La grande désynchronisation : le monde en 2015 va avancer à des rythmes différents<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Economie
La grande désynchronisation : le monde en 2015 va avancer à des rythmes différents
©Pixabay

Revue d'analyses financières

Dans l'œil des marchés : Jean-Jacques Netter, vice-président de l'Institut des Libertés, dresse, chaque mardi, un panorama de ce qu'écrivent les analystes financiers et politiques les plus en vue.

Jean-Jacques Netter

Jean-Jacques Netter

Jean Jacques Netter est vice-président de l’Institut des Libertés, un think tank fondé avec Charles Gave en janvier 2012.

Voir la bio »

La dépendance des marchés à l’égard de la Fed n’a jamais été aussi forte. Il n’y a qu’elle qui semble avoir le pouvoir de faire remonter les marchés avec des « mots ».Janet Yellen la présidente de la Fed a expliqué qu’elle allait faire preuve de « patience avant de commencer à relever ses taux ».  Tout était dit, tous les marchés ont remonté, dont le CAC 40 qui s’est offert sa plus belle séance de l’année en progressant de 3,3%. Si on voulait faire un jeu de mot on serait donc  dans un cycle de montagnes russes où tout va très vite dans tous les sens…

Le retour à une situation ressemblant à celle de la fin des années 90 est souvent invoqué par les stratégistes. La crise asiatique de 1997 suivie par le défaut de la Russie en 1998 sur fond de baisse des matières premières. La catalyste avait été la faillite de « Long Term Capital Management » victime de la crise russe. Il n’est pas inutile de rappeler les faits. Le fonds géré par John Meriwether patron de LTCM,  avait  perdu 4Md$. Tout ce qui ne fallait pas faire avait été mis en œuvre : levier non contrôlé (positions de 125 Md$ pour 4Md$ de fonds gérés... !), pas de transparence vis-à-vis des prime brokers, conflit d'intérêt, mauvais process de risk management. Au lieu d’en faire un exemple, la Fed demande à  John Corzine Senior Partner de Goldman Sachs d’organiser un sauvetage de 3,6 Md$ avec 13 banques: Bankers Trust, JP Morgan Chase, UBS, Citigroup, Goldman Sachs, Merrill Lynch et Morgan Stanley. Elles prêtent 3,5Md$ qui seront remboursés dans les quinze mois sans aucune perte.  La seule banque ayant refusé de participer au refinancement a été Bear Stearns que personne ne sauvera quelques mois plus tard.  Malgré cet accident gravissime,  la grande majorité des produits financiers continueront d'être bâtis avec un système qui sous évalue grossièrement le risque pour l'investisseur...

Le risque de défaut souverain de la Russie est moins fort aujourd’hui. Elle est peu endettée (11,6% du PIB),  mais les entreprises russes doivent verser 30Md€ en décembre et 130Md€ d’ici un an à des banques européennes et américaines alors qu’elles sont pénalisées par la chute du Rouble et du pétrole. Selon des chiffres de la BIS qui datent de fin 2013, l’exposition des banques étrangères à la Russie était de 219Md$ dont 5OMd$ dans les livres des banques françaises notamment : Société Générale, BNP Paribas, Crédit Agricole. L’Autriche avec Raiffeisen Bank est la plus exposée en pourcentage de ses engagements extérieurs. Il faudrait encore ajouter à cette somme 151Md$  de dérivés, garanties et engagements divers. A suivre de près…

La baisse du pétrole qui déstabilise les pays producteurs est interprétée comme une baisse d’impôt massive pour les consommateurs des pays importateurs. On pourrait faire une campagne de publicité sur le thème de « Deux barils pour le prix d’un ». Pour de nombreux économistes,  c’est de la bonne déflation et cela permet de résister au « diktat allemand sur l’austérité ». C’est aussi un cadeau en trompe l’œil car en période de très faible inflation, cela accroit le risque de déflation et menace la croissance.

Selon Anatole Kaletsky de GaveKal à Londres le baril pourrait historiquement baisser encore de 10 à 15%. En 1986 le baril avait baissé de 67%, en 1998 de 60%, en 2002 de 53% et en 2010 de 77%. Cela n’empêche pas Avi Salzman de Barron’s,  le grand magazine boursier américain de recommander cinq valeurs pétrolières à l’achat : Chevron, EOG Resources, Occidental Petroleum, Royal Dutch Shell et Schlumberger…

En Europe,  les raisons de s’inquiéter n’ont pas disparu. En plus de la situation en Russie nous avons le problème des élections en Grèce.  Partout la marge de manœuvre des politiques est faible puisque les taux d’intérêts sont proches de zéro et que l’extrémisme progresse partout. Ils  vont continuer à se débattre face à une stagnation économique très dégradée qui alimente le mécontentement social.

En France,  la baisse du pétrole et de l’Europermet de gagner un peu de  temps.

Les dernières prévisions de l’Insee qui prennent en compte la dépréciation de l’Euro et la chute du cours du pétrole permettent de revoir en légère hausse la croissance du PIB pour 2015. Toutefois, le gouvernement est coincé entre une opposition à l’étranger qui trouve le rythme de réformes beaucoup trop timide et une opposition intérieure qui n’adhère pas à sa politique. La vague de faillites atteint maintenant les plus grosses entreprises. La liste des fleurons nationaux que la France aura laissé partir s’est encore allongée cette année avec Alstom,  après Péchiney, Arcelor, Alcatel, Rhône Poulenc …. Les emplois publics continuent d’augmenter si l’on prend en compte les contrats aidés.

L’attractivité de la France est encore sévèrement notée par les investisseurs étrangers.

La gauche contrairement à son habitude aura tué la bourse de Paris. Dans le  secteur de la technologie, la capitalisation des vingt premières valeurs de technologie françaises ne pèse même pas le milliard d’Euros ! Dans celui de la biotechnologie,  Adocia brillante société lyonnaise innovante dans le monde du diabète vient de conclure un accord avec l’américain Lilly qui pourrait rapporter jusqu’à 570M$ !

L’immobilier en France a désormais une rentabilité négative. Heureusement rien n’empêche un français d’investir en Allemagne. Il profitera d’un impôt sur le revenu de son placement inférieur à 20% pour une rentabilité de l’ordre de 4%. Il continuera certes à être assujetti à l’ISF,  mais au total sa situation sera meilleure que s’il avait investi en France.

Aux Etats Unis les perspectives économiques vont encore s’améliorer

La valorisation des actions américaines est encore raisonnable.  pour le S&P 500 de 18x , un peu au dessus de la moyenne historique contre 30x en 2000 au moment où la bulle internet a éclaté. Depuis 2011 on a assisté à une expansion du P/E (ratio cours/bénéfice) de 60%. Pour l’année qui vient on devrait assister à une contraction de l’ordre de 10% compensée par une meilleure croissance des résultats des entreprises.

Tout cela incite à rester encore investi sur le marché américain.

La Chine va profiter de l’affaiblissement de la Russie

La Chine va stabiliser sa croissance à un niveau moins élevé que ces dernières années. Cependant, elle va profiter de la situation russe pour lui proposer des accords de swap de devises contre la fourniture de pétrole à bon marché (autour de 50$ ?)  sur le long terme. Cela serait favorable aux actions chinoises et indiennes.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !