ZAN, ZFE, rénovation énergétique… attention au risque d’émergence d’un mouvement encore plus puissant que les Gilets jaunes<!-- --> | Atlantico.fr
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Cette photographie prise le 16 janvier 2023 montre des travaux de rénovation thermique dans la ville minière de Lens.
Cette photographie prise le 16 janvier 2023 montre des travaux de rénovation thermique dans la ville minière de Lens.
©FRANCOIS LO PRESTI / AFP

Situation explosive

Entretien avec Jean-Baptiste Blanc, le sénateur LR du Vaucluse qui travaille sur le dispositif ZAN.

Jean-Baptiste Blanc

Jean-Baptiste Blanc

Jean-Baptiste Blanc est sénateur Les Républicains du Vaucluse. 

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Atlantico : Le dispositif ZAN est une démarche qui consiste à réduire au maximum l'extension des villes en limitant les constructions sur des espaces naturels ou agricoles et en compensant l'urbanisation par une plus grande place accordée à la nature dans la ville. Laurent Wauquiez refuse d'appliquer la loi de 2021 et dénonce une réforme « ruralicide ». Quel est le problème avec ce dispositif ? 

Jean-Baptiste Blanc : Je travaille sur la mise en œuvre du dispositif ZAN depuis un an et demi en tant que rapporteur lors de la loi climat et résilience. Il a été proposé par la Convention Citoyenne pour le Climat dans le but d'encourager la sobriété foncière. L'objectif principal de la ZAN est de pousser les élus locaux à rendre compte de leur consommation foncière et de réduire de 50% la construction sur les espaces agricoles et forestiers dans les dix prochaines années. L'État délègue ce dispositif aux régions pour sa gestion. 

Au Sénat, les élus locaux se montrent sceptiques, tandis que les élus urbains y sont généralement favorables. L'objectif du dispositif est louable, mais la méthode, à savoir le centralisme imposé par les régions, n'est pas viable. Nous ne pouvons pas appliquer ces objectifs uniformément sur tout le territoire. C'est pourquoi nous avons voté en faveur de la territorialisation de la mesure, estimant qu'il est nécessaire d'adopter une approche au cas par cas.

Trois décrets ont été votés avant d'être contestés par l'Association des Maires de France. De plus, les préfets, chargés d'aider les élus locaux à proposer des solutions de consommation foncière, n'ont pas pu le faire faute de moyens adéquats. C'est pourquoi nous avons mis en place une commission spéciale et proposé une loi soutenue par plus de 400 députés. Nous demandons plus de temps pour permettre aux régions de discuter avec les territoires. Nous souhaitons également exclure les grands projets nationaux du ZAN et garantir à chaque commune un hectare de foncier, une mesure que nous considérons comme fondamentale. En résumé, nous ne voulons pas que les régions dictent tout, mettant ainsi en péril le travail des élus locaux.

Quels sont, selon vous, les principaux problèmes de ce dispositif ? 

Imposer de telles mesures aux élus n'est pas la solution. Au contraire, ils doivent être partie prenante des décisions. Ils ne pourront atteindre ces objectifs que si on leur fournit les moyens nécessaires et qu'on les consulte. Les maires des petites communes rurales, en particulier, manquent de ressources appropriées. Ils ne sont pas en contact quotidien avec les Préfets et se considèrent comme les victimes de ce dispositif. C'est d'autant plus préjudiciable à un moment où, en raison de la crise du Covid-19, nous assistons à un afflux de nouveaux résidents ruraux. Il est impossible de les accueillir lorsque les communes manquent de terrains constructibles. Nous devons être en mesure de construire de nouveaux logements, surtout dans la période de crise que nous connaissons actuellement. Comme la construction d'immeubles n'est pas possible partout, notamment dans les villages protégés, il est essentiel de comprendre que les élus doivent avoir la flexibilité nécessaire pour adapter les règles à leurs situations particulières. Au-delà de l'immobilier, se pose également la question de la diversité. Seuls les élus sont en mesure de créer des espaces verts. Actuellement, on demande aux élus de densifier la ville tout en végétalisant et en créant des îlots de fraîcheur. Cette approche manque de cohérence.

Alors que l'on ne sait pas mesurer l'artificialisation des sols, pensez-vous que ce dispositif a réellement un sens ?

Pendant 10 ans, nous allons nous appuyer sur les Espaces Naturels Agricoles et Forestiers. Cependant, avec le nouveau décret, la définition de l'artificialisation des sols ne sera applicable qu'à partir de 2031. La transition entre ces deux décennies sera complexe à gérer. Par exemple, nous travaillons actuellement sur le cas des bâtiments agricoles. Ces structures ne peuvent pas être considérées comme de l'artificialisation, surtout lorsque nous luttons pour le bien-être des agriculteurs et des animaux. Nous espérons que ces bâtiments seront exclus du dispositif ZAN, mais nous nous interrogeons sur la manière de les comptabiliser. D’ailleurs, je pense que si les citoyens comprenaient réellement les implications de ce dispositif, cela pourrait déclencher un mouvement social encore plus puissant que les Gilets Jaunes.

De nombreux élus locaux se lèvent depuis 2 ans contre ce dispositif Zéro Artificialisation Nette. Le gouvernement ne les entend pas ?

Au début, on a reproché au gouvernement de ne pas les entendre. Ensuite, on leur a reproché de ne pas donner aux élus les outils et l’ingénierie nécessaire pour appréhender les objectifs. Lorsque notre proposition de loi a été votée et inscrite à l’Assemblée, après un long combat, le gouvernement a enfin daigné entendre la voix du Sénat.

Si d'autres élus se joignent au mouvement de grogne, pensez-vous que le dispositif ZAN pourrait être remis en question ?

Nous mettons dans la case « planification écologique » les ZAN, les ZFE, les rénovations énergétiques … Il est crucial de réfléchir aux implications sociales de tous ces dispositifs. En ce qui concerne le ZAN, de nombreux élus étaient déjà très mécontents depuis la loi Climat et résilience. Nous avons encore beaucoup de travail devant nous et nous devons suivre attentivement l'évolution de la situation. Si les élus nous disent que nos propositions ne fonctionnent pas, nous devrons tout reconsidérer. Le combat ne fait que commencer.

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