En route pour l'avenir
Le pessimisme des français en question
A l’heure où la crise économique et sociale est venue réactiver l’image d’une France pessimiste et de "Français râleurs et insatisfaits", particulièrement "négatifs" quant à leur vie et leur avenir, l’Ifop a souhaité aller au-delà de ces stéréotypes et idées reçues.
Un pessimisme déclaré mais peu constitué quant à l’avenir de la société française…
Trois quarts des Français s’estiment pessimistes pour l’avenir de la société française (76%). Un chiffre à prendre toutefois avec précaution pour deux raisons. La première, c’est que malgré le dessein relativement sombre qu’ils dressent pour leur pays, les Français s’estiment plutôt heureux de vivre à l’époque actuelle. Ainsi, à la question de savoir s’ils trouvaient qu’ils avaient plutôt de la chance ou de la malchance de vivre à l’époque actuelle, près des trois quarts d’entre eux ont choisi la première option (71%). La seconde raison, c’est que l’éventualité d’être plus heureux en vivant ailleurs qu’en France n’apparaît pas comme une évidence : seuls 20% des Français s’imaginent plus heureux s’ils habitaient dans un autre pays. D’une certaine façon, l’ambivalence de la posture majoritaire de nos concitoyens est ici assez bien illustrée, reposant sur un pessimisme déclaré, mais qui finalement est à relativiser. … même si, force est de constater que cette inquiétude relative gagne en intensité chez certains publics.
Trouvez-vous que vous avez plutôt de la chance ou plutôt de la malchance de vivre à l’époque actuelle ?
C’est le cas tout d’abord parmi les personnes les moins diplômées ; le niveau de chance de vivre à l’époque actuelle déclinant corrélativement avec celui du niveau de diplôme. Ainsi, si les personnes interrogées titulaires d’un diplôme supérieur au Bac +2 sont 78% à s’estimer chanceuses de vivre à l’époque actuelle, elles sont 10 points de moins chez celles qui sont titulaires du seul baccalauréat (68%), et encore 20 points de moins chez les personnes n’ayant aucun diplôme (48%).
Trouvez-vous que vous avez plutôt de la chance ou plutôt de la malchance de vivre à l’époque actuelle ?
Une autre catégorie se distingue : les 16-29 ans. Il s’agit d’un constat d’autant plus inquiétant qu’ils sont les plus concernés par l’avenir d’une société dans laquelle ils ont tout à construire. Aussi, en plus de se déclarer légèrement moins chanceux de vivre à l’époque actuelle (66%, -5 points par rapport à l’ensemble), les 16-29 ans affichent un niveau record de sentiment d’infortune de vivre à cette époque au regard d’enquêtes antérieures. En effet, alors que la proportion de jeunes estimant avoir plutôt de la malchance de vivre à leur époque était stable pendant cinquante ans (oscillant entre 18% et 13% entre 1957 et 1999), on constate aujourd’hui une forte progression, sans doute du fait de la crise économique qui a sévi depuis la dernière vague datant de 1999. Des Français relativement optimistes pour eux-mêmes, s’estimant capables d’influer le cours de leur vie.
Alors qu’un quart des Français seulement se dit optimiste pour l’avenir de la société française (24%), ils sont plus de la moitié à s’estimer optimistes pour eux-‐mêmes (56%). Illustration de cette croyance en leur avenir, près des trois quarts des personnes interrogées croient en leur capacité à influer sur le cours de leur vie (71%) et font état de projets personnels (74%).
Avez-vous des projets personnels ?
Cette perception est encore plus nette auprès des jeunes, 75% de 16-‐29 ans estimant pouvoir influer sur le cours de leur vie et lui donner la direction qu’ils souhaitent (soit 4 points de plus que l’ensemble), et 83% à 92% des 18-‐34 ans témoignant de projets personnels (soit 9 à 18 points de plus que l’ensemble). Enfin, autre signe que la jeunesse française n’a pas sombré collectivement dans la sinistrose, neuf jeunes sur dix estiment qu’ils ont beaucoup de choses à accomplir dans la vie (91%) et huit sur dix que la vie a beaucoup de choses à leur offrir (81%). Néanmoins, encore une fois, cet optimisme est à tempérer selon le niveau de diplôme de la personne interrogée. A l’instar du sentiment de chance de vivre à l’époque actuelle, le niveau d’optimisme pour soi-même diminue de concert avec celui du niveau de diplôme.
Vous personnellement diriez-vous que vous êtes globalement très optimiste, assez optimiste, assez pessimiste ou très pessimiste… ?
Ainsi, plus on est diplômé, plus on est optimiste pour soi-‐même (quand on reste en revanche aussi pessimiste concernant l’avenir de la société française !) : 64% des personnes interrogées au niveau supérieur à un Bac +2 se disent personnellement optimistes pour elles-‐mêmes, contre 54% des titulaires du seul baccalauréat (soit 10 points de moins par rapport aux titulaires du Bac +2) et 45% des sans diplôme (soit 19 points de moins par rapport aux titulaires du Bac +2). Corollairement, le niveau de diplôme joue également sur le sentiment d’être capable d’influe sur sa vie et de lui donner la direction souhaitée, les personnes n’ayant aucun diplôme étant à peine plus de la moitié (57%, soit 14 points de moins que l’ensemble) à avoir la sensation de pouvoir diriger leur vie, quand elles sont plus des trois quarts au sein de celles ayant étudié plus de deux ans après le Bac (78%, soit 7 points de plus par rapport à l’ensemble).
Vous sentez-vous capable d’influer sur votre vie et de lui donner la direction que vous voudriez qu’elle prenne ?
Des raisons d’y croire qui demeurent relativement intemporelles.
Priorité à la vie familiale et la santé. Comme au début des années 2000, la santé et la vie familiale sont placées en tête des choses les plus importantes dans la vie des Français. Vient ensuite, dans une moindre mesure, l’épanouissement personnel, bien devant l’argent, l’amitié ou la vie professionnelle.
Selon vous, qu’est-ce qui est le plus important dans la vie ?
Deux priorités semblent assez "intemporelles" à en croire l’évolution depuis 2000, puisque l’item "être en bonne santé" recueille 63% des citations (contre 64% en 2000) et "la vie familiale" 52% (contre 55% en 2000). A l’inverse, l’amitié subit un décrochage (7%, -14 points par rapport à 2000), à la faveur de l’épanouissement personnel (26%, +4 points). L’importance accordée à ces priorités varie fortement selon l’âge des Français. Ainsi, très logiquement, la santé est la chose la plus importante dans la vie de trois quarts des plus de 50 ans, plus sujets à d’éventuels soucis médicaux (entre 76% et 73%), quand elle ne compte que pour 40% des 18-‐24 ans. Ces derniers, contrairement à leurs aînés, placent l’épanouissement personnel en tête de leurs priorités pour leur avenir (45%, soit 13 points de plus que les 25-34 ans, et 23 à 24 points de plus que les 35 ans et plus). Cet épanouissement personnel apparait particulièrement attendu quand on sait que les 16-24 ans comptent davantage sur eux-mêmes que sur tout autre acteur pour influer sur leur bonheur (avant la sphère familiale et amicale, bien devant la sphère sociétale et étatique). En revanche, l’âge des Français a peu d’incidence sur l’importance qu’ils placent en leur vie familiale (de 42% à 57%) – "mener une vie de famille heureuse" étant par ailleurs la première ambition déclarée par les 16-24 ans.
Selon vous, qu’est-ce qui est le plus important dans la vie ?
Les valeurs phares des Français : respect et honnêteté plutôt que tolérance
La moitié des Français considère le respect comme une des principales valeurs à transmettre à ses enfants, en faisant ainsi une valeur phare de l’éducation à leur donner. Viennent ensuite, dans une moindre mesure, l’honnêteté (33%) et le travail (26%). On observe une progression très sensible de cette dernière valeur (26%, +13 points par rapport à 2000), probablement du fait de la difficulté croissante ces 13 dernières années pour les jeunes de trouver un emploi, et du rôle dont les parents peuvent se sentir investis à les préparer à une insertion complexe sur le marché du travail.
Parmi les suivantes, quelles sont les principales valeurs qu’il faut selon vous transmettre à ses enfants ?
Etonnamment, alors que le respect est en tête des valeurs à transmettre à ses enfants et qu’elle connaît une hausse de 7 points depuis 2000, la valeur tolérance, elle, est beaucoup moins évoquée par les Français depuis cette même période : elle accuse en effet une chute de 14 points de son taux de citation. Aussi peut-on se demander si, plus que la capacité à respecter ce qu’ils désapprouvent, les Français ne souhaitent pas tendre vers une déférence plus grande de leurs pairs.
Parmi les valeurs et les qualités suivantes, quelles sont les deux qui contribuent le plus à vous rendre heureux dans vos rapports aux autres ?
Ce recul de l’importance de la valeur tolérance se confirme également à l’analyse des valeurs et qualités qui contribuent à rendre heureux dans le rapport aux autres, puisque celle-‐ci n’est citée que par 29% des Français, contre 38% en 1998 (-9 points). A l’inverse, la convivialité connaît un essor de 17 points - 40% des Français jugeant qu’elle est une des valeurs qui contribuent le plus à les rendre heureux dans leur rapport aux autres – et la gentillesse de 7 points – 42%. Des valeurs humaines qui, en temps de crise, peuvent s’avérer particulièrement salvatrices.
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