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Comment construire une union budgétaire européenne
sur des conceptions différentes ?
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Un pour tous... bug

Nicolas Sarkozy et Angela Merkel plaident tous les deux pour une plus grande coopération européenne en matière budgétaire. Ces derniers ayant toutefois du mal à s'accorder sur les moyens d'y parvenir, quels sont les compromis possibles ?

Jean-Luc  Sauron

Jean-Luc Sauron

Jean-Luc Sauron est professeur associé à l'Université Paris-Dauphine.

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L'union budgétaire européenne ? Il est difficile de se livrer à un exercice de pédagogie sur une notion dont les principaux initiateurs, Nicolas Sarkozy et Angela Merkel, ont pour l'instant diffusé peu d'informations précises. Contentons nous donc de dresser la problématique et les pistes possibles.

Tout d'abord, cette proposition relative à une plus forte convergence des politiques budgétaires nationales des États membres de la zone euro vise à centrer les regards sur un domaine relevant de la compétence des dits États. Elle acte l'absence de remise en cause d'un des postulats du traité de Maastricht : la politique monétaire des États de "l'Euroland" leur échappe, elle est sous la seule responsabilité de la BCE (Banque centrale européenne). Ils ne peuvent décider, pour améliorer leurs résultats économiques, ni de la modulation du taux de change de l'euro pour améliorer leur compétitivité internationale, ni des interventions de la Banque centrale européenne pour réduire leur endettement. Dès lors, les deux outils politiques à leur disposition pour réduire leur endettement et renforcer leur compétitivité sont la politique économique et la politique budgétaire.

La première n'est pas mobilisable immédiatement. Qui pourrait avoir la légitimité pour décider d'une répartition des activités sur le territoire de la zone euro ou du développement harmonieux des industries et des stratégies commerciales nationales. Prudemment, le traité sur le fonctionnement de l'UE se limite à parler de coordination, terme peu contraignant. Cette terminologie correspond à la structure économique de l'Union européenne, globalement libérale et où il n'existe plus d'États interventionnistes économiquement parlant.

La politique budgétaire, seul levier économique dont disposent les membres de la zone euro

Reste la politique budgétaire. La mise en convergence des politiques budgétaires nationales des pays de la zone euro répond à deux préoccupations évoquées ci-dessus. Elle force les États, qui ont pu échapper à des efforts de rétablissement de leur compétitivité économique - à l'abri des facilités de prêts offerts par la force de l'euro -, à engager lesdites restructurations de l'appareil productif. Entraînant par là-même la réalisation du second objectif, celui du désendettement par la fin de l'argent facile obtenu sous le "parapluie" de la compétitivité allemande, traduit monétairement par la bonne tenue de l'euro. Bref, il s'agit d'optimiser le fonctionnement de la zone économique des 17 États membres de l'Eurozone, en harmonisant les modalités de distribution des richesses, prioritairement en faveur du secteur privé productif.

En revanche, les leviers de la politique budgétaire (réductions des dépenses et/ou accroissement des recettes) ressortent de la compétence des États. C'est le cœur de l'accord en préparation sur "l'union budgétaire européenne", visant à faire converger les choix budgétaires nationaux vers la même cible : celle d'un désendettement de l’État et l'instauration d'un équilibre budgétaire, traduisant la neutralité de l'activité étatique sur l'activité économique.

Il existe une relative convergence des discours français et allemand en matière des obligations exigées : des sanctions plus automatiques des États contrevenants aux règles du pacte de stabilité et de croissance, l'intégration dans les Constitutions des dits États d'une règle relative à l'objectif d'équilibre budgétaire (la "règle d'or"). Ensuite le débat reste ouvert.

Sarkozy et Merkel, d'accord sur le fond mais opposés sur les moyens

Pour Mme Merkel, il convient de donner à la Cour de justice la capacité de condamner les États fautifs en matière de respect des contraintes budgétaires précitées. Pourquoi donner à la Cour de justice un tel pouvoir, celui de juger des politiques budgétaires votées par les Parlements nationaux ? Il semble que cela relève de la même confiance attribuée à une autre institution "apolitique", la Banque centrale européenne. Derrière cette stratégie, se cache une méfiance sur la capacité des organes politiques (les gouvernements et les parlements nationaux) à faire accepter par leurs électeurs la rigueur budgétaire et à mettre fin à la "drogue" de la dette. C'est la même raison qui pousse les Allemands à confier à un "super-commissaire" européen les pouvoirs pour modifier les budgets nationaux qui sortirait par trop des clous !

A l'inverse, M.Sarkozy souhaite que les politiques nationaux gardent la main pour faire accepter de tels bouleversements à l'histoire démocratique des peuples européens. Le projet français semble, pour ce qu'il est possible d'en comprendre, se rapprocher d'un "Schengen de la zone euro". Dans ce cadre, pas de pouvoir supplémentaire aux juges de Luxembourg ou au collège de Commissaires, mais l'attribution à un "gouvernement budgétaire européen" (ou union budgétaire européenne), composé de représentants des différents États concernés, du pouvoir de remontrance et de corrections des budgets nationaux méconnaissant les règles et les limites décidées en commun par lesdits gouvernements. Ce gouvernement budgétaire européen pourrait être exercé par l'Eurogroupe (Conseil des ministres de l'économie et des finances de la zone euro) sous le contrôle du Conseil européen des chefs d’État et de gouvernement de la zone euro.

Ainsi, dans un cas comme dans l'autre, la zone euro autonomise plus ou moins son fonctionnement par rapport à celui suivi par les États non-membres de la zone euro. Mais ce système ne paraît pas pouvoir se mettre en œuvre - si facilement - par le biais d'une révision des traités de l'Union, compte tenu notamment du refus britannique de voir la zone euro devenir plus intégrationniste. Seule la voie d'une convention multilatérale entre les États intéressés, donnant éventuellement des pouvoirs supplémentaires à la Commission européenne à l'égard des États signataires de cette convention, permettrait une entrée en vigueur rapide. Il s'agit d'une stratégie reprenant, pour l'euro, ce qui avait été mené pour la libre circulation des personnes avec la convention de Schengen, à la fois dans l'Union et à côté des mécanismes communautaires partagés par tous les États membres de l'UE.

Il est difficile de se livrer à un exercice de pédagogie sur une notion dont les principaux initiateurs, Nicolas Sarkozy et Angela Merkel, ont pour l'instant diffusé peu d'informations précises sur leurs propositions en la matière.

Nous nous contenterons donc de dresser la problématique et les pistes possibles.

Tout d'abord, cette proposition relative à une plus forte convergence des politiques budgétaires nationales des Etats membres de la zone euro vise à centrer les regards sur un domaine relevant de la compétence desdits Etats. Elle acte l'absence de remise en cause d'un des postulats du traité de Maastricht: la politique monétaire des Etats de "l'Euroland" leur échappe et est sous la seule responsabilité de la Banque centrale européenne. Ils ne peuvent décider, pour améliorer leurs résultats économiques, ni de la modulation du taux de change de l'euro pour améliorer leur compétitivité internationale, ni des interventions de la Banque centrale européenne pour réduire leur endettement.

Dès lors, les deux outils politiques à leur disposition pour réduire leur endettement et renforcer leur compétitivité sont la politique économique et la politique budgétaire.

Pour l'instant, la première n'est pas mobilisable immédiatement. Qui pourrait avoir la légitimité pour décider d'une répartition des activités sur le territoire de la zone euro, ou du développement harmonieux des industries et des stratégies commerciales nationales. Prudemment, le traité sur le fonctionnement de l'UE se limite à parler de coordination, terme peu contraignant. Cette terminologie correspond à la structure économique de l'Union européenne, globalement libérale et où n'existent plus d'Etats interventionnistes économiquement parlant.

Reste la politique budgétaire. La mise en convergence des politiques budgétaires nationales des pays de la zone euro répond à deux préoccupations évoquées ci-dessus. Elle force les Etats qui ont pu échapper à des efforts de rétablissement de leur compétitivité économique à l'abri des facilités de prêts offerts par la force de l'euro à engager lesdites restructurations de l'appareils productifs, entraînant par là-même la réalisation du second objectif, celui du désendettement par la fin de l'argent facile obtenu sous le "parapluie" de la compétitivité allemande traduit monétairement par la bonne tenue de l'euro. Bref, il s'agit d'optimiser le fonctionnement de la zone économique des 17 Etats membres de l'euro en en harmonisant les modalités de distribution des richesses en faveur prioritairement du secteur privé productif.

En revanche, les leviers de la politique budgétaire (réductions des dépenses et/ou accroissement des recettes) ressortent de la compétence des Etats. C'est le cœur de l'accord en préparation sur "l'union budgétaire européenne", visant à faire converger les choix budgétaires nationaux vers la même cible: celle d'un désendettement de l'Etat et l'instauration d'un équilibre budgétaire, traduisant la neutralité de l'activité étatique sur l'activité économique.

Il existe une relative convergence des discours français et allemand en la matière des obligations exigées : des sanctions plus automatiques des Etats contrevenants aux règles du pacte de stabilité et de croissance, l'intégration dans les constitutions desdits Etats d'une règle relative à l'objectif d'équilibre budgétaire (la "règle d'or"). Ensuite le débat reste ouvert.

Pour Mme Merkel, il convient de donner à la Cour de justice la capacité de condamner les Etats fautifs en matière de respect des contraintes budgétaires précitées. Pourquoi donner à la Cour de justice un tel pouvoir, celui de juger des politiques budgétaires votées par les Parlements nationaux ? Il semble que cela relève de la même confiance attribuée à une autre institution "a-politique", la Banque centrale européenne. Derrière cette stratégie, se cache une méfiance sur la capacité des organes politiques (les gouvernements et les parlements nationaux) à faire accepter par leurs électeurs la rigueur budgétaire et à mettre fin à la "drogue" de la dette. C'est la même raison qui pousse les Allemands à confier à un "super-commissaire" européen les pouvoirs pour modifier les budgets nationaux qui sortirait par trop des clous !

A l'inverse, M.Sarkozy souhaite vouloir garder la main aux politiques nationaux pour faire accepter de tels bouleversements à l'histoire démocratique des peuples européens. Le projet français semble, pour ce qu'il est possible d'en comprendre, se rapprocher d'un "Schengen de la zone euro". Dans ce cadre, pas de pouvoir supplémentaire aux juges de Luxembourg ou au collège de Commissaires, mais l'attribution à un "gouvernement budgétaire européen" (ou union budgétaire européen), composé de représentants des différents Etats concernés, du pouvoir de remontrance et de corrections des budgets nationaux méconnaissant les règles et les limites décidées en commun par lesdits gouvernements. Ce gouvernement budgétaire européen pourrait être exercé par l'Eurogroupe (conseil des ministres de l'économie et des finances de la zone euro) sous le contrôle du Conseil européen des chefs d'Etat et de gouvernement de la zone euro.

Ainsi, dans un cas comme dans l'autre, la zone euro autonomise plus ou moins son fonctionnement par rapport de celui suivi par les Etats non-membres de la zone euro. Ce système ne paraît pas pouvoir se mettre en œuvre facilement par le biais d'une révision des traités de l'Union, notamment compte tenu du refus britannique de voir la zone euro devenir plus intégrationniste. Seule la voie d'une convention multilatérale entre les Etats intéressés, donnant éventuellement des pouvoirs supplémentaires à la Commission européenne à l'égard des Etats signataires de cette convention, permettrait une entrée en vigueur rapide. Il s'agit d'une stratégie reprenant, pour l'euro, ce qui avait été mené pour la libre circulation des personnes la convention de Schengen, à la fois dans l'Union et à côté des mécanismes communautaires partagés par tous les Etats membres de l'UE.

Il est difficile de se livrer à un exercice de pédagogie sur une notion dont les principaux initiateurs, Nicolas Sarkozy et Angela Merkel, ont pour l'instant diffusé peu d'informations précises sur leurs propositions en la matière.

Nous nous contenterons donc de dresser la problématique et les pistes possibles.

Tout d'abord, cette proposition relative à une plus forte convergence des politiques budgétaires nationales des Etats membres de la zone euro vise à centrer les regards sur un domaine relevant de la compétence desdits Etats. Elle acte l'absence de remise en cause d'un des postulats du traité de Maastricht: la politique monétaire des Etats de "l'Euroland" leur échappe et est sous la seule responsabilité de la Banque centrale européenne. Ils ne peuvent décider, pour améliorer leurs résultats économiques, ni de la modulation du taux de change de l'euro pour améliorer leur compétitivité internationale, ni des interventions de la Banque centrale européenne pour réduire leur endettement.

Dès lors, les deux outils politiques à leur disposition pour réduire leur endettement et renforcer leur compétitivité sont la politique économique et la politique budgétaire.

Pour l'instant, la première n'est pas mobilisable immédiatement. Qui pourrait avoir la légitimité pour décider d'une répartition des activités sur le territoire de la zone euro, ou du développement harmonieux des industries et des stratégies commerciales nationales. Prudemment, le traité sur le fonctionnement de l'UE se limite à parler de coordination, terme peu contraignant. Cette terminologie correspond à la structure économique de l'Union européenne, globalement libérale et où n'existent plus d'Etats interventionnistes économiquement parlant.

Reste la politique budgétaire. La mise en convergence des politiques budgétaires nationales des pays de la zone euro répond à deux préoccupations évoquées ci-dessus. Elle force les Etats qui ont pu échapper à des efforts de rétablissement de leur compétitivité économique à l'abri des facilités de prêts offerts par la force de l'euro à engager lesdites restructurations de l'appareils productifs, entraînant par là-même la réalisation du second objectif, celui du désendettement par la fin de l'argent facile obtenu sous le "parapluie" de la compétitivité allemande traduit monétairement par la bonne tenue de l'euro. Bref, il s'agit d'optimiser le fonctionnement de la zone économique des 17 Etats membres de l'euro en en harmonisant les modalités de distribution des richesses en faveur prioritairement du secteur privé productif.

En revanche, les leviers de la politique budgétaire (réductions des dépenses et/ou accroissement des recettes) ressortent de la compétence des Etats. C'est le cœur de l'accord en préparation sur "l'union budgétaire européenne", visant à faire converger les choix budgétaires nationaux vers la même cible: celle d'un désendettement de l'Etat et l'instauration d'un équilibre budgétaire, traduisant la neutralité de l'activité étatique sur l'activité économique.

Il existe une relative convergence des discours français et allemand en la matière des obligations exigées : des sanctions plus automatiques des Etats contrevenants aux règles du pacte de stabilité et de croissance, l'intégration dans les constitutions desdits Etats d'une règle relative à l'objectif d'équilibre budgétaire (la "règle d'or"). Ensuite le débat reste ouvert.

Pour Mme Merkel, il convient de donner à la Cour de justice la capacité de condamner les Etats fautifs en matière de respect des contraintes budgétaires précitées. Pourquoi donner à la Cour de justice un tel pouvoir, celui de juger des politiques budgétaires votées par les Parlements nationaux ? Il semble que cela relève de la même confiance attribuée à une autre institution "a-politique", la Banque centrale européenne. Derrière cette stratégie, se cache une méfiance sur la capacité des organes politiques (les gouvernements et les parlements nationaux) à faire accepter par leurs électeurs la rigueur budgétaire et à mettre fin à la "drogue" de la dette. C'est la même raison qui pousse les Allemands à confier à un "super-commissaire" européen les pouvoirs pour modifier les budgets nationaux qui sortirait par trop des clous !

A l'inverse, M.Sarkozy souhaite vouloir garder la main aux politiques nationaux pour faire accepter de tels bouleversements à l'histoire démocratique des peuples européens. Le projet français semble, pour ce qu'il est possible d'en comprendre, se rapprocher d'un "Schengen de la zone euro". Dans ce cadre, pas de pouvoir supplémentaire aux juges de Luxembourg ou au collège de Commissaires, mais l'attribution à un "gouvernement budgétaire européen" (ou union budgétaire européen), composé de représentants des différents Etats concernés, du pouvoir de remontrance et de corrections des budgets nationaux méconnaissant les règles et les limites décidées en commun par lesdits gouvernements. Ce gouvernement budgétaire européen pourrait être exercé par l'Eurogroupe (conseil des ministres de l'économie et des finances de la zone euro) sous le contrôle du Conseil européen des chefs d'Etat et de gouvernement de la zone euro.

Ainsi, dans un cas comme dans l'autre, la zone euro autonomise plus ou moins son fonctionnement par rapport de celui suivi par les Etats non-membres de la zone euro. Ce système ne paraît pas pouvoir se mettre en œuvre facilement par le biais d'une révision des traités de l'Union, notamment compte tenu du refus britannique de voir la zone euro devenir plus intégrationniste. Seule la voie d'une convention multilatérale entre les Etats intéressés, donnant éventuellement des pouvoirs supplémentaires à la Commission européenne à l'égard des Etats signataires de cette convention, permettrait une entrée en vigueur rapide. Il s'agit d'une stratégie reprenant, pour l'euro, ce qui avait été mené pour la libre circulation des personnes la convention de Schengen, à la fois dans l'Union et à côté des mécanismes communautaires partagés par tous les Etats membres de l'UE.

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