « Bataille d’Anghiari » auraient-ils été conservés sous les fresques de Vasari ? Personne, à ce jour, n’en a apporté la preuve, et les essais de recherches, notamment sous la Bataille de Marciano, se sont révélés tout à fait infructueux. Le défi était de retranscrire sur 3,3 cm de diamètre un tel dessin, en peinture miniature, parfois avec des pinceaux à trois poils, parfois avec des… épines de cactus ! Le résultat est surprenant dans la subtilité de ses teintes et de ses demi-tons, dans le style traditionnels des émaux « grisaille » : c’est une véritable œuvre d’art qui honore les beaux-arts de la montre en même temps qu’elle rend hommage à un des chefs-d’œuvre de l’art européen…

Mr Jones : Jules, au secours !

Toujours très rupturiste dans son approche des montres qui ne se contentent jamais de dire l’heure, mais qui tiennent à symboliser – sans se prendre au sérieux – le temps qui passe, l’atelier britannique Mr Jones a imaginé d’emprunter au Jules Verne de Vingt mille lieues sous les mers son céphalopode géant : les tentacules ont déjà saisi une malheureuse victime pour l’emporter dans les abysses [c’est l’indication des minutes, selon le code horaire classique], mais un héros s’attaque à la hache au monstre marin [c’est l’affichage des heures]. Très logiquement, cette montre céphalopodique quoique très littéraire a été rebaptisée « Vingt Mille », avec assez de bulles sur le cadran pour parfaire sa vocation nautique, puisqu’elle est également étanche à 50 m. Elle n’est facturée qu’un peu plus de 200 euros, mais il n’est pas certain qu’elle soit toujours disponible (boîtier de 37 mm, mouvement quartz) tellement elle a tapé dans l’œil de nombreux amateurs, fasciné par cette poursuite tentaculaire autour du cadran. Une expérience inoubliable…

GEMMYO : Un chic indéfinissablement féminin…

Très française dans son style et son esprit, tout comme par le passeport de sa créatrice, Pauline Laigneau, la maison néo-joaillière Gemmyo passe au Swiss Made pour son horlogerie – quoi de plus normal quandon pratique déjà, pour les bijoux, le culte de l’exigence dans les moindres détails, la passion des belles lignes et le goût des beaux matériaux ? Ce qui est moins, en revanche, dans la nouvelle ligne de montres de Gemmyo, ce sont les prix, demeurés étonnamment sages pour la qualité de cette première série de Prima : nettement moins de 1 500 euros (commandes en ligne sur le site de Gemmyo) pour ce boîtier octogonal (26 mm x 24 mm) aux teintes dorées-rosées, qui s’harmonise bien avec le cadran blanc aux chiffres romains et les aiguilles sobres qui sont animées par un mouvement électronique suisse. Aucune forfanterie dans cette proposition, mais une grande honnêteté dans l’expression d’une nouvelle douceur horlogère : tout est juste exactement là où il faut, et comme il faut, avec un choix de bracelets qui sera toujours de bon goût. C’est peut-être ça, la vraie « touche française » des montres Prima de Gemmyo, ce chic indéfinissable qui se perçoit au premier regard et qui se vérifie au quotidien…

ARGON : Un grand saut horloger dans l’hyperspace…

La bonne affaire du moment est en campagne de sociofinancement sur Kickstarter et, si on vous en parle, c’est que cette campagne à succès est française, avec deux jeunes horlogers français derrière les fourneaux : Guillaume Laidet, le ressusciteur de marques [Vulcain, Nivada Grenchen, entre autres – on n’a pas le droit de tout dire], et Théo Auffret, le génial maître-horloger « méchanicien » de l’opération. Ouverte hier, la campagne dépasse déjà les 600 000 euros de souscription, avec plus de 300 contributeurs qui ont misé 1 500 euros sur une marque indépendante, Argon, dont ils ne connaissaient la montre Spaceone que par des images mises en ligne. On peut souscrire pour le boîtier en titane moyennant 1 900 euros – ce qui reste à peu près cinquante fois moins cher que la même montre en version haute horlogerie suisse ! C’est dire l’attraction que l’horlogerie indépendante peut exercer sur la nouvelle communauté des amateurs d’émotions fortes au poignet [voir, dans le « Bon à savoir » ci-dessous, notre information sur les enchères de créateurs indépendants]. Ce n’est pas compliqué : vous n’avez jamais eu affaire à une montre comme cette Spaceone ! La carpo-disruption – disruption au poignet – naît ici d’un boîtier qui rappellera le Faucon Millenium aux nostalgiques du Star Wars pré-Netflix et de l’affichage digital « à plat » des heures sautantes, des minutes glissantes et des secondes scandées – on trouvait déjà quelque chose comme ça dans certaines Lip des années 1970. Cette fois, la base mécanique du mouvement est suisse (Soprod), la montre (42 mm x 51 mm) étant assemblée en France. Version acier, titane bleui ou fibres de carbone (30 g, mais il n’y aura que 10à pièces) : le choix est vaste, mais l’émotion intense. Qu’est-ce que c’est sympa, la nouvelle hoirlogerie française !

BALTIC : Néo-chic néo-vintage néo-tricolore…

Une bonne nouvelle pour les amateurs : la jeune marque indépendante française Baltic annonce le retour en stock de sa MR01, une montre néo-classique ou néo-vintage (à chacun de choisir), très néo-chic dans sa compilation des meilleurs codes vintage – taille contenue du boîtier (36 mm) pour moins de 10 mm d’épaisseur, verre bombé à l’ancienne, chiffres Breguet du cadran grainé, petite seconde décalé à huit heures et options de couleur très élégantes (outremer, saumon, argent), prix plus qu’élégant (moins de 550 euros avec un mouvement automatique à micro-rotor, malheureusement pas français, mais la France n’a pas encore repris la production de tels calibres mécaniques). Il est vivement conseillé de passer commande dès maintenant sur le site de Baltic: tout laisse penser que, début juin, le jour de la relance de cette collection, les retardataires n’auront plus rien se mettre au poignet. Le retour en scène de cette MR01 est une des meilleures nouvelles de ce printemps horloger : cette jeune équipe tricolore a tout compris – ou presque !

BON À SAVOIR : En vrac, en bref et en toute liberté…

•••• CHE GUEVARA : la mort du général bolivien Gary Prado Salmon relance l’énigme de la Rolex Submariner que portait Che Guevara le jour de son arrestation et de son exécution en 1967. Responsable de la traque du guérillero cubain, Gary Prado Salmon n’a jamais raconté ce qu’il avait fait de la montre personnelle du Che, ni reparlé de qui avait bien pu la récupérer. Dans le sac à dos de Guevara, il y avait une autre Rolex, une GMT-Master [le Che était collectionneur, tout comme Fidel Castro], qui avait été offerte à l’époque à l’agent de la CIA – un Cubain anti-castriste – qui avait conduit les militaires boliviens vers le lieu de capture de Guevara. La Submariner portée jusqu’au bout par le Che devrait un jour ou l’autre réapparaître sur le marché… •••• ENCHÈRES : Genève vit en ce moment même à l’heure des enchères pour les montres de collection, avec des montres exceptionnelles qui passent de main en main après être passées par le poignet d’empereurs, de rois, de princes ou de gloires du passé. Derrière la valse des adjudications « millionnaires », une réalité : celle de montres désormais promues au rang d’œuvres d’art et s’échangeant donc entre collectionneurs au prix d’œuvres d’art. Au-delà des records dont nous reparlerons, le fait marquant de cette session 2023 reste l’attention désormais portée sur les « indépendants » – c’est-à-dire non plus sur les plus belles montres des grandes marques, mais sur les chefs-d’œuvre des créateurs indépendants, véritables artistes des hautes mécaniques, qui ont désormais la faveur des amateurs comme celle des investisseurs. Un seul exemple, celui de ce tourbillon Alain Silberstein, une pièce unique datée de 1994 et décorée d’un motif de feuille de houx en émail cloisonné fusionnant différentes techniques d’émail champlevé et flinqué. Mouvement irréprochable (un tourbillon Lémania, identique à ceux que proposaient à l’époque Breguet ou Vacheron Constantin), boîtier en or (rarissime dans la production d’Alain Silberstein) et exécution impeccable due au maître Michel Vernot : chez Ineichen, les collectionneurs ont poussé l’adjudication finale aux alentours de 110 000 euros – pas mal pour le plus fameux des designers horlogers français, poussé par la conjoncture économique à une retraite prématurée en 2012, mais depuis phénix renaissant de ses cendres que jamais [c’est d’ailleurs un record pour une montre signée Alain Silberstein]. Un bon conseil, suivez les indépendants, qui vont vous aider à poser un autre regard sur les montres : ils sont l’avenir de la créativité horlogère, et peut-être même de l’horlogerie tout court ! •••• RADCLIFFe : indice supplémentaire de ce vent porteur dans les voiles de l’horlogerie indépendante, la souscription à hauteur de 400 000 euros (820 contributeurs) qui vient d’être bouclée pour la montre The Dôme de la toute jeune marque indépendante Radcliffe, qui opère à Oxford au Royaume-Uni, et qui ne craint pas de s’inspirer, sous un dôme très évocateur, des heures et des minutes hémisphériques du laboratoire créateur genevois MB&F. Sauf que ce Dôme était proposé à 430 euros sur Kickstarter, quand MB&F le facture généralement 200 fois plus cher. Les nouveaux amateurs d’horlogerie disruptive n’ont pas les moyens des opulents oligarques asiatiques…

• LE QUOTIDIEN DES MONTRES

Toute l’actualité des marques, des montres et de ceux qui les font, c’est tous les jours dans Business Montres & Joaillerie, médiafacture d’informations horlogères depuis 2004...

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