Mariage homosexuel : le débat a-t-il fait évoluer les convictions des Français ?<!-- --> | Atlantico.fr
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La loi sur le mariage pour tous a été adoptée à l'Assemblée nationale par 331 voix pour et 225 voix contre.
La loi sur le mariage pour tous a été adoptée à l'Assemblée nationale par 331 voix pour et 225 voix contre.
©Reuters

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Après de longs mois de débats, parfois très houleux, le projet de loi pour le mariage homosexuel a été adopté hier mardi. Les positions des Français sur ce sujet ont-elles toujours été les mêmes ? Les dernières discussions ont-elles influé sur l'opinion ?

Yves-Marie Cann

Yves-Marie Cann

Yves-Marie Cann est Directeur en charge des études d'opinion de l'Institut CSA.
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Atlantico : Comment a évolué la position des Français par rapport au mariage homosexuel, depuis une dizaine d'années ? L'opinion est-elle sujette, sur cette question, à l'évolution ?

Yves-Marie Cann : Sur la question du droit au mariage pour les couples homosexuels, on s'aperçoit que la position des Français a évolué au cours des dix à quinze dernières années. Cette progression s'est particulièrement illustrée avec l'adoption du Pacs.

Cette période a fait l'objet d'importantes tensions. Elle a été l'occasion de débats houleux entre la gauche et la droite, avec un certain nombre de dérapages verbaux. Une fois cette discussion close, l'acceptation de l'homosexualité en France a beaucoup progressé. Cela s'est traduit dans les enquêtes d'opinion par une progression rapide et marquée de l'acceptation par les Français d'un droit au mariage pour les homosexuels.

La première mesure que nous avons, en 2004, marque déjà une majorité de sondés favorables à cette question du mariage. Depuis, cette adhésion majoritaire a fait preuve de solidité et ne s'est pas démentie, y compris au cours des débats de ces derniers mois.

La polarisation politique qui s'est exprimée sur ce sujet, le retour d'un clivage religieux, n'ont pas fait basculer la position majoritaire des Français. Dans notre dernière vague de mesure, nous obtenons 54% en décembre, 52% en janvier et 53% de gens favorables tout début avril.

La répartitions des sondés favorables et défavorables reste-t-elle la même au fil du temps ?

Sur le sujet du mariage, nous avons toujours eu un clivage gauche / droite fortement prononcé. Dans chaque enquête, le niveau d'adhésion des sympathisants de gauche est majoritaire tandis que les sympathisants de droite restent dans l'opposition.

Il faut cependant remarquer que si l'opposition des sympathisants de droite ne s'est pas démentie, leur proportion a être fermement opposés s'est réduite ces dernières années. Il y a donc une évolution des représentations et des positions, y compris à droite sur ce sujet-là. On peut émettre l'hypothèse que si Nicolas Sarkozy et François Fillon avaient décidé de porter ce projet au cours du mandat 2007-2012, un projet de mariage aurait bénéficié d'un plus grand soutien de l'électorat de droite.

Le rapport à ce sujet, en fonction de la religion, est-il stable ?

Sur le clivage religieux, l'opposition est beaucoup plus nette et intense. On le vérifie constamment au cours du temps. Il faut garder une nuance à l'esprit : dans notre dernier sondage, sur 63% de catholiques déclarés opposés au projet de mariage homosexuel, il y a de très fortes variations en fonction du niveau d'implication religieuse. Ceux qui pratiquent régulièrement sont plus fermement opposés.

Qu'en est-il de la question de l'adoption par les couples homosexuels ?

Autant, au cours des dernières années, nous avons constaté une progression des Français favorables à l'adoption par des couples homosexuels, autant sur ce sujet, le débat de ces derniers mois a fait bouger les lignes au sein de l'opinion. En décembre 2012, 48% des sondés y étaient favorables. En avril, ils n'étaient plus que 41%.

Sur ce sujet, la mobilisation des opposants au mariage pour tous semble avoir convaincu par ses arguments. Une partie des Français, en tous les cas, y ont été sensibles.

Là aussi, on retrouve les clivages gauche / droite et religieux. Sur les sympathisants de droite, les plus fermement opposés à ces projets sont ceux qui sont directement opposés à la problématique de l'adoption. Dès le mois de décembre, 48% des sympathisants de droite se déclaraient très fortement opposés à l'adoption. Ce chiffre a continué de progresser depuis, pour atteindre 53% début avril.

Le Pacs faisait-il l'objet de positions marquées selon des critères semblables ?

En termes de clivages au sein de la population, on retrouvait effectivement ce marquage politique et ce marquage religieux. Le projet a été porté en période de cohabitation par une majorité socialiste. Le président de la République, Jacques Chirac, s'était prononcé contre le Pacs. La majorité de l'opposition parlementaire de droite avait massivement voté contre, à l'exception de quelques personnalités comme Roselyne Bachelot. On trouvait d'ailleurs déjà, en tête de l'opposition, des figures comme Christine Boutin qui incarnait alors une droite proche des milieux catholiques, fervent opposant au projet de Pacs.

Appliquez-vous, comme pour certains sondages, des critères de correction prenant en compte une potentielle timidité des sondés à s'exprimer sur ces sujets ?

Sur des sondages de ce type, on interroge un échantillon représentatif de la population française en fonction des zones de résidences, des âges, des professions ou des sexes. Nous appliquons parfois de légers correctifs lorsque les objectifs ne sont pas atteints à l'interview près. Sur des questions politiques comme celle-ci, nous veillons aussi à ce que l'échantillon sondé soit représentatif des résultats obtenus lors de la dernière élection significative, en l'occurrence ici, le premier tour de la présidentielle en 2012.

Sur ce sujet, les sondés n'hésitent pas à répondre. Ils n'ont pas de difficulté à exprimer leur point de vue, dans un sens ou dans l'autre. L'indice qui permet d'évaluer la difficulté des personnes interrogées à répondre, c'est le taux de sans-opinion. Sur l'adoption et le mariage homosexuel, ces chiffres sont particulièrement peu élevés.

Méthodologie : sondage exclusif CSA / RTL réalisé par Internet les 8 et 9 janvier 2013 . Echantillon national représentatif de 1002 personnes résidant en France âgées de 18 ans et plus, constitué d'après la méthode des quotas (sexe, âge, catégorie socioprofessionnelle du répondant), après stratification par région et taille d’agglomération .  Les rappels sont issus de ces deux sondages : • Décembre 2012 : Sondage CSA / BFMTV réalisé en ligne du 11 au 13 décembre 2012 auprès de 1005 Français âgés de 18 ans et plus . • 2004 : Sondage CSA / Valeurs Actuelles réalisé par téléphone les 12 et 13 mai 2004 auprès de 1002 Français âgés de 18 ans et plus .

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