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En présentant Zahia comme un modèle de femme française, Karl Lagerfeld les méprise toutes
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Karl Lagerfeld a fait de Zahia, ex-prostituée et nouvelle femme d'affaires, sa dernière protégée. Mais ne dévalorise-t-il pas ainsi l'image de la femme française dans le monde.

Sophie de Menthon

Sophie de Menthon

Sophie de Menthon est présidente du Mouvement ETHIC (Entreprises de taille Humaine Indépendantes et de Croissance) et chef d’entreprise (SDME).

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Karl Lagerfeld a choisit d’aller au bout de la « provoc ». Il a dû penser que la décadence peut avoir quelque chose d’esthétique… Est-ce parce que ce grand couturier est au bout de son imagination qu’il a choisit de choquer et de plonger tête en avant dans la vulgarité ?Ce défilé de lingerie organisé sous l’égide de Zahia (photographiée par Lagerfeld) est un sommet dans le mépris des femmes, de la mode et de ses clientes. Zahia qui doit sa célébrité au fait d’avoir été le « cadeau d’anniversaire » d’un footballeur alors qu'elle était mineure, est donc aujourd’hui l’incarnation d’une des plus belles marques de couture mondiale, de la distinction et de l’éternel féminin.

Que cette jeune femme ait eu l’intelligence de passer d’une certaine forme de prostitution au statut d’entrepreneuse est une excellente nouvelle. On ne trouve rien à redire à ce qu’elle continue de commercialiser ses charmes en créant sa marque de lingerie ; cela fait plutôt sourire, maline ! Et après tout, libre à certaines femmes de souhaiter s’approprier le sexe appeal de Zahia en portant sa lingerie.

Mais le système déraille quand l’icône de la mode, le successeur de Coco Chanel, revendique d’afficher Zahia et ce qu’elle représente pour en faire un symbole, forcément mondial, de l’élégance française. Car c’est en même temps l’image de la France qu’il engage. L’image de la haute couture française, l’image des femmes françaises, l’image de la séduction féminine française. Désastreux et terriblement inquiétant car cette démarche est justement le renoncement revendiqué à l’élégance morale puis vestimentaire. On ne peut s’empêcher également d’être un peu désabusé par ce fond étranger qui a misé financièrement sur cette démarche, investissant ainsi sur le succès du voyeurisme et de la peopolisation dans ce qu’elle a de honteux.

Le message est fort : tout est équivalent, aucune valeur n’est respectable, les clientes et la société du fric ne peuvent que s’exciter sur un fait divers supposé provoquer le désir.

La rédemption aurait pu venir du talent de cette collection. Il n’en est rien : elle ressemble aux mauvais romans-photo du porno de la rue : le rose outrancier, la démarche racoleuse, la grossièreté des rajouts, la caricature en un mot d’une sexualité méprisée.

La démarche de Lagerfeld n’est pas innocente puisqu’il répond à un journaliste que Coco Chanel a débuté comme Zahia. Le passé de Coco Chanel est sulfureux, y compris et surtout pendant la guerre. Faut-il le ressusciter ? Au nom de quel cynisme ? La « déconstruction », comme l’explique fort bien Luc Ferry, est un nouveau fondement de la société. Le couturier n’a pas voulu être en retard d’une mode ! Il a juste oublié que s’il méprise les femmes, au point de vouloir donner cette image grossière et caricaturale de leur pouvoir de séduction, les femmes elles, n’aiment pas forcément qu’on les prenne pour des putes.

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