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Un vote « informé » serait-il moins civique ?
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Happy Few

Le débat sur la publication avancée des résultats porte-t-il sur le respect de la loi ou sur la préservation de monopoles d'audiences réservés à certains grands médias ?

Alain Renaudin

Alain Renaudin

Alain Renaudin dirige le cabinet "NewCorp Conseil" qu'il a créé, sur la base d'une double expérience en tant que dirigeant d’institut de sondage, l’Ifop, et d’agence de communication au sein de DDB Groupe.

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Certains s’insurgent et s’offusquent aujourd’hui à propos d’éventuelles fuites sur les tendances du vote.

Que la commission des sondages veille, c’est normal et c’est son rôle, pour que la loi actuelle soit respectée.

Mais finalement parlons-nous de loi ou de préservation de monopoles d'audiences réservés à certains grands médias ? Et lorsque nous nous inquiétons du pouvoir d’influence de ces informations sur l’électeur, n’est-ce pas exagéré ?, et n’est-ce pas sous-estimer le libre-arbitre du citoyen ? Et par ailleurs, lorsqu’il a été officieusement non toléré, ou considéré comme politically incorrect, de livrer à l’opinion publique depuis des semaines d’autres hypothèses de seconds tours que Hollande-Sarkozy, n’est-ce pas aussi influencer le vote ?

N'oublions pas non plus que le vote est aussi une opération tactique et stratégique. En quoi est-ce moins civique de voter, aussi, en fonction des tendances pour faire gagner son camp et ses idées ? Le vote, c'est le droit et le devoir de participer à la vie démocratique en exprimant son choix personnel, mais cela ne passe pas exclusivement par un bulletin qui exprimerait un choix intime, en aveugle, ce bulletin peut aussi être calculé, pour maximiser les chances de succès de ses convictions ou pour en contrer d’autres. A 200 000 voix près, les tendances annonçant Jean-Marie Le Pen au second tour le 21 avril 2002 auraient peut-être inversé la tendance, la démocratie en aurait-elle souffert ?

Mais ne sur-estimons pas pour autant, le vote est influencé par une multitude de paramètres (familiaux, culturels, régionaux, religieux, dogmatiques, médiatiques, biologiques, psychologiques, …), connaître une éventuelle tendance, qui n'influencera finalement que peu (car pas forcément crédible, car les convictions intimes seront plus fortes, car déjà voté le matin, etc.), n'est qu'une information de plus. Devons-nous aussi fermer les cafés et les lieux publics le jour de vote ? condamner quelqu'un qui aurait révélé son vote à son entourage ?

Et puis enfin, soyons honnêtes, connaître les tendances est un privilège d'happy few depuis des décennies. 100% du microcosme politico-médiatico-parisien est alerté. Que ceux qui sont contre s'interdisent de faire partie des listes et des réseaux informés. Personne ne refuse les alertes sms de l'après-midi. Le "problème" surgit surtout aujourd'hui parce que cette information atteint désormais potentiellement le grand public à travers les réseaux sociaux.

Que les médias ne diffusent pas massivement de tendances, certes, mais que certains, informés, interdisent à d'autres de pouvoir l'être, on peut finalement se demander si le problème "éthique" n'est pas finalement là plutôt qu'ailleurs.

Bon vote ! ... intime, utile, calculé, informé ... libre à chacun.

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